Last posts on soseki2024-03-29T09:58:06+01:00All Rights Reserved blogSpirithttps://starter.blogspirit.com/https://starter.blogspirit.com/fr/explore/posts/tag/soseki/atom.xmlTaniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlLanternetag:textespretextes.blogspirit.com,2021-05-01:32516202021-05-01T08:00:00+02:002021-05-01T08:00:00+02:00 « Quand j’étais petit, il y avait, en face de chez moi, un magasin...
<p><em><span style="font-size: 12.0pt; font-family: 'Times New Roman','serif';"><a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/00/3271028420.jpg" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-1118232" style="float: right; margin: 0.2em 0 1.4em 0.7em;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/00/865531813.jpg" alt="soseki,oreiller d'herbes,récit,littérature japonaise,poésie,peinture,montagne,marche,contemplation,culture,beauté,nature" /></a>« Quand j’étais petit, il y avait, en face de chez moi, un magasin de saké appelé Yorozuya où se trouvait une jeune fille nommée Okura. Cette Okura, durant les paisibles après-midi de printemps, pratiquait toujours des exercices de chant. Chaque fois qu’elle s’y mettait, je sortais dans le jardin. Au-delà d’un plant de thé de trente mètres carrés, trois pins se dressaient, à l’est de la salle de séjour. C’étaient des pins très hauts, dont le tronc avait une trentaine de centimètres de circonférence : détail curieux, c’était tous les trois ensemble qu’ils produisaient un effet intéressant. Malgré mon cœur d’enfant, il me suffisait de contempler ces pins pour ressentir un bien-être. A leur pied, une lanterne noircie de rouille était toujours obstinément posée sur une pierre rouge inconnue, comme un vieillard têtu. J’aimais beaucoup observer cette lanterne. Tout autour, des herbes anonymes du printemps jaillissaient d’une terre profondément imprégnée de mousse, semblant ignorer le vent qui souffle sur le monde d’ici-bas, elles s’amusent en exhalant leur parfum. A l’époque, j’avais coutume de trouver une place dans ces herbes, juste pour y glisser mes genoux, et m’y tenir immobile. Mon emploi du temps, à l’époque, me permettait de contempler la lanterne au pied de ces trois pins et de respirer le parfum de ces herbes, <a title=""kusamakura" (original piano ver.), improvisation on July 21st at Shin-Omuta St., Klagen Fisherman (YouTube)" href="https://www.youtube.com/watch?v=gBJnyl0N338" target="_blank" rel="noopener">en écoutant</a> le chant de mademoiselle Okura au loin. »</span></em></p><p><span style="font-size: 12.0pt; font-family: 'Times New Roman','serif';">Natsumé <a title="Tous les billets sur T&P" href="http://textespretextes.blogspirit.com/tag/soseki" target="_blank" rel="noopener">Sôseki</a>, </span><a title="Roman-haïku (T&P)" href="http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2021/04/26/roman-haiku-3251545.html" target="_blank" rel="noopener"><em><span style="font-size: 12.0pt; font-family: 'Times New Roman','serif';">Oreiller d’herbes</span></em></a></p><p style="text-align: center;"><span style="font-size: 12.0pt; font-family: 'Times New Roman','serif';"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 8pt;">Autoportrait à l'aquarelle de Natsume Sôseki <br />sur une carte postale pour Doi Bansui du 2 février 1905 (Wikimedia).<br /><br /><br /></span></span></p>
Taniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlRoman-haïkutag:textespretextes.blogspirit.com,2021-04-29:32515452021-04-29T08:00:00+02:002021-04-29T08:00:00+02:00 A propos d’ Oreiller d’herbes (Kusamakura, 1906, traduit du japonais par...
<p><span style="font-size: 12pt; font-family: 'Times New Roman', serif;">A propos d’<em><a title="Site de l'éditeur" href="https://www.payot-rivages.fr/rivages/livre/oreiller-dherbes-9782743631628" target="_blank" rel="noopener">Oreiller d’herbes</a> (Kusamakura,</em> 1906, traduit du japonais par René de Ceccaty et Ryôji Nakamura), <a title="Biographie sur nippon.com" href="https://www.nippon.com/fr/views/b07201/?pnum=1" target="_blank" rel="noopener">Natsumé Sôseki</a> a écrit : <em>« Si ce roman-haïku (l’expression est certes bizarre) s’avère possible, il ouvrira de nouveaux horizons dans la littérature. Il ne me semble pas que ce type de roman ait déjà existé en Occident. En tout cas, il n’y en a jamais eu de tels au Japon. »</em></span></p><p style="text-align: center;"><a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/02/3705424560.jpg" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-1118081" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/02/998752282.jpg" alt="soseki,oreiller d'herbes,récit,littérature japonaise,poésie,peinture,montagne,marche,contemplation,culture,beauté,nature" /></a></p><p><span style="font-size: 12pt; font-family: 'Times New Roman', serif;">Le titre est la traduction littérale d’un nom qui signifie le fait de ne pas dormir chez soi. <em>Oreiller d’herbes </em>est le récit d’un peintre et poète qui se rend à la montagne à la recherche d’un endroit paisible pour créer : <em>« Dès que vous avez compris qu’il est partout difficile de vivre, alors naît la poésie et advient la peinture. » </em>Il dit l’importance de l’art : <em>« Tout artiste est précieux car il apaise le monde humain et enrichit le cœur des hommes. »</em></span></p><p><span style="font-size: 12pt; font-family: 'Times New Roman', serif;">A plus de trente ans, tandis qu’il gravit un sentier de montagne, il est conscient de la proximité inévitable entre la lumière et l’ombre, la joie et la mélancolie, le plaisir et la souffrance. Il porte une boîte de peinture en bandoulière. Le chemin est difficile, il trébuche sur une pierre en longeant le lit d’une rivière. Puis viennent des lacets sur lesquels il avance en écoutant le chant des alouettes, en découvrant un champ de colza <em>« doré ».</em></span></p><p><span style="font-size: 12pt; font-family: 'Times New Roman', serif;"><em>« Le printemps nous endort. Les chats oublient d’attraper les souris et les hommes oublient leurs dettes. On oublie alors le lieu de son âme et notre raison s’égare. Ce n’est qu’à la vue des fleurs de colza qu’on s’éveille. Quand on entend le chant de l’alouette, on reconnaît l’existence de son âme. » </em>Le voilà de plain-pied dans le monde poétique de Wang Wei et de Tao Yuanming (deux grands poètes chinois), où <em>« se promener et errer, ne fût-ce qu’un instant, dans l’univers impassible. C’est une ivresse. »</em></span></p><p><span style="font-size: 12pt; font-family: 'Times New Roman', serif;">Le soir, les montagnes franchies, il arrivera à la station thermale de Nakoi. L’impassibilité, voilà le but de son voyage, loin des passions terrestres. Aussi, tous ceux qu’il rencontrera, il projette de les considérer comme des<em> « figurants dans le paysage de la nature »</em>, de les observer à distance, comme des personnages dans un tableau.</span></p><p style="text-align: center;"><a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/01/00/3664090608.2.jpg" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-1118280" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/01/00/1182197041.2.jpg" alt="soseki,oreiller d'herbes,récit,littérature japonaise,poésie,peinture,montagne,marche,contemplation,culture,beauté,nature" /></a></p><p><span style="font-size: 12pt; font-family: 'Times New Roman', serif;">Une averse l’oblige à se réfugier dans une maison de thé signalée par un postillon. Une vieille femme lui apporte du thé, son visage lui rappelle celui d’une vieille vue sur une scène de théâtre nô ; au fond du bol, <em>« trois fleurs de pruniers sommairement dessinées d’un seul coup de pinceau ».</em> Un bon feu lui permet de se sécher. Quand le ciel se dégage, elle lui montre le rocher du Tengu qu’il contemple (il y a souvent de quoi repenser au livre de Le Clézio sur <a title="T&P" href="http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2021/02/03/la-poesie-des-tang-3240249.html" target="_blank" rel="noopener">la poésie des Tang</a>).</span></p><p><span style="font-size: 12pt; font-family: 'Times New Roman', serif;">Le peintre d’<em>Oreiller d’herbes </em>se réfère souvent à des écrivains anglais et à un tableau en particulier, la fameuse <a title="Illustration Wikimedia" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/9/94/John_Everett_Millais_-_Ophelia_-_Google_Art_Project.jpg" target="_blank" rel="noopener"><em>Ophélie</em></a> peinte par Millais. Un bref arrêt de Gembei, le postillon, conduit la conversation sur <em>« la demoiselle de Nakoi »</em>, la fille de Shioda, l’aubergiste, qu’on dit malheureuse comme <em>« la Belle de Nagara »</em> autrefois – une fille de riche famille dont deux garçons étaient amoureux en même temps et qui a fini par se noyer dans la rivière.</span></p><p><span style="font-size: 12pt; font-family: 'Times New Roman', serif;">A l’auberge de Nakoi, le bruissement des bambous l’empêche de dormir. Il a tout loisir de détailler le décor de sa chambre et de rêver de la Belle de Nagara, quand il entend une voix qui fredonne puis s’arrête : en regardant dehors, il lui semble voir une silhouette au clair de lune, adossée à un pommier pourpre en fleurs, puis disparaître – la fille des Shioda ?</span></p><p><span style="font-size: 12pt; font-family: 'Times New Roman', serif;">Dans son carnet d’esquisses, il cherche à <em>« résumer en dix-sept syllabes »</em> ses impressions nocturnes, avant de sombrer dans le sommeil. Quand celui-ci se transforme en <em>« demi-sommeil »</em>, il entend la porte coulisser, voit une femme entrer : <em>« Comme un ange qui marche sur les flots, elle avance sur les nattes sans le moindre bruit. »</em> Un bras ouvre et referme le placard, la porte se referme. Quand il la rencontrera le matin, sa beauté et l’expression de son visage le laisseront perplexe, et plus encore son ironie quand elle l’invite à aller voir : <em>« On a fait le ménage dans votre chambre. »</em> Sous ses propres vers, quelqu’un en a écrit d’autres !</span></p><p style="text-align: center;"><a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/01/00/1161702577.jpg" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-1118192" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/01/00/2082978506.jpg" alt="soseki,oreiller d'herbes,récit,littérature japonaise,poésie,peinture,montagne,marche,contemplation,culture,beauté,nature" /></a></p><p><span style="font-size: 12pt; font-family: 'Times New Roman', serif;"><em>Oreiller d’herbes</em> va et vient entre la contemplation des choses, de la nature, des paysages, des nuances de la lumière et des couleurs, et l’observation des personnages rencontrés à Nakoi ou alentour, le désir de peindre et d’écrire. <em>« Si je dois à tout prix m’en expliquer, je dirai que mon cœur bouge simplement avec le printemps. » </em>Dans ce <em>« paradis sur terre » </em>où le printemps lui donne envie de rester immobile comme une plante, tout éveille sa curiosité : la nourriture, une poterie chinoise, <em>« la jeune madame »</em> dont le barbier du village lui conseille de se méfier – <em>« elle a un grain ».</em> </span></p><p><span style="font-size: 12pt; font-family: 'times new roman', times, serif;">Peindra-t-il un jour Nami, la fille de Shioda, dont les apparitions ponctuent le cours de ses réflexions ? </span><span style="font-size: 12pt; font-family: 'times new roman', times, serif;">Le peintre de Sôseki, en <em>« artiste véritable »</em>, veut voir tout ce qu’il voit <em>« comme un tableau »</em>. <a title="Tous les billets sur T&P" href="http://textespretextes.blogspirit.com/tag/soseki" target="_blank" rel="noopener">Sôseki</a> le poète y parvient aussi.</span></p>
Taniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlDéconcertant Japontag:textespretextes.blogspirit.com,2008-03-20:31093162008-03-20T17:35:00+01:002008-03-20T17:35:00+01:00 La rencontre entre une aide-ménagère et un vieil homme dont la mémoire ne...
<p align="left"><span lang="FR-BE" xml:lang="FR-BE"><span style="font-family: Times New Roman;"><span style="font-size: medium;">La rencontre entre une aide-ménagère et un vieil homme dont la mémoire ne fonctionne que pour les quatre-vingts dernières minutes qu’il vient de vivre est le sujet original de <em>La formule préférée du professeur</em> de Yoko Ogawa (née en 1962). Pour se souvenir de l’indispensable, le vieillard attache sur lui de petits papiers aux notes concises, qu’il relit chaque matin. Comme c’est un mathématicien, sa conversation porte le plus souvent sur les nombres, en particulier ses préférés, les nombres premiers, si présents dans la vie quotidienne, quoi qu’on pense. Et ainsi vont les jours, entre mots et chiffres. L’aide-ménagère, attentionnée, apprend vite à communiquer sur ce mode inédit. Mais c’est l’irruption de son petit garçon de dix ans dans l’univers si méthodique du vieux professeur, qui insuffle au récit ses pages les plus tendres.</span></span></span> <span lang="FR-BE" xml:lang="FR-BE"><span style="font-size: medium;"><span style="font-family: Times New Roman;"> </span></span></span></p><p align="center"><span lang="FR-BE" xml:lang="FR-BE"><span lang="FR-BE" xml:lang="FR-BE"><span style="font-size: medium;"><span style="font-family: Times New Roman;"><em><a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/00/1882945492.jpg" target="_blank" rel="noopener"><img style="margin: 0.7em 0px; border-width: 0px;" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/00/1882945492.jpg" alt="2799e14a0df3e7e95c90033e3e99038c.jpg" /></a></em></span></span></span></span></p><p align="left"><span lang="FR-BE" xml:lang="FR-BE"><span style="font-size: medium;"><span style="font-family: Times New Roman;">Dans <em>Les herbes du chemin</em> de Sôseki, dernier roman qu’il acheva, malade, en 1915, aucune tendresse, en revanche. Kenzô est l’homme mal à l’aise : décontenancé de voir réapparaître dans sa vie celui qui l’a élevé durant son enfance, avant que sa famille ne le reprenne (ce pour quoi il avait reçu une somme d’argent pour solde de tout compte), il n’en parle pas à sa femme, avec qui ses rapports sont constamment tendus, distants. Seul le calme de son bureau lui convient, où il passe des heures à écrire, à corriger, à écrire encore. Mais les obligations familiales et le sens des convenances vont l’obliger à recevoir ce Shimada, dont les formules de politesse masquent mal l’objet réel de ses visites : lui soutirer de l’argent.</span></span></span></p><p align="left"><span lang="FR-BE" xml:lang="FR-BE"><span style="font-size: medium;"><span style="font-family: Times New Roman;">Sans cesse, Kenzô s’apprête à refuser, puis finit par sortir le billet qui le rendra à sa chère solitude. Il n’est pas riche, contrairement à l’opinion que beaucoup ont de lui, mais il donne. Et s’il faut plus d’argent pour résoudre les problèmes domestiques, il travaille davantage et noircit page après page de son écriture de plus en plus serrée.</span></span></span></p><p align="left"><span lang="FR-BE" xml:lang="FR-BE"><span style="font-size: medium;"><span style="font-family: Times New Roman;">Si la douceur s’instille dans le roman d’Ogawa, dans l’autre le malaise sature l’atmosphère. . <em>« Les hommes, en fait de changement, ne font que décliner ; les paysages changent aussi, mais ils continuent à prospérer sous le soleil. »<br />(Les herbes du chemin)</em></span></span></span></p><p align="left"><span lang="FR-BE" xml:lang="FR-BE"><span style="font-size: medium;"><span style="font-family: Times New Roman;">Déconcertant Japon, où les rapports humains semblent parfois si codifiés qu’ils laissent peu de place à l’expression de l’intime, à la franchise, au langage du cœur.</span></span></span></p><p align="left"><span lang="FR-BE" xml:lang="FR-BE"><span style="font-size: medium;"><span style="font-family: Times New Roman;">L’amertume paralysante d’un Kenzo si malhabile avec autrui comme avec lui-même, chez Sôseki, après la délicatesse du dialogue entre les générations dans <em>La formule préférée du professeur</em>, atteste de la diversité des romanciers japonais. Deux romans, deux visages, deux générations de cette littérature que je connais peu, mais qu’ils m’incitent à lire.</span></span></span></p>