Last posts on shafak2024-03-28T17:13:18+01:00All Rights Reserved blogSpirithttps://starter.blogspirit.com/https://starter.blogspirit.com/fr/explore/posts/tag/shafak/atom.xmlTaniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlLaboratoire mentaltag:textespretextes.blogspirit.com,2019-08-17:31405572019-08-17T08:30:00+02:002019-08-17T08:30:00+02:00 « A chaque intervention, Peri se renfonçait un peu plus dans son...
<p><em><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;"><a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/00/00/4203889712.jpg" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-1072352" style="float: right; margin: 0.2em 0 1.4em 0.7em;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/00/00/4267019995.jpg" alt="shafak,elif,trois filles d'eve,roman,littérature anglaise,religion,turquie,oxford,culture" /></a>« A chaque intervention, Peri se renfonçait un peu plus dans son siège, rapetissant à vue d’œil. Elle aurait aimé disparaître complètement. Il lui semblait de plus en plus évident que le professeur Azur avait sélectionné les étudiants moins selon les mérites de leur bilan académique qu’en fonction de leurs histoires et ambitions personnelles. Il n’y avait pas deux étudiants venus d’horizons similaires, et les divergences entre eux étaient si manifestes qu’elles pouvaient facilement tourner à la bagarre. Peut-être était-ce cela que cherchait Azur : un conflit – ou quantité de conflits. Peut-être qu’il expérimentait sur les étudiants sans que ceux-ci en aient conscience, comme s’ils étaient une portée de souris qui s’agitaient et grattaient fébrilement entre les murs de son laboratoire mental. Si c’était le cas, que voulait-il donc tester – une nouvelle idée de Dieu ? »</span></em></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Elif Shafak, </span><a title="Les questions de Peri (T&P)" href="http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2019/08/04/les-questions-de-peri-3140556.html" target="_blank" rel="noopener"><em><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Trois filles d’Eve</span></em></a></p>
Taniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlLes questions de Peritag:textespretextes.blogspirit.com,2019-08-15:31405562019-08-15T08:30:00+02:002019-08-15T08:30:00+02:00 Elif Shafak met sans doute un peu d’elle dans ses héroïnes qui, d’un...
<p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;"><a title="Wikipedia" target="_blank" rel="noopener">Elif Shafak</a> met sans doute un peu d’elle dans ses héroïnes qui, d’un roman à l’autre, se posent plein de questions. <a title="Site de l'éditeur" href="https://editions.flammarion.com/Catalogue/hors-collection/litterature-etrangere/trois-filles-deve" target="_blank" rel="noopener"><em>Trois filles d’Eve</em></a> (2016, traduit de l’anglais (Turquie) par Dominique Goy-Blanquet, 2018) tourne autour d’une question essentielle déjà abordée (très différemment) dans <a title="T&P" href="http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2012/02/27/les-soufis-de-shafak.html" target="_blank" rel="noopener"><em>Soufi, mon amour</em></a>, même si la romancière turque (qui vit à Londres) raconte surtout ce qui arrive à Nazperi Nalbantoglu, appelée Peri, trente-cinq ans, une <em>« bonne personne »</em> aux yeux de sa famille et de ses amis stambouliotes : <em>« Bonne épouse, bonne mère, bonne maîtresse de maison, bonne citoyenne, bonne musulmane moderne, voilà ce qu’elle était. »</em></span></p><p style="text-align: center;"><a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/00/02/223230422.jpg" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-1072351" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/00/02/3965367353.jpg" alt="shafak,elif,trois filles d'eve,roman,littérature anglaise,religion,turquie,oxford,culture" /></a></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;"><em>« Le temps, comme un tailleur adroit, avait raccordé par des coutures invisibles les deux tissus qui gainaient la vie de Peri : ce que les gens pensaient d’elle, et ce qu’elle pensait d’elle-même. »</em> Très vite, la narratrice la plonge dans une situation problématique qui fait découvrir au lecteur les tumultes de sa vie intérieure et la renvoie à son autre moi secret : la Peri étudiante à Oxford, celle qui aimait courir tous les jours, celle qui garde sur elle une photo d’alors, où elle est en compagnie de deux autres étudiantes – et du professeur Azur.</span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Avec sa fille de douze ans en pleine crise d’hostilité, Peri est coincée dans la folle circulation d’Istanbul. Adnan, son mari, l’attend à un dîner mondain dans le <em>« manoir balnéaire »</em> d’un riche homme d’affaires. Elle préférerait de loin rester à la maison avec un bon roman, mais <em>« la solitude était un privilège rare à Istanbul ».</em> Par erreur, elle a jeté son sac de luxe (un faux) sur le siège arrière et laissé les portes de sa Range Rover déverrouillées ; pendant qu’elle attend le feu vert pour avancer, un vagabond surgit et vole son sac. Sans réfléchir, elle laisse sa fille en lui disant de l’attendre avec les portes fermées et se lance à sa poursuite.</span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Entre 1980 et 2016, Trois filles d’Eve déroule plusieurs séquences de la vie de Peri. <em>« La dernière-née des Nalbantoğlu »</em> a grandi dans un quartier populaire sans se sentir privée de rien, sinon de sérénité, entre ses parents <em>« aussi incompatibles que la taverne et la mosquée ».</em> Mensur, son père, abuse du raki ; il aime discuter politique, déplorer l’état des choses, honore la mémoire d’Atatürk. Selma, sa mère, a changé sous l’influence d’un prédicateur ; elle se couvre complètement la tête et veut ramener les gens dans le droit chemin d’Allah, son mari en premier lieu. La religion a divisé la famille en deux : Selma et le fils cadet, Mensur et le fils aîné ; Peri, <em>« tiraillée »</em> entre les deux, ne veut offenser personne.</span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Quand son frère aîné, gauchiste, se fait arrêter et condamner pour appartenance à une organisation communiste illicite, le conflit entre ses parents monte encore d’un cran et Peri entame sa propre <em>« querelle avec Dieu ».</em> S’il ne leur vient pas en aide, c’est qu’il n’est pas tout-puissant ou bien qu’il n’est pas miséricordieux. En colère, Peri s’interroge sur la nature de Dieu. Pour l’apaiser, son père lui offre un carnet et l’encourage à y écrire ses pensées sur Dieu, écrire, effacer, pour éviter les idées noires. Il la soutient dans ses études, elle est bonne élève, et c’est lui qui va l’inscrire à Oxford, convaincu de ses grandes capacités : <em>« Il n’y a que les jeunes comme toi qui peuvent changer le destin de ce vieux pays fatigué. »</em></span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Quand Peri est arrivée à Oxford avec ses parents, Selma l’a tout de suite mise en garde contre Shirin, l’étudiante iranienne de deuxième année qui les a accueillis : grande, maquillée, séduisante. Celle-ci, sa future voisine de chambre au collège, se révèle audacieuse dans tous les domaines. C’est elle qui parle la première à Peri du professeur Azur, qui lui a <em>« ouvert les yeux »</em> dans un cours sur Dieu qu’elle lui recommande. Peri a bien trop à découvrir, à lire, à étudier, pour envisager de s’inscrire à un séminaire en plus. Oxford la ravit : la beauté des bâtiments anciens, le silence (inconnu à Istanbul), l’ivresse de vivre une étape importante de sa vie. Elle s’achète une paire de baskets pour courir et le jogging devient une habitude quotidienne, sa meilleure manière de s’alléger de ce qui la préoccupe.</span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Durant <em>« la semaine des débutants »</em>, elle fait la connaissance de Mona, une étudiante égypto-américaine qui porte le foulard. En deuxième année, celle-ci est bénévole dans diverses associations et milite pour le féminisme. Peri, Shirin, Mona : les trois filles d’Eve sont très différentes. Peri n’est pas facilement à l’aise avec les autres, que ce soit là-bas quand elle était étudiante ou à Istanbul, à cette soirée où sa fille, qui a récupéré le polaroïd tombé du sac de sa mère où elle est photographiée en leur compagnie, la met mal à l’aise en l’exhibant. Une des invitées croit y reconnaître un professeur d’Oxford licencié après un scandale avec une étudiante et met Peri sur la sellette, celle-ci prétend ne pas le connaître.</span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Or elle a fini par croiser le chemin du professeur Azur, elle a même été admise à son cours, le plus surprenant de ceux qu’elle a suivis, le plus passionnant aussi, bien qu’il l’ait souvent mise mal à l’aise. Le roman d’Elif Shafak distille peu à peu le passé de Peri, qui cherche sa voie entre les certitudes de Mona et les insolences de Shirin, lit énormément, curieuse de tout et inquiète d’elle-même. Comme avec ses parents, elle est toujours à la recherche d’une voie médiane. La vie étudiante lui permet de se familiariser avec d’autres modes de vie. Les onze étudiants d’Azur ont été sélectionnés pour entrechoquer leurs convictions sur Dieu et apprendre à ne pas se focaliser uniquement sur la religion qui ne fait que <em>« diviser et brouiller l’esprit ».</em></span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">La romancière maintient le suspense sur près de six cents pages, tant à propos de ce qu’a vécu Peri à Oxford que sur la soirée stambouliote qui tourne mal. A travers une histoire très romanesque, Elif Shafak illustre dans <em>Trois filles d’Eve</em> les tensions de la famille et de la société turques, la découverte excitante de la vie universitaire, les choix de vie des jeunes femmes. Ecrire ce roman a été éprouvant pour cette <em>« citoyenne du monde »</em>, comme elle se définit dans une <a title="YouTube" href="https://www.youtube.com/watch?v=no_f_POMn_4" target="_blank" rel="noopener">vidéo</a> sous-titrée sur le site de l’éditeur, <em>« émotionnellement et intellectuellement »</em>, mais elle a voulu porter dans la sphère publique ces débats qui ont lieu, faute de liberté d’expression, dans la sphère privée. </span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Inquiète de la régression actuelle en Turquie et dans les pays musulmans, où les femmes ont beaucoup à perdre, elle a donné la parole à Shirin, Mona et Peri, <em>« la pécheresse, la croyante et la déboussolée »</em>, sans chercher à faire passer une morale ou un message. Cette façon originale d’aborder la question de Dieu m’a plu, <a title="Portrait dans Libération" href="https://next.liberation.fr/livres/2018/01/04/elif-shafak-ni-dieu-ni-sultan_1620356" target="_blank" rel="noopener">Elif Shafak</a> la reliant aux <em>« aspirations d’une jeunesse en quête de vérité et de liberté. »</em></span></p>
Taniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlDans l'airtag:textespretextes.blogspirit.com,2012-02-28:31100442012-02-28T20:20:00+01:002012-02-28T20:20:00+01:00 « Puis, finalement, un matin, j’entrevis une couleur vive, aussi...
<p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><em><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;">« Puis, finalement, un matin, j’entrevis une couleur vive, aussi délicieuse et douce qu’une chanson, qui traversait la couche de neige. C’était un buisson de trèfle couvert de minuscules fleurs lavande. Mon cœur s’emplit de joie. En revenant vers le centre, je tombai sur le novice aux cheveux roux et le saluai gaiement. Il était si habitué à me voir figé dans un silence grognon qu’il en resta bouche bée.</span></span></em></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><em><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;">« Souris, mon garçon, lui criai-je. Ne vois-tu pas que le printemps est dans l’air ? »</span></span></em></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><em><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;">Dès ce jour, le paysage changea à une vitesse remarquable. La dernière neige fondue, les arbres se couvrirent de bourgeons, hirondelles et roitelets revinrent et, avant peu, une odeur légère et épicée emplit l’air. »</span></span></em></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;">Elif Shafak,</span></span><a title="Les soufis de Shafak (T&P)" href="http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2012/02/24/les-soufis-de-shafak.html" target="_blank"><em><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;"> Soufi, mon amour</span></span></em></a></p><p style="text-align: center;"><a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/02/994335197.jpg" target="_blank"><img id="media-117390" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/00/01/2184707808.jpg" alt="Rencontre entre Rûmi et Shams.jpg" /></a><span style="font-family: Times New Roman; font-size: small;"> <br /></span><span style="font-family: 'Arial','sans-serif'; font-size: 8pt; mso-ansi-language: FR-BE;">Rûmi rencontre Shams de Tabriz pour la première fois <br /></span><span style="font-family: 'Arial','sans-serif'; font-size: 8pt; mso-ansi-language: FR-BE;">(<a title="Source de l'illustration" href="http://www.sacred-texts.com/isl/mes/index.htm" target="_blank">Manuscrit persan</a>)</span></p><p style="text-align: center;"> </p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p>
Taniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlLes soufis de Shafaktag:textespretextes.blogspirit.com,2012-02-27:31100432012-02-27T08:30:00+01:002012-02-27T08:30:00+01:00 « Voyons, chérie, à quel siècle crois-tu vivre ? Il faut te mettre dans...
<p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt;" lang="FR"><span style="font-family: Times New Roman;"><em>« Voyons, chérie, à quel siècle crois-tu vivre ? Il faut te mettre dans le crâne que les femmes n’épousent pas les hommes dont elles tombent amoureuses. Quand vient le bon moment, elles choisissent celui qui sera un bon père et un mari digne de confiance. L’amour n’est qu’un délicieux sentiment qui surgit et s’évanouit aussi vite. »</em> Juste avant ses quarante ans, Ella qui s’était contentée jusque-là d’être <em>« mère, épouse, promeneuse de chien et maîtresse de maison »</em>, a décroché un emploi de lectrice pour une agence littéraire de Boston. Tout irait bien si sa fille aînée ne voulait se marier, sans attendre la fin de ses études. Déçue par la réaction de ses parents, Jeannette soupçonne qu’ils rejettent Scott <em>« parce qu’il n’est pas juif »</em> et proteste : ils s’aiment ! D’où cette réponse d’Ella, qui plonge sa famille dans la perplexité, et d’abord David, son mari.</span></span></p><p style="text-align: center;"><a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/02/2751668029.jpg" target="_blank"><img id="media-117388" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/01/835138213.jpg" alt="shafak,soufi,mon amour,roman,littérature anglaise,turquie,islam,soufisme,rûmi,shams de tabriz,mysticisme,culture" /></a> </p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-family: Times New Roman;"><span style="font-size: 12pt;" lang="FR">Le meilleur roman d’<a title="Notice Wikipedia" href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Elif_Shafak" target="_blank">Elif Shafak</a> ? L’auteur de <a title="Une autre Istanbul (T&P)" href="http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2008/12/02/une-autre-istanbul.html" target="_blank"><em>La bâtarde d’Istanbul</em></a> et <a title="Shafak la conteuse (T&P)" href="http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2010/02/11/shafak-la-conteuse.html" target="_blank"><em>Bonbon Palace</em></a>, signe avec <em>Soufi, mon amour </em>(2010), un roman formidable sur <em>« toutes les formes de l’amour ».</em> <em>The Forty Rules of Love</em>, traduit de l’anglais (Turquie) par Dominique Letellier, tisse des liens entre les états d’âme d’Ella Rubinstein qui vit à Northampton en 2008 et un manuscrit dont elle doit faire rapport. <span style="mso-spacerun: yes;"> </span><em>« Doux blasphème »</em> d’A. Z. Zahara se déroule au XIIIe siècle à <a title="Notice Wikipedia" href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Konya" target="_blank">Konya</a>, en Anatolie, et raconte l’histoire du lien exceptionnel entre Rûmi, <em>« le plus grand poète et le chef le plus révéré de l’histoire de l’islam »</em> et Shams de Tabriz, un derviche errant anticonformiste. </span><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;">Ella dispose de trois semaines pour rendre sa copie. Elle ne sait pas encore que, le temps de lire ce livre, sa vie va changer.</span></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;">Dans l’avant-propos, Zahara présente <a title="Notice Wikipedia" href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Djal%C3%A2l_ad-D%C3%AEn_R%C3%BBm%C3%AE" target="_blank">Rûmi</a>, surnommé Mawlânâ <em>(« Notre Maître »)</em> et sa rencontre avec Shams en 1244 qui transformera le <em>« religieux moyen »</em> qu’était Rûmi en <em>« mystique engagé »</em> et <em>« poète passionné »</em>, <em>« avocat de l’amour »</em> et initiateur de la danse des derviches tourneurs inséparable du <a title="Le soufisme (Questions sur les religions)" href="http://www.1000questions.net/fr/religions/religions3.html" target="_blank">soufisme</a>. A l’opposé du jihad orienté vers l’extérieur, contre les infidèles, Rûmi plaide pour un jihad orienté vers l’intérieur, contre son propre ego.</span></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;"><a title="Photo portrait (Géo)" href="http://www.geo.fr/photos/reportages-geo/istanbul-le-carnet-d-adresses-des-connaisseurs/elif-shafak-la-romanciere-de-l-amour" target="_blank">Elif Shafak</a> alterne donc deux histoires, celle du manuscrit et celle d’Ella qui avait cessé de croire en l’amour et le redécouvre. Zahara donne la parole dans son propre récit à différents protagonistes, et commence par la fin : l’assassinat de Shams. </span></span><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;">Depuis l’enfance, celui-ci a des visions, entend des voix, ce qui a désespéré ses parents et lui a fait quitter Tabriz, sa ville natale, pour devenir un derviche errant, à la recherche de Dieu. De toutes ses expériences, il a tiré une liste personnelle des <em>« Quarante Règles de la religion de l’amour »</em> (distillées tout au long du roman). Il voudrait transmettre son héritage spirituel à un compagnon qui ne soit ni son maître ni son disciple.</span></span><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;"> </span></span></p><p style="text-align: center;"><a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/00/01/1065602219.jpg" target="_blank"><img id="media-117392" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/02/1740662286.jpg" alt="shafak,soufi,mon amour,roman,littérature anglaise,turquie,islam,soufisme,rûmi,shams de tabriz,mysticisme,culture" /></a></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;">Shams débarque dans un modeste centre derviche à Bagdad le jour où <em>« le maître »</em> y reçoit un juge ambitieux, plutôt méfiant à l’égard des soufis. <em>« Elancé, austère, d’âge indéterminé »</em>, l’homme vêtu de noir, les cheveux longs et le bol de bois des derviches mendiants à la main, s’assied dans l’assemblée, le regard perçant. Comme le juge ironise sur la nécessité de vagabonder de par le monde pour trouver Dieu, Shams lui répond et, au grand embarras du maître, le met sur la sellette. </span></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;">Le juge se pose alors en responsable de la <em>sharia</em>. <em>« La </em>sharia<em> est comme une bougie, dit Shams de Tabriz. (…) Mais n’oublions pas qu’une bougie nous aide à aller d’un lieu à un autre dans l’obscurité. Si nous oublions où nous allons et nous concentrons sur la bougie, à quoi sert-elle ? »</em> Irrité, l’autre menace : <em>« La frontière est mince entre votre position et le pur blasphème. »</em> Et Shams d’expliquer la différence entre un pur blasphème et le <em>« doux blasphème »</em> dont Dieu a parlé un jour à Moïse, pour distinguer les cérémonies et les rituels de la pureté des cœurs.</span></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;">Par curiosité, Ella Rubinstein cherche le nom de l’auteur du manuscrit sur Internet et découvre un blog signé Aziz, un voyageur qui photographie des gens dans le monde entier. A chacune de ces personnes, il manque quelque chose, un simple objet comme un bouton ou davantage, <em>« une dent, un doigt, voire une jambe » – « nous nous sentons tous incomplets »</em>, dit la légende. Ella cède à l’impulsion d’écrire à l’adresse électronique indiquée, pour dire à Aziz et son plaisir à lire le début de son manuscrit et son désarroi personnel par rapport à sa fille amoureuse.</span></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;">Commence alors une correspondance qui va changer son point de vue sur la vie. Jusqu’alors, Ella n’a guère réagi aux infidélités de son mari, faisant comme si de rien n’était, satisfaite qu’il lui revienne toujours, même si le désir a disparu entre eux. Sa routine quotidienne de bourgeoise juive est son garde-fou. Le manuscrit et les courriels d’Aziz vont l’amener à changer tout cela et à se mettre en quête de l’amour qui lui manque, elle en prend conscience.</span></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;">Les cinq parties de Soufi, mon amour – <em>Terre, Eau, Vent, Feu</em> – correspondent aux quatre éléments et à un cinquième qui importe dans la vision soufie de l’univers, le <em>Vide</em>. Mais dans cette double histoire, les péripéties sont bien concrètes. D’un côté, le cheminement de Shams, qui transforme toutes les personnes qu’il rencontre et finit par trouver le compagnon spirituel qui lui manquait, le fameux Rûmi. L’existence de celui-ci, de sa femme et de ses enfants, en sera bouleversée. De l’autre, la relation entre Ella et Aziz – <em>« un soufi, l’enfant de l’instant présent »</em> – qui dévoile peu à peu sa personnalité.</span></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;"><a title="La critique du roman sur Wodka" href="http://wodka.over-blog.com/article-elif-shafak-soufi-mon-amour-56420106.html" target="_blank"><em>Soufi, mon amour</em></a> nous fait connaître la vie du poète Rûmi, chamboulée par la rencontre avec Shams de Tabriz, et les principes fondamentaux du soufisme, dont la modération est aux antipodes de l’islamisme. Le premier roman d’<a title="Quatre questions à Elif Shafak (sur son site)" href="http://elifshafak.fr/index5.html" target="_blank">Elif Shafak</a> s’intitulait déjà <em>Pinhan (Le Soufi)</em>, et lui a valu en 1998 le prix Rûmi qui couronne en Turquie la meilleure œuvre de littérature mystique.</span></span></p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p><p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE;"><span style="font-family: Times New Roman;">L’interrogation religieuse, dans ce roman, est indissociable de la quête amoureuse. Ce n’est pas sans danger ni douleur. On connaît déjà le destin du derviche errant. Quant à Ella Rubinstein, elle a le même âge qu’<a title="Khatchig Mouradian, « Parler de la Turquie. Une conversation avec Elif Shafak » (Imprescriptible)" href="http://www.imprescriptible.fr/dossiers/mouradian/shafak" target="_blank">Elif Shafak</a> (que des compatriotes agacés par sa position sur le génocide arménien ont traitée de <em>« soi-disant Turque »</em> – née à Strasbourg, cosmopolite, la <a title="Biographie sur le site d’Elif Shafak" href="http://elifshafak.fr/index3.html" target="_blank">romancière </a>a enseigné aux Etats-Unis avant de s’installer à Istanbul) et refuse désormais de vivre sans amour. Le trouver si facilement par courriel ressortit à un <a title="Le billet d’Aifelle, que ce livre a déçue (Le goût des livres)" href="http://legoutdeslivres.canalblog.com/archives/2010/10/18/19275469.html#comments" target="_blank">romanesque</a> conventionnel, très pâle en regard de l’histoire captivante de Shams et Rûmi, qui donne envie de lire la <a title="Poèmes de Rûmi" href="http://www.omalpha.com/jardin/rumi.html" target="_blank">poésie</a> du célèbre soufi.</span></span></p>
Taniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlUn silencetag:textespretextes.blogspirit.com,2010-02-16:31096342010-02-16T20:20:00+01:002010-02-16T20:20:00+01:00 « Sa phrase à peine achevée, un silence de plomb s’abattit dans le...
<p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-bidi-font-size: 10.0pt;"><span style="font-family: Times New Roman;"><em>« Sa phrase à peine achevée, un silence de plomb s’abattit dans le salon de coiffure.<br /> Il fallait pour cela qu’un grand nombre d’événements, en eux-mêmes déjà totalement improbables, coïncident miraculeusement. Il fallait par exemple que cessent les klaxons assourdissants des voitures qui s’engageaient à la queue leu leu dans la rue Jurnal pour éviter la circulation de l’axe principal, et provoquaient un chaos indescriptible ; que s’arrêtent les cris du marchand de pastèques qui avait installé son étal au coin de la rue et les haut-parleurs de son concurrent qui, à bord de son antique camionnette, sillonnait sans répit le quartier, repassant au même endroit toutes les vingt minutes ; et il y avait bien sûr les enfants, qui emplissaient à dix mètres de là le parc de jeux coincé entre les immeubles, équipé de deux balançoires, d’une planche à bascule et d’un pauvre toboggan dont le métal chauffait si vite sous le soleil qu’on s’y brûlait le derrière ; il fallait que tous ces bruits, comme s’ils se passaient le mot, cessent d’un seul coup et en même temps. »</em></span></span></p> <p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p> <p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-bidi-font-size: 10.0pt;"><span style="font-family: Times New Roman;">Elif Shafak, <em><a target="_blank" href="http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2010/02/11/shafak-la-conteuse.html" title="Shafak la conteuse">Bonbon Palace</a></em></span></span> </p> <div style="text-align: center"><span style="font-size: 12pt; mso-bidi-font-size: 10.0pt;"><a target="_blank" href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/00/2906368095.JPG"><img src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/01/00/2596625828.JPG" alt="Enfants stambouliotes.JPG" name="media-66473" id="media-66473" style="border-width: 0; margin: 0.7em 0;" /></a></span></div> <div style="text-align: center"></div> <div style="text-align: left;"></div> <p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p> <p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-bidi-font-size: 10.0pt;"><span style="font-family: Times New Roman;">Un lien vers <em>"<a target="_blank" href="http://www.lalibre.be/actu/belgique/article/563176/a-tantot-a-jamais.html" title="L'évocation de F. Matthys">A tantôt." A jamais</a></em><a target="_blank" href="http://www.lalibre.be/actu/belgique/article/563176/a-tantot-a-jamais.html" title="L'évocation de F. Matthys">. par Francis Matthys</a> (La Libre Belgique, 16/2/2010)</span></span></p>
Taniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlShafak la conteusetag:textespretextes.blogspirit.com,2010-02-15:31096332010-02-15T08:30:00+01:002010-02-15T08:30:00+01:00 « Que de détails, que de méandres et que d’histoires, toutes...
<p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-bidi-font-size: 10.0pt;"><span style="font-family: Times New Roman;"><em>« Que de détails, que de méandres et que d’histoires, toutes imbriquées les unes dans les autres, en cercles concentriques qui se resserrent pour, au final, ne déboucher sur rien… »</em> Après environ cinq cents pages de <em>Bonbon Palace</em> (2002),<br /> il est difficile de ne pas y voir de l’autodérision de la part d’Elif Shafak, découverte avec <a target="_blank" href="http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2008/12/02/une-autre-istanbul.html" title="Une autre Istanbul"><em>La Bâtarde d’Istanbul</em></a>. La romancière turque avant tout conteuse ouvre d’ailleurs le roman sur un aveu : <em>« Les gens disent que j’ai beaucoup d’imagination. C’est la façon la plus délicate jamais inventée pour dire : « Tu débites des absurdités ! » Ils ont peut-être raison. »</em> Ce prologue débouche sur une défense de l’absurdité qui n’est ni vérité ni mensonge, représentée par le cercle qui n’a <em>« ni fin ni commencement ».</em> Comme dans un jeu ancien, <em>« à l’époque où les poubelles dans les rues avaient des couvercles en fer, ronds et grisâtres »</em> : on les faisait tourner à toute vitesse puis on les immobilisait d’un coup pour permettre au hasard de désigner, dans des mots tracés à la craie tout autour, les réponses aux questions <em>« Quand ? A qui ? Quoi ? »</em></span></span> </p> <div style="text-align: center"><span style="font-size: 12pt; mso-bidi-font-size: 10.0pt;"><a target="_blank" href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/00/02/667901958.jpg"><img src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/00/00/1522262381.jpg" alt="Turquie cartes d'Istanbul.jpg" name="media-66328" id="media-66328" style="border-width: 0; margin: 0.7em 0;" /></a></span></div> <p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p> <p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-bidi-font-size: 10.0pt;"><span style="font-family: Times New Roman;">Un récit peut se lancer de cette façon : <em>« Au printemps 2002, à Istanbul, l’un de nous, sans attendre que son temps fût révolu ni que le cercle se refermât sur lui-même, mourut. »</em> L’histoire de <em>Bonbon Palace</em> démarre avec l’arrivée d’une camionnette du Service de Désinsectisation devant l’immeuble. Depuis toujours, ses habitants se plaignent des ordures qui s’amoncellent contre le mur séparant la rue du jardin de Bonbon Palace. Et Shafak de remonter le temps pour nous décrire les deux cimetières qui occupaient jadis ce terrain, un grand cimetière musulman, à côté d’un petit cimetière orthodoxe arménien, et les deux sarcophages en marbre parfaitement semblables qui ont résisté aux promoteurs immobilier lorsqu’ils ont construit là <em>« de pimpants immeubles ».</em></span></span></p> <p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p> <p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-bidi-font-size: 10.0pt;"><span style="font-family: Times New Roman;">Puis vient l’histoire d’Agripina Fiodorovna Antipova qui a mis les pieds pour la première fois à Istanbul en 1920, et qui ne distingue pas sa couleur. Sa ville natale de Grozny, c’était le rouge pourpre de la propriété familiale ; la villa des vacances pascales, <em>« un vert éclatant de fraîcheur ».</em> La ville turque où, comme des milliers de Russes blancs, elle se réfugie à l’âge de dix-neuf ans avec son époux, ne lui réussit pas. L’enfant qu’elle y met au monde ne survit pas. Ils s’exilent alors à Paris, où, avec l’aide de son frère, Antipov s’enrichit considérablement du marché noir pendant la guerre, tandis qu’elle s’étiole dans une maison de soins. Un jour où il lui apporte des bonbons, les couleurs lui reviennent, et même celle d’Istanbul qu’elle déclare violette. C’est ainsi qu’est né Bonbon Palace, que son mari a fait bâtir en style Art Nouveau déjà passé de mode, où ils finiront leurs jours dans l’appartement n° 10. Leur héritière française n’y mettra jamais les pieds.</span></span></p> <p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p> <p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-bidi-font-size: 10.0pt;"><span style="font-family: Times New Roman;">Et voilà enfin les résidents de Bonbon Palace au XXIe siècle, les coiffeurs jumeaux Djemal & Djelal au rez-de-chaussée, Mme Teize, l’occupante du n° 10 qui a soigneusement entreposé les meubles des Antipov en attendant que la Française s’en occupe, la Maîtresse bleue qui fait jaser, la redoutée Hygiène Tijen qui jette régulièrement objets ou vêtements par-dessus le balcon de son appartement avant d’envoyer quelqu’un les ramasser, Meryem la concierge, et tous les voisins de palier, sans compter les animaux de compagnie. Le narrateur loge au n° 7, seul la plupart du temps, ne sachant s’accommoder d’aucune des femmes qu’il fréquente. <em>« Nous n’aimions pas les gens que nous ne connaissions pas personnellement,</em> dit-il de sa fantasque amie Ethel et de lui-même<em>, mais étripions ceux que nous connaissions de près. »</em></span></span></p> <p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p> <p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-bidi-font-size: 10.0pt;"><span style="font-family: Times New Roman;">Passant d’un appartement à l’autre, le récit dévoile les préoccupations des uns et des autres, leurs problèmes communs concernant les mauvaises odeurs dues aux ordures ou les insectes qui se mettent à pulluler même à l’intérieur de Bonbon Palace. C’est de la petite Su, la fille d’Hygiène Tijen, qui prend des cours d’anglais avec le narrateur, que viendra la révélation du secret le mieux gardé de Bonbon Palace.</span></span></p> <p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"> </p> <p class="MsoNormal" style="margin: 0cm 0cm 0pt;"><span style="font-size: 12pt; mso-bidi-font-size: 10.0pt;"><span style="font-family: Times New Roman;">Vous l’aurez deviné, les longueurs et les digressions ne manquent pas dans ce roman très bavard qui aurait gagné à être taillé davantage. Dans cet inventaire d’immeuble – voir Perec, <em><a target="_blank" href="http://fr.wikipedia.org/wiki/La_Vie_mode_d'emploi" title="Notice Wikipedia">La vie mode d’emploi</a></em>, mutatis mutandis – Shafak décrit surtout une étonnante galerie de personnages (caricaturés) et leur vie quotidienne évoquée par tous les registres de la sensation. Ceux qui goûtent l’humour par exagération s’amuseront à dérouler cette peinture par dérision des mœurs turques contemporaines.</span></span> <span style="font-family: "Times New Roman"; font-size: 12pt; mso-bidi-font-size: 10.0pt; mso-fareast-font-family: 'Times New Roman'; mso-ansi-language: FR; mso-fareast-language: FR; mso-bidi-language: AR-SA;">Personnellement, je préfère de loin la façon dont <a target="_blank" href="http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2008/11/17/l-istanbul-de-pamuk.html" title="L'Istanbul de Pamuk">Orhan Pamuk</a> raconte sa ville – un autre univers littéraire.</span></p>
Taniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlUne autre Istanbultag:textespretextes.blogspirit.com,2008-12-08:31093902008-12-08T08:30:00+01:002008-12-08T08:30:00+01:00 Cannelle, Pois chiches, Sucre, Noisettes grillées, Vanille… Ce sont les...
<p style="margin: 0cm 0cm 0pt;" class="MsoNormal"><span xml:lang="FR-BE" style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE; mso-bidi-font-size: 10.0pt;" lang="FR-BE"><span style="font-family: Times New Roman;">Cannelle, Pois chiches, Sucre, Noisettes grillées, Vanille… Ce sont les premiers titres d’une table des matières entièrement dédiée à ce qui se goûte. <em>La bâtarde d’Istanbul</em> (2007) d’Elif Shafak contient même la recette intégrale de <a target="_blank" href="http://ja6.free.fr/fichiers/f2813.htm" title="Ou dessert de Noé">l’asure</a>, un dessert très prisé en Turquie. <em>« Il fut, et ne fut pas, un temps où les créatures de Dieu abondaient comme le grain, et où trop parler était un péché… »</em> Ce préambule d’un conte turc est aussi celui d’un conte arménien. Tout comme la cuisine arménienne ressemble fort à la cuisine turque. La <a target="_blank" href="http://www.institutkurde.org/info/1158847702.html" title="Portrait et acquittement en 2006 pour l'accusation d'insulte à l'identité nationale">romancière</a> ne craint pas de jeter des ponts entre ces deux cultures à travers la rencontre de deux familles, les Kazanci d’Istanbul et les Tchakhmakhchian, Arméniens installés aux Etats-Unis depuis les années 1920.</span></span></p> <p style="margin: 0cm 0cm 0pt;" class="MsoNormal"> </p> <p style="margin: 0cm 0cm 0pt;" class="MsoNormal"><span xml:lang="FR-BE" style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE; mso-bidi-font-size: 10.0pt;" lang="FR-BE"><span style="font-family: Times New Roman;">Zeliha, en minijupe et talons hauts, un anneau à la narine, indifférente aux regards qu’on lui lance dans les rues d’Istanbul, est <em>« la benjamine d’une fratrie de quatre sœurs qui n’arrivaient jamais à se mettre d’accord et étaient toutes persuadées d’avoir toujours raison »</em>. A dix-neuf ans, elle se rend dans un centre médical pour avorter, mais l’anesthésie provoque chez elle un tel délire que le médecin préfère ne pas intervenir, au cas où elle changerait d’avis. Bien qu’irréligieuse, Zeliha y voit un signe divin et décide de garder l’enfant sans père. Quand elle l’annonce à la maison, sa mère s’offense : <em>« un bâtard ! »</em> Zeliha apporte le déshonneur aux Kazanci, famille de femmes où les hommes meurent avant de vieillir. C’est pourquoi leur frère Mustafa, <em>« inestimable joyau »,</em> a été envoyé à l’étranger, en Arizona, dans l’espoir de détourner de lui la malédiction.</span></span></p> <p style="margin: 0cm 0cm 0pt;" class="MsoNormal"> </p> <div style="text-align: center"><span xml:lang="FR-BE" style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE; mso-bidi-font-size: 10.0pt;" lang="FR-BE"><img name="media-45289" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/01/177505447.jpg" alt="Epices au Bazar d'Istanbul 3.jpg" style="border-width: 0; margin: 0.7em 0;" id="media-45289" /></span></div> <p style="margin: 0cm 0cm 0pt;" class="MsoNormal"> </p> <p style="margin: 0cm 0cm 0pt;" class="MsoNormal"><span xml:lang="FR-BE" style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE; mso-bidi-font-size: 10.0pt;" lang="FR-BE"><span style="font-family: Times New Roman;">Dans un supermarché américain, Rose, fraîchement divorcée, se délecte à l’avance des plats variés qu’elle va pouvoir préparer maintenant qu’elle est libérée de sa belle-famille <em>« qui vivait dans un monde où les gens portaient des noms imprononçables et gardaient des secrets profondément enfouis »</em>. Il lui faudrait «<em> un homme qui l’aimerait sincèrement et qui apprécierait sa cuisine. Parfaitement. Un amant sans bagage culturel encombrant, avec un nom simple à prononcer, et une famille de taille normale ; un amant tout neuf qui aimerait les pois chiches »</em>. Et voilà qu’apparaît au détour d’un rayon Mustafa Kazanci, un jeune homme mince à l’air studieux, qu’elle a déjà remarqué sur le campus universitaire où elle travaille à temps partiel dans un restaurant. Elle n’a le temps d’échanger que quelques mots avec lui, sa fille Armanoush l’attend dans la voiture sur le parking, au soleil. Mais Mustafa lui a dit d’où il vient, et Rose pressent déjà à quel point une relation avec un Stambouliote pourrait déstabiliser les Tchakhmakhchian qui détestent les Turcs. Armanoush grandira donc entre la culture arménienne de sa famille paternelle à San Francisco et la diversité multiculturelle dans laquelle sa mère l’élève en Arizona avec beaucoup d’amour et un beau-père turc.</span></span></p> <p style="margin: 0cm 0cm 0pt;" class="MsoNormal"> </p> <p style="margin: 0cm 0cm 0pt;" class="MsoNormal"><span xml:lang="FR-BE" style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE; mso-bidi-font-size: 10.0pt;" lang="FR-BE"><span style="font-family: Times New Roman;">A Istanbul, Asya Kazanci, la fille de Zeliha, appelle sa mère « tante » comme ses sœurs. Cette « bâtarde » désenchantée n’a qu’une passion, Johnny Cash, dont elle écoute les chansons en continu. Son point de chute préféré, le Café Kundera, se trouve dans la partie européenne de la ville. Pourquoi Kundera ? C’est l’un des sujets de conversation préférés des amis d’Asya, dont le Dessinateur Dipsomane qui est amoureux d’elle, bien que marié. Pour lui, ils vivent tous dans l’ennui : <em>« Nous sommes un groupe de citadins cultivés cernés de ploucs et de péquenauds. »</em> Asya apprécie l’<em>« indolence comateuse »</em> de cet endroit, <em>« l’antithèse de toute la ville. »</em></span></span></p> <p style="margin: 0cm 0cm 0pt;" class="MsoNormal"> </p> <p style="margin: 0cm 0cm 0pt;" class="MsoNormal"><span xml:lang="FR-BE" style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE; mso-bidi-font-size: 10.0pt;" lang="FR-BE"><span style="font-family: Times New Roman;">L’intrigue se noue quand Armanoush décide de se rendre en secret à Istanbul, au pays de ses racines, en faisant croire à sa mère qu’elle passe ses vacances chez son père et vice-versa. Dévoreuse de livres, ce que la famille paternelle lui conseille de cacher si elle veut se marier, elle ne peut parler librement qu’au Café Constantinopolis, un forum où des Américains d’origines diverses, mais tous descendants de Stambouliotes, échangent leurs opinions en ligne. Le projet d’« Ame en exil » (son pseudo) suscite des réactions en sens divers auprès des habitués qui ne voient pas tous cela d’un bon œil.</span></span></p> <p style="margin: 0cm 0cm 0pt;" class="MsoNormal"> </p> <p style="margin: 0cm 0cm 0pt;" class="MsoNormal"><span xml:lang="FR-BE" style="font-size: 12pt; mso-ansi-language: FR-BE; mso-bidi-font-size: 10.0pt;" lang="FR-BE"><span style="font-family: Times New Roman;">Le séjour d’Armanoush chez les Kazanci, la méfiance puis l’amitié entre Asya et elle, l’évocation du passé arménien, les sorcelleries de tante Banu, les plats et les obsessions des unes et des autres, ce ne sont que quelques facettes de ce <a target="_blank" href="http://download.saipm.com/pdf/lire/batard.pdf" title="Les premières pages à lire sur La Libre.be">roman</a> baroque, drôle et audacieux, préfacé par Amin Maalouf. <em>« A l’image de son pays,</em> dit celui-ci d’<a target="_blank" href="http://www.imprescriptible.fr/dossiers/mouradian/shafak" title="Entretien avec Elif Shafak sur « Imprescriptible »">Elif Shafak</a>, <em>elle s’interroge constamment sur la mémoire, la tradition, la religion, la nation, la modernité, la langue, l’identité. »</em></span></span></p>