Last posts on oedipe2024-03-29T08:16:47+01:00All Rights Reserved blogSpirithttps://starter.blogspirit.com/https://starter.blogspirit.com/fr/explore/posts/tag/oedipe/atom.xmlMarc Alpozzohttp://marcalpozzo.blogspirit.com/about.html« Conversation avec le torrent », journal d’Henry Bauchautag:marcalpozzo.blogspirit.com,2019-03-14:31278692019-03-14T04:58:00+01:002019-03-14T04:58:00+01:00 Le premier tome du journal de l’écrivain, psychanalyste, poète, essayiste...
<p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>Le premier tome du journal de l’écrivain, psychanalyste, poète, essayiste et dramaturge Henry Bauchau, Conversation avec le torrent, <em>Journal 1954-1959</em>, paraît aux éditions Actes Sud. Cette ultime trace de l’aventure intellectuelle et créative d’un grand artiste en devenir, ce laboratoire de l’écrivain est non seulement un grand moment d’émotion, mais aussi un fabuleux témoignage de son combat, de ses combats, de ses espoirs, et d’un long dialogue qu’il entretint avec lui-même. Cette recension est d'abord parue dans la revue en ligne <span style="color: #800000;"><em>Boojum</em></span>, et elle est désormais en accès libre dans l'<span style="color: #800000;"><em>Ouvroir</em></span>. </strong></span></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/02/181238445.jpg" id="media-1071825" alt="" /></p><p style="text-align: justify;"><br /><br /><img id="media-1056734" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/01/216866432.jpg" alt="bauchau2.jpg" /><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Il n’est pas rare qu’un écrivain tienne, aux côtés de la création de romans ou d’essais réguliers, un journal intime, qu’il publie de son vivant, ou que l’on publie après sa mort. Né à Malines le 22 janvier 1913, Henry Bauchau était membre de l’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique ; il vécut à Paris de 1975 à sa mort, survenue en 2012. Auteur prolifique ayant reçu de nombreux prix et distinctions, dont le Prix Max Jacob et le Grand Prix de littérature de la Société des gens de lettres, il a écrit de nombreux romans dont le fameux <em>Œdipe sur la route</em>, qui raconte la longue errance d’Œdipe, qui le conduira à Colone, lieu de sa « disparition » et de sa clairvoyance, roman racontant avec talent un voyage intérieur dans lequel un homme affronte les ténèbres qu’il porte en lui, jusqu’à atteindre la connaissance de soi.</span></p><p> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Ses premiers journaux intimes paraissent à partir de 1992, d’abord <em>Jour après jour</em> (1983-1989) aux éditions Les Eperonniers, puis le <em>Journal d’Antigone</em> (1989-1997) aux éditions Actes Sud, en 1999, enfin le <em>Passage de la Bonne-Graine</em> (1997-2001) toujours chez Actes Sud, en 2002. Depuis, la publication de son journal se succède à un rythme bi-annuel. Jusqu’au dernier, <em>Dernier journal</em> (2006-2012) paru chez Actes Sud en 2015, et celui-ci, <em>Conversation avec le torrent</em> (1954-1959) paru cette année, toujours chez le même éditeur.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Pour ceux qui connaissent Henry Bauchau, on retrouve cette sensibilité et cette intelligence, qui nourrissent ses romans et ses essais, comme <em>L’Écriture à l’écoute</em> publié chez Actes Sud en 2000, ou <em>Œdipe sur la route, </em>paru en 1990, chez le même éditeur. Pour les autres, vous retrouverez cette voix, ce timbre qui vous semblera désormais si familier, cette sagesse mêlée à une forme d’héroïsme, celui de continuer le combat avec l’ennemi intime, celui qui se loge tout au fond de chacun, et avec lequel on cherche à en découdre chaque jour un peu.</span></p><p> </p><blockquote><p><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><em>«</em> La voix joyeuse et courageuse de L. ce matin au téléphone. Le courage c’est pour une bonne part la gaieté. Vérité dont je devrais m’imprégner plus à fond et que je déserte constamment. »</span></p></blockquote><p> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Ce journal, tenu sur cinq années, de 1954 à 1959, est commencé le 6 juin 1954, par une question : <em>« – Êtes-vous plus en paix depuis votre mariage ? »</em> et s’achève le 20 décembre 1959, par une autre question, tout aussi saugrenue finalement : <em>« Est-ce l’aisance, la vitesse, ou le rapport intérieur de notre être à ce qui rappelle sans doute le plus les sensations de vol chez les oiseaux ? »</em> Deux questions, pour cet écrivain en devenir, dont les débuts marqués par de nombreuses influences, <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2009/12/13/ruines-circulaires-2-duras-et-sa-solitude.html" target="_blank" rel="noopener">Marguerite Duras</a></span>, Herman Hesse, <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2008/01/06/etranger-a-soi-meme-etranger-au-monde-une-lecture-de-l-etran.html" target="_blank" rel="noopener">Albert Camus</a></span> entre autres, revenant sans cesse à la question, obsédé par des thèmes chers comme le marxisme, la nature, le rêve, et sûrement le bonheur, récurrent dans ses notes prises presque au jour le jour.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Mais, évidemment, ce qui est particulièrement intéressant dans ce texte, bien sûr, c’est de voir l’artiste au travail ; le jeune artiste nous livrer ses doutes, ses premiers accomplissements. Car, l’écriture est ce qui obsède Henry Bauchau. Elle l’habite sans cesse. Il vit pour elle. L’écriture, on le comprend vite, c’est le sens même de sa vie, de son combat, de son parcours intérieur.</span></p><p> </p><blockquote><p><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><em>«</em> Il me semble sentir l’approche d’une œuvre nouvelle et importante, mais laquelle. Est-ce un roman au départ de l’analyse, est-ce une nouvelle pièce de théâtre ? Le personnage d’Alexandre et celui de Jules César qui reviennent me hanter. »</span></p></blockquote><p> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Conversation avec le torrent, c’est donc ce torrent intérieur, la création, la littérature, la foi, la poésie, ou encore l’engagement politique.<br /><br /></span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1071826" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/00/1161814314.jpg" alt="henry bauchau" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Henry Bauchau</span></p><p style="text-align: center;"> </p><p><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Henry Bauchau, <em>Conversation avec le torrent, Journal 1954-1959</em>, Actes sud, janvier 2018.</span></strong></p><p><span style="color: #800000;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">En couverture : Henry Bauchau en 1991</span></strong></span></p><p> </p><p style="text-align: center;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><br /><iframe width="469" height="270" frameborder="0" src="https://www.dailymotion.com/embed/video/xgqc3q" allowfullscreen="allowfullscreen" allow="autoplay"></iframe></span></strong></p><p style="text-align: center;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Henry Bauchau</span></strong></p>
hommelibrehttp://leshommeslibres.blogspirit.com/about.htmlL’Oedipe de Voltairetag:leshommeslibres.blogspirit.com,2013-07-06:32987522013-07-06T19:25:00+02:002013-07-06T19:25:00+02:00 Oedipe est une tragédie classique où le héros épouse sa mère sans le...
<p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;"><a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/00/00/1990595169.jpg" target="_blank"><img id="media-146611" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/02/01/1082688672.jpg" alt="théâtre,voltaire,diderot,blampain,oedipe,religieuse" width="301" height="200" /></a>Oedipe est une tragédie classique où le héros épouse sa mère sans le savoir. Elle l’ignore aussi. Quand elle l’apprend elle se pend. Oedipe découvre également qu’il a tué son propre père. Il se crève alors les yeux pour ne plus voir l’étendue de ses crimes.</span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">Ce mythe n’est pas très gai. C’est la tragédie: des personnages mythologiques sont confrontés à des situations hors du commun et y laissent souvent leur vie. Leurs actes touchent à la démesure des sentiments humains, et c’est à la fois les fondements de la morale et cette démesure des sentiments qui est explorée, démesure dont la finalité est l’ancrage en soi de la conscience d’une faute et l’appel à une correction de ses actes. Voltaire prend cependant l’angle de la contestation des dieux et de leur barbarie qui met les personnages dans cette situation, plutôt que de la condamnation de ceux-ci.</span><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;"><a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/02/02/3397341952.jpg" target="_blank"><img id="media-146612" style="float: right; margin: 0.2em 0 1.4em 0.7em;" title="" src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/00/01/781433719.jpg" alt="théâtre,voltaire,diderot,blampain,oedipe,religieuse" width="251" height="377" /></a></span><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">La mythologie a une fonction pédagogique éminente. Les personnages qu’elle met en scène sont à l’image des humains que nous sommes, mais dans une amplification qui touche à l’essentiel derrière les masques et justifications. Les personnages doivent aller à la faute pour comprendre ce qu’est la limite sociale acceptable des comportements humains. </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">Le nom d’Oedipe a été donné à la notion de complexe d’Oedipe pour exprimer l’amour du petit garçon envers sa mère et son désir de tuer symboliquement le père vu comme un rival. A noter qu’en psychologie cette notion ne fait pas l’unanimité.</span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">La tragédie est aussi pour les acteurs l’opportunité de dépasser leur condition humaine pour entrer virtuellement dans cette démesure.</span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">Le travail de Benoît Blampain est précis tant dans la compréhension de l’intention du texte que dans le jeu physique. Il dirige les comédiens de manière à ce que le personnage incarné soit «physiqué», c’est-à-dire ancré dans le corps. Chaque cours (un week-end par mois) commence par une mise en condition physique où l’on prépare son corps à la créativité. </span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;"><a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/02/00/3639011083.jpg" target="_blank"><img id="media-146613" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/02/01/741096092.jpg" alt="théâtre,voltaire,diderot,blampain,oedipe,religieuse" width="249" height="373" /></a>J’ai participé à ce groupe cette année. Nous avons travaillé des extraits de La Religieuse de Diderot, que nous avons ensuite joués à trois reprises dans le cadre de la fête à Voltaire à Ferney. Les photos sont tirées de ce spectacle. Elles ont été prises par Eric Dahlen, que je remercie ici.</span><br /><br /><a href="http://www.ericdalhen.com" target="_blank"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">www.ericdalhen.com</span></a><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">La saison reprendra en octobre. Les personnes souhaitant se joindre à ce groupe de théâtre peuvent contacter Benoît Blampain pour plus d’information, par courriel à l’adresse suivante:</span><br /><br /><a href="mailto:b.blampain@le-mesureur.com"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">b.blampain@le-mesureur.com</span></a><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">et visiter le site de sa compagnie:</span><br /><br /><a href="http://www.le-mesureur.com" target="_blank"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">www.le-mesureur.com</span></a><br /><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">Le joli nom de sa compagnie vient du poète Maurice Maeterlinck, dramaturge et écrivain belge, prix Nobel de littérature. Maeterlinck signifie en français Le Mesureur, L’Arpenteur des âmes.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">Envie de jouer du Voltaire? Un groupe de théâtre amateur animé par le comédien et metteur en scène belge Benoît Blampain va probablement travailler d’octobre à juin prochain sur l’Oedipe du célèbre auteur français. </span></p>
Taniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlLa vaguetag:textespretextes.blogspirit.com,2012-10-01:31101642012-10-01T08:30:00+02:002012-10-01T08:30:00+02:00 Lire & relire Bauchau / 1 Camille Claudel, La...
<p class="MsoNormal" style="text-align: left; padding-left: 300px;"><strong> <span style="font-family: 'comic sans ms', sans-serif; font-size: medium; line-height: 115%; text-align: right;">Lire & relire Bauchau / 1 </span></strong></p><p class="MsoNormal"><a style="text-align: center;" href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/01/4231359911.jpg" target="_blank"><img id="media-132886" style="margin: 0.7em auto; display: block;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/01/01/4277108126.jpg" alt="bauchau,oedipe sur la route,roman,littérature française,belgique,sculpture,antigone,oedipe,clios,vague,culture" /></a></p><p style="text-align: center;"><a title="Source de la photo" href="http://www.amis-arts.com/sulpture/camille_claudel/2/la_vague_claudel.htm" target="_blank"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: xx-small;">Camille Claudel, La Vague </span></a></p><p class="MsoNormal"><span style="font-size: medium; line-height: 115%; font-family: Tahoma, sans-serif;">« Le lendemain, Clios travaille aux raccords entre les parties de la <a title="Hokusai sur papier (T&P)" href="http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2008/08/06/une-expo-sur-papier.html" target="_blank">vague</a> qui s’élèvent et celles qui déferlent. Œdipe sculpte le corps du troisième rameur. Antigone est frappée par la mesure, la légèreté de ses gestes. Rien de comparable à la violence, à la fureur des coups de celui qui a contraint la vague à plier. Elle voit que des cheveux gris commencent à parsemer sa belle chevelure fauve. Il tourne vers elle son visage aux yeux bandés et sur ses lèvres apparaît le sourire qui lui gagnait autrefois tous les cœurs. Elle dit : « Je vous retarde. » Il répond : « Tu as le temps. » Elle sent qu’il lui ouvre ainsi, malgré l’automne qui est là et l’hiver qui approche, un immense espace de temps. Qu’il lui signifie qu’elle ne doit surtout pas se hâter. Elle s’installe en face des contours qu’elle a tracés pour le pilote, elle est effrayée un instant par l’ampleur de ce qui reste à faire. Puisqu’il lui a donné le temps, elle contemple la pierre, elle se recueille en elle, elle y appuie son visage, la parcourt de ses mains. Une masse de calme est sous son front, elle s’en inspire et la fait très doucement descendre dans tout son corps. Elle commence. Au milieu du jour, le pied, la cheville et la jambe sont esquissés. </span><span style="font-family: Tahoma, sans-serif; font-size: medium; line-height: 18px;">»</span></p><p class="MsoNormal"><span style="font-size: 14.0pt; line-height: 115%; font-family: 'Tahoma','sans-serif';"><span style="font-size: medium;"><a title="« Bauchau, hors d’âge et hors les murs » par Monique Verdussen (LLB,22/09/2012)" href="http://www.lalibre.be/archives/divers/article/762237/bauchau-hors-d-age-et-hors-les-murs.html" target="_blank">Henry Bauchau</a>, <em>Œdipe sur la route</em> (Actes Sud, 1990)</span></span></p>
Marc Alpozzohttp://marcalpozzo.blogspirit.com/about.htmlDon Juan ou le rêve féminintag:marcalpozzo.blogspirit.com,2012-01-23:24540952012-01-23T09:40:00+01:002012-01-23T09:40:00+01:00 Mais qu’est-ce qui fait courir Don Juan ? On n’a cessé de causer,...
<p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino; text-align: justify;">Mais qu’est-ce qui fait courir Don Juan ? On n’a cessé de causer, d’écrire sur cette figure mythique de la séduction masculine. Plus d’un millier d’adaptations, et la psychanalyse qui s’en empare pour créer son concept de don-juanisme. On le traite bien, on le traite mal. On l’aime, on le déteste. On le compare très frauduleusement à un épicurien, mais parce qu’on a si mal compris <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2005/11/30/pour-une-philosophie-du-plaisir-note-sur-epicure.html" target="_blank" rel="noopener">Épicure</a></span>. Et l’on a si mal compris Don Juan par la même occasion. Cette longue étude était d'abord une allocution que j'ai faite dans un groupe lacanien. Je l'ai transformée en article, pour le numéro 19, d<span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;">es<em> </em></span><span style="color: #888888; font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;"><span style="color: #000000;"><span style="color: #800000;"><em>Carnets de la philosophie</em></span></span></span><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;">, de janvier 2012. Elle est désormais en accès libre dans l'</span><span style="color: #888888; font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;"><span style="color: #000000;"><span style="color: #800000;">Ouvroir</span>.</span></span></span></strong></span></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/02/303891247.jpg" id="media-1071002" alt="" /></p><p style="text-align: center;"> </p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="padding-left: 40px; text-align: right;"><span style="font-size: 10pt; font-family: georgia, palatino;">« Ô Ciel ! que sens-je ? Un feu invisible me brûle, je n’en puis plus, et tout mon corps devient un brasier ardent. Ah ! »Molière, <em style="mso-bidi-font-style: normal;">Don Juan</em>, Acte V, Scène 6.</span></p><p style="padding-left: 40px; text-align: right;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;"> </span></p><p class="MsoNormalCxSpMiddle" style="margin: 1em 0px 1em 262.25pt; text-align: justify; line-height: normal; mso-add-space: auto;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: georgia, palatino;"> </span><span style="font-family: georgia, palatino;">Mais alors que sait-on ? Veut-on seulement savoir ? Paul Valéry disait cette chose très juste : « Rien de plus littéraire que d’omettre l’essentiel. » On a tout dit à propos de la figure de Don Juan : qu’il était libertin, athée, déceptif pour toutes les femmes qu’il avait séduites, impuissant, jouisseur impénitent, homosexuel, immoral, égoïste, pervers. Mais on omet l’essentiel ! Car c’est bien de l’essentiel qu’il s’agit ! On ne veut pas savoir. On ne veut surtout pas approfondir à propos du personnage. Sûrement, ce serait trop dérangeant. Nous sommes faillibles ! Nous nous sommes bâti cette carapace contre le monde, contre nous-mêmes, depuis si longtemps ! Le labeur et la ténacité destinés à une seule fin : fuir l’essentiel. Ça n’est pas maintenant que nous allons nous autoriser à nous percer à jour ! Et puis c’est aussi parce que Don Juan est notre parfait bouc émissaire. Il canalise toutes notre projections, toutes nos frustrations, tous nos fantasmes, toutes nos inhibitions. Il est cette économie de moyens pour épurer la violence et l’angoisse en chacun. Il est cette figure mythique dans laquelle on s’autorise à se perdre… Il est l’éternel incompris !<br /><br /></span></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Incompris d’abord de son propre père – dois-je rappeler cette tirade de Don Louis dans la pièce de Molière : « Mais sache, fils indigne, que la tendresse paternelle est poussée à bout par tes actions, que je saurai, plus tôt que tu ne le penses, mettre une borne à tes dérèglements, prévenir sur toi le courroux du Ciel et laver par ta punition la honte de t’avoir fait naître », incompris de son valet Sganarelle – qui cherche systématiquement à lui faire la leçon ! Incompris de la plupart des lecteurs ! Et c’est en ce premier sens que l’on peut parler de héros tragique. Don Juan peine à se mettre à jour ! Don Juan peine à naître ! Don Juan n’est pas né. Don Juan erre, à l’abandon, cherchant refuge, et des yeux pour le voir. Don Juan a perdu le sens. Et le lieu. Tout est là un problème de <em style="mso-bidi-font-style: normal;">topos</em>. Son existence n’a ni direction ni but. Quelle intelligibilité peut-il donc en tirer ? À quoi pourrait-il raccrocher le sens de sa vie ? Il ne cesse de courir. Ou plutôt de fuir. Et de se fuir ! La fuite est son éthique. Il fuit les femmes qu’il a séduites et délaissées. Il fuit les hommes qui sont engagés pour lui faire la peau. Il fuit les siens lorsqu’ils veulent le ramener à la saine raison. Il fuit Dieu.</span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1070996" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/01/4211138504.jpg" alt="don juan,jacques lacan,sigmund freud,dieu,zarathoustra,sganarelle,molière,casanova" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;"><em>Aventures de Don Juan,</em> Hall carte pour 1948,</span><br /><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">film Warner Bros, avec Eroll Flynn et Viveca Lindfors<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Aussi, je pose cette légitime question – quitte à choquer : Don Juan serait-il l’homme qui n’assume pas ? Et je vais clairement y répondre.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Premièrement, son supposé athéisme. Il faut en finir avec cette niaiserie qui se dit partout. Don Juan croit en Dieu. C’est clair ! Il s’agite trop, le défie trop, le bafoue trop pour que ça en soit autrement. Mais voilà ! il n’assume pas cette croyance. Ou plutôt, devrais-je dire, il a clairement perdu Dieu. Il ne parvient plus à le voir – peut-être parce qu’il ne <em style="mso-bidi-font-style: normal;">veut </em>pas le voir. Il y a cette volonté tragique de détourner le regard, de ne pas assumer sa condition chez Don Juan. </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Secundo, Don Juan est un homme du savoir-faire avec le corps, et un homme de la raison. Il traite les corps comme des objets, en artisan ou en technicien, pour ne pas avoir à faire face à la condition humaine, – car dans la relation de sujet à objet, on perd nécessairement le sens de l’humain ; on déshumanise l’autre ; on occulte ce qui est le propre de son essence, et donc par conséquent, ce que nous sommes en propre : on masque son infinie fragilité. Autrement dit, l’inconnu en lui et en nous. On traitant les corps comme un artisan qui travaille un objet quelconque, Don Juan évite soigneusement d’avoir à faire face à sa condition de mortel ; il évite d’affronter sa condition d’être fini, d’homme vivant une vie sans rime ni raison, contée par un fou. En se réfugiant dans la pensée rationnelle, cartésienne par excellence, (« Je crois que deux et deux font quatre, Sganarelle, et que quatre et quatre font huit »), la rationalité chère aux philosophes et aux scientifiques devient son nouveau sacré. Tout sera désormais explicable, connaissable par les seules vues de la raison. Par un merveilleux miracle ! La vie ne sera bientôt plus un problème, et la mort non plus. Dieu est enfin ramené à la connaissance de l’entendement, et les flammes de l’enfer seront bientôt éteintes par la force de l’arithmétique.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;"><span style="mso-spacerun: yes;"> </span>Pour autant Don Juan ne trompe personne. Il ne parvient même pas à se tromper lui-même, non plus. Car ici la raison se fait simulacre. Elle masque, derrière les apparences d’un <em style="mso-bidi-font-style: normal;">logos</em> salvateur et tout-puissant, une réalité effrayante, parce que désespérément impénétrable, livrée au mystère éternel.<br /></span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1071005" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/00/1094005686.jpeg" alt="oedipe,don quichotte,zarathoustra,don juan,jacques lacan,sigmund freud,dieu,sganarelle,molière,casanova" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;"><em>Don Juan</em>, film de Marcel Bluwal,</span><br /><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">avec Michel Piccoli, Claude Brasseur et Anouk Ferjac.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Don Juan est ainsi un héros tragique. Il est ce malheureux héros de notre monde moderne. Alors que Don Quichotte est d’un autre temps, ne comprenant désespérément pas le nouveau monde naissant, et prenant les moulins à vent (simulacre nécessaire à son aveuglement) pour des géants, Don Juan est bien trop conscient. Et il en crève ! Il voudrait peut-être, comme Œdipe, s’ôter la vue. Il voudrait peut-être n’avoir pas à affronter la cruelle réalité… Il voudrait sûrement éviter de voir qu’il a perdu l’horizon, par exemple. Et les arrières-mondes. Plus de « monde vrai ». Abolies, les apparences, comme disait le sage Zarathoustra. Il ne peut désormais plus s’en tenir aux illusions. Et il refuse de le voir, tout en voulant voir. Car il cherche. Il est en quête. Et ce qu’il cherche, c’est Dieu lui-même. Dans le même temps, il se refuse clairement à le trouver. Sentez la peur qui l’étreint lorsque la statue du Commandeur l’appelle, une première fois. La seconde fois, on le voit se réfugier derrière son valet de Sganarelle – l’exemple typique de l’homme superstitieux – lorsque la statue lui commande de se joindre à elle pour souper. Il lui faut un guide, dit-il, comme pour se justifier… Sganarelle a beau déballer ses niaiseries morales, ses codes de conduite déontologiques agaçants, il incarne aux yeux de Don Juan, qui ne veut rien entendre de ce que Dieu pourrait être, cette seule lumière terrestre, – contre l’absurdité d’un monde sans Dieu, ou pis, d’un monde où Dieu ne saurait le comprendre ! Il ne veut pas accepter que terre et Ciel se seraient soudain rejoints pour ne former désormais qu’une unité. Il n’accepte pas la bonne nouvelle. Il ne veut pas entendre qu’il n’a plus besoin de flambeau ; que la lumière du Ciel est, ici, dans l’immanence de notre monde sensible. Peut-être même à l’intérieur de lui.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;"> Don Juan est donc le héros tragique d’un monde sans commencement ni fin, et dont la transcendance est devenue difficile. Il est l’homme absurde par excellence. Enfermé dans un rapport au monde purement matérialiste… Mais lorsque je dis matérialiste, j’entends surtout matériel. Le monde sensible renferme désormais tous ses secrets. Rien au-delà ! (Le vrai matérialiste, accroché à l’utilité et au sens des choses utiles, c’est Sganarelle, pleurant ses gages à la fin de la pièce de Molière, – mais là, c’est un autre problème !) Le matérialisme de Don Juan est un matérialisme de circonstance. Un refuge. Et un guet-apens à la fois ! Voyez ce cynisme auquel il se livre lorsqu’il convainc son père qu’il a désormais changé. Voyez ce déni de s’affronter, et d’affronter une réalité qui l’effraie. Voyez cette fuite qui le conduit, là encore, comme Œdipe, à réaliser son funeste destin, en s’évertuant à l’éviter.</span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1071000" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/02/1950362216.jpg" alt="oedipe, don quichotte, zarathoustra, don juan,jacques lacan,sigmund freud,dieu,zarathoustra,sganarelle,molière,casanova" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;"><em>Dom Juan</em> de Molière<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Il tient tête à sa destinée. Il tient tête à son père, à Sganarelle. Il tient tête à Dieu. Don Juan est cet éternel rebelle, réfractaire aux lois morales, civiles ; prêt à mourir plutôt qu’à se plier. Il est cet éternel enfant, qui refuse de grandir, de s’assumer, et d’assumer son devenir.<span style="mso-spacerun: yes;"> </span><span style="mso-spacerun: yes;"> </span></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Il est un héros tragique pétri du désir tragique (si cher au philosophe Clément Rosset). Toute sa vie est fondée sur le désir sans fin, sans finalité, sans intelligibilité. Il désire, et il met toutes ses forces, tout son talent, tout son courage à réaliser tous ses désirs ; mais il ne sait pas exactement ce qu’il désire. En réalité, si nous suivons attentivement son désir, nous parvenons à comprendre : il désire Dieu.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;"> </span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1127169" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/01/4029229660.png" alt="don juan,jacques lacan,sigmund freud,dieu,zarathoustra,sganarelle,molière,casanova,oedipe,don quichotte" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Un extrait de ce article paru dans <em>Les<br />Carnets de la philosophie</em>, n°19, de jan. 2012</span><br /><br /></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Il faut donc cesser de considérer Don Juan comme un jouisseur. De quoi croit-on qu’il jouit ? Du corps des autres ? De leur malheur ? De rapports sexuels – qu’il n’a d’ailleurs pas ! De l’échange des corps – mais il refuse tout échange ! De l’amour – il ne s’autorise pas à tomber amoureux ! De la satisfaction de son désir – toujours déçu au final, souvenons-nous donc de la leçon de Schopenhauer à propos des désirs, elle fonctionne merveilleusement ici ! Non ! Don Juan ne jouit de rien. Aussitôt, a-t-il satisfait un désir, qu’il s’en fixe un autre. Il ne consomme pas le court plaisir de la victoire. On a voulu en faire un athée. C’est faux ! Un hédoniste. Faux aussi ! Un immoral. Tout aussi faux ! Un libertin. Rien de plus stupide !</span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1071001" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/01/1822013943.jpg" alt="oedipe, don quichotte, zarathoustra, don juan,jacques lacan,sigmund freud,dieu,zarathoustra,sganarelle,molière,casanova" /> <br /><em><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Dom Juan ou le Festin de pierre,</span></em><br /><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">photographie : Tristan Jeanne-Vallès</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Parce que Don Juan a perdu le <em style="mso-bidi-font-style: normal;">topos</em>, donc tout lieu d’origine, les femmes lui serviront de centre, de médiation ; à la fois médiation de son désir, mais plus encore de sa recherche. Regardez-le donc courir, s’évertuer à justifier cette fuite, qu’il considère comme une vocation pour l’amour et le désir : « Pour moi, la beauté me ravit partout où je la trouve, […] et je cède facilement à cette douce violence dont elle nous entraîne. J’ai beau être engagé, l’amour que j’ai pour une belle n’engage point mon âme à faire injustice aux autres ; […] Il n’y a rien qui puisse arrêter l’impétuosité de mes désirs : je me sens un cœur à aimer toute la terre ; et comme Alexandre, je souhaiterais qu’il y eût d’autres mondes, pour y pouvoir étendre mes conquêtes amoureuses. » Certes, il accepte de se définir comme un « conquérant », une sorte d’Alexandre, beau et fort ; un homme amoureux. On a d’ailleurs trop pris pour habitude de distinguer Casanova et Don Juan, parce que le premier serait un homme amoureux tandis que le second serait un homme désirant ; un pur séducteur, sans lendemains. Le premier aime l’amour, le second désire désirer. Il faut désormais dissiper cette erreur fondamentale à propos de Don Juan, car je crois que c’est manquer un élément essentiel du personnage, que de le réduire à la seule problématique des désirs. Nous lecteurs, mettons-nous ça en tête, Don Juan veut Dieu. Dans sa conquête aveugle, il est mené, inconsciemment, par l’image d’un père fantasmé, imaginaire, qui pourrait jouir de toutes les femmes. Comme un enfant, il est persuadé qu’il en existe au moins un en ce monde, et contre la norme, cette exception, c’est Dieu lui-même. Il ne s’inscrit pas dans un schéma œdipien, car il ne veut pas tuer le père. Il ne cherche pas non plus à remplacer Dieu. Le mythe de Don Juan est un mythe métaphysique et psychanalytique à la fois. A travers la conquête féminine, Don Juan, amoureux de Dieu, désire le faire jouir. Ce ne sont pas les femmes vers lesquelles il tend, mais vers Dieu lui-même. Cette jouissance de Dieu, Don Juan la vise à travers chaque femme qu’il séduit, qu’il trompe pour la rendre amoureuse, et qu’il manque, dans cette impasse tragique du désir. La mascarade à laquelle il se livre n’est autre qu’une mascarade à l’intention de Dieu, ce père universel, qu’il voudrait reconquérir, car il croit l’avoir définitivement perdu.<span style="mso-spacerun: yes;"> </span></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;"><br />De fait, trop d’interprétations de Don Juan s’en sont tenues à l’affirmation péremptoire d’une Charlotte (qui met Don Juan en réalité au défi de la séduire), « vous, dit-elle, qui ne songez qu’à abuser les filles », ce qui a réduit le mythe de Don Juan, à celui d’un bonimenteur, manipulateur, pervers tout à sa jouissance, quitte à décevoir, ou créer de l’angoisse chez ses victimes. Mais Don Juan n’a rien d’un prédateur social. Don Juan n’a rien d’un manipulateur ou d’un pervers, tel qu’on l’a entendu jusqu’ici. Cette interprétation idéologique, ou féministe, doit être abandonnée.</span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1071003" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/00/3383040807.jpg" alt="oedipe,don quichotte,zarathoustra,don juan,jacques lacan,sigmund freud,dieu,sganarelle,molière,casanova" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;"><em>Don Juan</em>, DeMarco (1995)<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Tout comme son homosexualité supposée, son impuissance sexuelle, son caractère hédoniste qui ne tiennent que du discours parfaitement stéréotypé. Non, rien de tout ça ne fait courir Don Juan.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino;"> Celui qui cherche « à ménager un père dont (il) a besoin », qui accepte le « vice à la mode », porter des masques pour « abuser le monde », cet homme de l’imposture, du simulacre, qui semble abuser t
Marc Alpozzohttp://marcalpozzo.blogspirit.com/about.htmlLa pornographie confessionnelle (Peeping Tom)tag:marcalpozzo.blogspirit.com,2011-12-10:24229672011-12-10T10:10:00+01:002011-12-10T10:10:00+01:00 Notre époque est transparente ! Du moins le dit-on. Exit le droit de...
<p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino; text-align: justify; text-indent: 9.46666622161865px;">Notre époque est transparente ! Du moins le dit-on. Exit le droit de mentir. Exit les jardins secrets de tout acabit. Exit les charlatans, les faussaires, les imposteurs. Au fond de notre caverne, les mensonges des insensés, les fraudes et mascarades des imposteurs doivent être dénoncées. Nous sommes entrés dans l’ère du </span>mentir-vrai<span style="font-family: georgia, palatino; text-align: justify; text-indent: 9.46666622161865px;">. Bien sûr, il ne s’agirait pas de convoquer le philosophe qui viendrait irrémédiablement désenchanter le peu qu’il nous reste, mais de formuler une demande inique : celle de la confession. Cette recension est parue dans le <span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;"><em><span style="color: #800000;">Magazine des Livres</span></em>, </span><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">numéro 33, de Novembre-Décembre 2011. La voici désormais en accès libre dans l'<span style="color: #800000;"><em>Ouvroir</em></span>.</span></span></strong></span></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/01/2171082014.jpg" id="media-872201" alt="" /></p><p style="text-align: center;"><span style="text-align: justify; text-indent: 7.1pt;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;"><img id="media-1071006" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/01/3923806531.jpg" alt="alessandro mercuri,lady godiva,jean-jacques rousseau,oedipe,sophocle" />Hier, on ouvrait la part sombre de notre âme au prêtre dans l’isoloir, ou la part d’ombre de notre inconscient sur le divan du psychanalyste. Parfois quelques journaux intimes arrivaient à passer la frontière de la décence morale, et, livrés au grand public, étalaient des pièces vécues, rapportées par le style de l’artiste. Aujourd’hui, la pornographie confessionnelle sévit en tout lieu, sous toute forme. On somme l’individu de dire la vérité et toute la vérité. Sur les pages personnelles de Facebook on dissèque les vies étalées dans ce qu’elles ont de plus monotone, vide ou sordide. Les déplacements de chacun peuvent être annoncés ou dénoncés par tous. On sait où vous êtes, quand et avec quel compère ou comparse. Le <em style="mso-bidi-font-style: normal;">dégoulis</em> confessionnel se répand dans nos postes de télévision ; télé-réalité, confessions d’hommes publics, viols de l’intimité privée. Nous devons savoir ! Aux apparences du vrai d’hier se substitut le mensonge-vérité d’aujourd’hui.<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Prétendrait-on vouloir, à l’instar de Rousseau au dix-huitième siècle, montrer à nos semblables un homme dans toute la vérité de la nature ? Croit-on encore au « Connais-toi toi-même » ? Ou sommes-nous tout simplement redescendus des sphères nietzschéennes situées au-delà du bien et du mal pour traquer, dénoncer, moquer, fouler au pied notre frère notre voisin ?<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Doué de bonne conscience, le roseau-pensant serait en train de devenir trop bien-pensant. Et la vérité, prétendument dénuée de toute ambiguïté, deviendrait un simulacre de vérité. Autant dire un mensonge légal.<br /><br /></span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1127679" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/01/1288634777.jpeg" alt="alessandro mercuri,lady godiva,jean-jacques rousseau,oedipe,sophocle,peeping tom" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Cet article dans le <em>Magazine des livres</em></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Lorsqu’Œdipe, dans la pièce de Sophocle, apprend la vérité sur ce destin tragique, qu’en cherchant à fuir il a lui-même provoqué, ce dernier choisit de se crever les yeux. Refuser la vérité. Ne plus la voir. Ou n’être point apte à l’affronter.<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>« Quelle dose de vérité pouvons-nous supporter<span style="mso-fareast-font-family: 'Times New Roman'; mso-fareast-language: FR;"> ? » se questionne Nietzsche. Une bien belle interrogation métaphysique posée par un philosophe qui accusait la connaissance de n’être qu’une grande fable. On pourrait se demander sans trop de mal si nous sommes bien prêts à affronter toutes les vérités ? Sommes-nous armés ? Subjective et arbitraire, toute vérité n’est que pacotille de vérité. Toute vérité n’est qu’interprétation d’une interprétation.<br /></span></span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: center;"><img id="media-1071007" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/00/1720422799.jpg" alt="alessandro mercuri,lady godiva,jean-jacques rousseau,oedipe,sophocle" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;"><em>Oedipe-roi</em>, Pier Paolo Pasolini (1967</span>)</p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;"><span style="mso-fareast-font-family: 'Times New Roman'; mso-fareast-language: FR;"> </span></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">An 1000. Nous sommes le petit matin. Sur son beau cheval blanc, se promène Lady Godiva. Elle est entièrement nue. On imagine aisément la scène. Le ravissement et la beauté de celle-ci aussi irréelle qu’onirique. Non loin, un homme observe cette fiction. Il est posté sous un porche. Il regarde. Il voit. Cet individu, prénommé Tom, ne perd rien de ce qui se déroule devant ses yeux, et qui ne durera qu’une minute ou deux. Mais c’est suffisant pour le faire arrêter et torturer. On finira par brûler les paupières à Tom le voyeur. Appelons-le Peeping Tom, puisque c’est ainsi que le nomme Alessandro Mercuri dans son nouvel essai (<em style="mso-bidi-font-style: normal;">Peeping Tom</em>, Léo Scheer, 2011). Pourquoi ont-ils brûlé les yeux de Tom ? Pourquoi lui avoir consumé les paupières et les pupilles ?<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">J’ose avancer cette question : ne serait-ce pas symbolique, tout simplement ? Car la vérité consume. Le désir de savoir est un désir qui nous faire prendre le risque de nous abîmer, de nous carboniser, de nous détruire par le feu trop intense du soleil de la vérité – que Platon assimilait au Bien. Dans le très bel essai d’<span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/alessandro+mercuri" target="_blank" rel="noopener">Alessandro Mercuri</a></span>, si l’on brûle les yeux de Tom, c’est parce qu’il y a des vérités qui ne doivent pas être vues. Entre rêve et réalité faite d’apparences, lumière et ténèbres, toute l’histoire de la culture Occidentale, qu’elle soit philosophique, littéraire, cinématographique, religieuse, scientifique, politique, est celle d’une humanité qui, ne pouvant faire face à une réalité donnée, s’est évertuée à la transformer, la transcender, la réinventer par le matériau du rêve, de la fiction, et des grandes cathédrales idéologiques, philosophiques et religieuses.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt;"> </span></p><p class="MsoNormalCxSpMiddle" style="margin: 1em 0px; text-align: justify; line-height: normal; text-indent: 7.1pt;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;"><span style="mso-fareast-font-family: 'Times New Roman'; mso-fareast-language: FR;">Car soyons clairs, la vérité est en mouvement, elle n’existe donc pas. Et, serions-nous bien avancés si nous parvenions à la vérité absolue, donc à l’étaler aux yeux de tous ? Non ! Voilà sûrement par où il aurait fallu commencer…<span style="mso-spacerun: yes;"> </span></span></span></p><p class="MsoNormalCxSpMiddle" style="margin: 1em 0px; text-align: justify; line-height: normal; text-indent: 7.1pt;"> </p><p style="text-align: center;"><img id="media-1071008" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/00/3844581817.jpg" alt="alessandro mercuri,lady godiva,jean-jacques rousseau,oedipe,sophocle" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Alessandro Mercuri</span></p><p class="MsoNormalCxSpMiddle" style="margin: 1em 0px; text-align: justify; line-height: normal; text-indent: 7.1pt;"><span style="font-size: 12pt;"> </span></p><p class="MsoNormalCxSpMiddle" style="margin: 1em 0px; text-align: right; line-height: normal; text-indent: 7.1pt;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;"><span style="mso-fareast-font-family: 'Times New Roman'; mso-fareast-language: FR;"><span style="mso-spacerun: yes;"><img id="media-1127172" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/02/2264850432.jpeg" alt="alessandro mercuri,lady godiva,jean-jacques rousseau,oedipe,sophocle,peeping tom" />(Paru dans le</span></span></span><strong><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;"><span style="mso-fareast-font-family: 'Times New Roman'; mso-fareast-language: FR;"><span style="mso-spacerun: yes;"><em> <span style="color: #800000;">Magazine des Livres</span></em>, </span></span></span></strong><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;"><span style="mso-fareast-font-family: 'Times New Roman'; mso-fareast-language: FR;"><span style="mso-spacerun: yes;">n°33, Novembre-Décembre 2011)</span></span></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt;"> </span></p>
Casadeihttp://casadei.blogspirit.com/about.htmlL'Oedipe d'Henry Bauchautag:casadei.blogspirit.com,2009-10-26:18436262009-10-26T14:14:00+01:002009-10-26T14:14:00+01:00 Oedipe sur la route est le second volume du tryptique qu' Henry...
<p style="text-align: justify;"><em><strong><img src="http://casadei.blogspirit.com/media/00/01/1017756189.jpg" alt="oedipe.jpg" id="media-415032" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" />Oedipe sur la route</strong></em> est le second volume du tryptique qu'<strong>Henry</strong> <strong>Bauchau,</strong> écrivain belge, né en 1913<strong>,</strong> a consacré aux récits mythiques de la <strong>Grèce</strong> antique avec <strong><em>Antigone</em></strong> et <strong><em>Diotime et les lions</em></strong>.</p> <p style="text-align: justify;"><strong><em>Antigone</em></strong> m'avait enthousiasmé, il y a en effet dans ce récit d'une grande pureté d'écriture, unité d'action de temps et de lieu... cf. chronique du 21 août dernier. <strong><em>Oedipe sur la route</em></strong> est au contraire un long cheminement. On accompagne <strong>Oedipe</strong>, roi de <strong>Thèbes</strong> déchu, car meurtrier de son père, <strong>Laios</strong>, époux, dans l'ignorance de sa parenté, de sa mère, <strong>Jocaste</strong>, qui, l'apprenant, vient de mettre fin à ses jours. Aveuglé volontairement, ses enfants maudits, <strong>Oedipe</strong> part sur la route seul, en mendiant, suivi par <strong>Antigone,</strong> sa fille, qui refuse de l'abandonner. C'est une longue marche, marquée par la faim, la soif, le froid, la canicule, la maladie, l'hostilité, mais aussi la musique, la peinture, la sculpture, le chant, la danse, les rencontres, l'amour au sens le plus fort du terme, un chemin vers la clairvoyance, la connaissance de soi, la rédemption...</p> <p style="text-align: justify;">Un livre magnifique pour prendre soi-même la route. <strong><em>Ce n'est pas toi qui fait le chemin mais le chemin qui te fait</em>,</strong> une belle illustration de cet adage de ceux qui marchent.</p>
Casadeihttp://casadei.blogspirit.com/about.htmlL'Antigone d'Henry Bauchautag:casadei.blogspirit.com,2009-08-21:18113602009-08-21T11:17:00+02:002009-08-21T11:17:00+02:00 J'avais bien quelques souvenirs de l'Antigone d'Anouilh étudié en...
<p style="text-align: justify;"><span style="color: #993300;"><img src="http://casadei.blogspirit.com/media/02/00/1008401739.jpg" alt="antigone_bauchau.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" id="media-392478" />J'avais bien quelques souvenirs de l'Antigone <strong>d'Anouilh</strong> étudié en classe, je ne me souviens pas avoir étudié la pièce de <strong>Sophocle</strong>, avoir entendu <strong>Georges Steiner</strong> parler <strong>des Antigones</strong>...</span></p> <p style="text-align: justify;"><span style="color: #993300;">La lecture du roman <strong>d'Henry Bauchau</strong> tout simplement intitulé <strong>Antigone</strong> a été un réel emerveillement par la beauté de l'écriture, l'universalité des thèmes traités, le côté épique du récit. Au contraire de la pièce <strong>d'Anouilh</strong> qui débute peu avant la mort d'Antigone, <strong>Henry Bauchau</strong> remonte le temps, celui où <strong>Antigone</strong> revient à <strong>Thèbes</strong> après la mort de son père <strong>Oedipe</strong>. Elle va tenter avec l'appui de sa soeur <strong>Ismène</strong> de jouer les médiatrices pour éviter la guerre que se mènent ses deux frères, les jumeaux rivaux <strong>Etéocle</strong>, qui est roi de <strong>Thèbes</strong>, et <strong>Polynice</strong>, qui veut prendre la place. Vaines tentatives, on voit se dérouler les prémices de la bataille, les complots, l'épidémie, l'assaut, la mort tragique des deux frères, <strong>Créon</strong> au fait de sa puissance...</span></p> <p style="text-align: justify;"><span style="color: #993300;">Au contraire de l'image de fragilité que j'avais en mémoire, <strong>Antigone</strong> se révèle très forte, à cheval avec <strong>Jour</strong> et <strong>Nuit</strong>, au tir à l'arc, elle est sculptrice, elle mendie pour trouver les ressources pour soigner les pauvres lors de l'épidémie, poussant un cri improbable quii fait s'ouvrir les bourses, elle fait plier <strong>Polynice</strong>, elle est tendre, comple avec <strong>Ismène</strong> que l'on découvre totalement ici, amoureuse <strong>d'Hémon</strong>, le fils de <strong>Créon,</strong> <strong>Créon</strong>, son oncle, qui va la condamner à moins qu'elle ne se condamne elle-même en allant, on le sait, recouvrir de terre le corps de <strong>Polynice</strong> que le nouveau roi de <strong>Thèbes</strong> a voué aux vautours.</span></p> <p style="text-align: justify;"><span style="color: #993300;">Un très beau roman qui donne envie d'aller découvrir un autre ouvrage de <strong>Bauchau</strong> : <strong><em>Oedipe sur la route</em></strong>.</span></p>
Christiane Riedelhttp://christiane-riedel.blogspirit.com/about.htmlMORT SYMBOLIQUE D’UN PROCHE , CH. 4 : OU LES ELUCUBRATIONS DU DR FREUDtag:christiane-riedel.blogspirit.com,2007-08-11:13474012007-08-11T12:50:00+02:002007-08-11T12:50:00+02:00Il arrive à tout le monde de rêver qu’un proche est mourant ou mort. Ces...
Il arrive à tout le monde de rêver qu’un proche est mourant ou mort. Ces rêves inquiètent beaucoup, mais comme on ne veut pas reconnaître que les rêves ont un sens, on garde son rêve sous silence, à moins qu’on ait un interprète de rêves sous la main. Alors on pose la question : Qu’est-ce que ça veut dire ?Plusieurs fois, quand j’étais professeur, il m’est arrivé la même expérience. Mes collègues connaissaient mon activité d’interprète de rêves, mais c’était sujet à moquerie et mépris.Pourtant, en cachette, quand il n’y avait pas grand monde dans la salle des professeurs, ou quand nous nous lavions les mains aux toilettes, un ou une collègue s’adressait rapidement à moi : « - Madame Riedel, dîtes-moi, je sais que vous vous intéressez aux rêves, je voudrais vous demander …je viens de rêver que ma mère était morte… ? »« - Christiane…, qu’est ce que ça veut dire… j’ai rêvé que mon père mourait. Tu crois que c’est prémonitoire ? »Grande inquiétude.Comment répondre sérieusement ? Comment faire comprendre que l’interprétation d’un rêve ne doit pas être « expédiée » ? Certes, c’est déjà bien de chercher à comprendre son rêve ! Mais hélas, pour en arriver là, il faut que le rêve fasse peur. Ah ! Quand le rêve vous plonge dans l’angoisse, alors là, on s’intéresse à lui !…<div style="text-align: center"><img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/01/02/4e000910939a1a9005a65ceb3f4a8f08.jpg" id="media-26217" alt="4e000910939a1a9005a65ceb3f4a8f08.jpg" style="border-width: 0; margin: 0.7em 0;" /></div>Et encore ! Il ne faut pas se faire d’illusion. C’est en fait juste pour savoir que l’image est symbolique.« - Ah bon, donc ce n’est pas vrai,… d’accord…Attends, la cloche sonne, excuse-moi, il faut que je monte en classe. Salut et merci ! Tu m’as bien soulagée !… »On ne me reparlera plus du rêve.Misère ! Je vais moi aussi retrouver mes élèves. <img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/00/01/8ca021d651f4de01f3f748334c13dd60.jpg" id="media-26194" alt="c491914972f99e266fefdac9e980dc98.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" />Sans illusions, sans déception. C’est comme ça. J’ai fait ce que j’ai pu.Une fois de plus, je constate que le monde intérieur, ça n’existe pas. Quand comprendra-t-on que ce qui se passe dans l’inconscient, dans le monde à l’intérieur, est aussi important, sinon plus, que ce qui se passe dans le monde extérieur au niveau conscient ?L’équivalence est si vraie que le rêve prend la situation extérieure comme symbolique du monde intérieur et, quand il vient nous visiter, il nous dit : « - Regarde, voilà ce qui se passe en toi en ce moment : c’est COMME SI ce parent mourait. »Il s’agit d’une métaphore qu’il convient de bien comprendre.Ce genre de rêve doit être étudié avec le rêveur de façon très minutieuse, parce qu’il peut avoir des sens très variés et même opposés, selon les rêveurs et selon les circonstances. C’est là qu’il faut l’aide d’un interprète compétent.Cet interprète ne se contentera pas de plaquer des grilles de significations toutes faites, mais il mènera une véritable enquête et procédera minutieusement à la technique de l’interview. <img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/00/02/b2c7c2c9c75800ee0d5fd9bd33ff0eb1.jpg" id="media-26198" alt="ee805d10aeb0e489a13c044015b4b4d3.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" />Seule cette technique de l’interview permet de cerner le sens individuel du rêve, adapté au rêveur, ce jour là. Car, il ne faut pas manquer de rappeler que la même image, chez le même rêveur, peut présenter des sens différents selon les moments.<strong>C’est pourquoi, avant d’étudier le sens symbolique de ce rêve avec la technique de l’interview, il me semble nécessaire de se débarrasser d’abord de l’interprétation traditionnelle générale et systématique, qui empêche d’étudier cette image de façon individuelle. Je veux ici parler de l’interprétation freudienne des rêves en général, des rêves de mort, et des rêves de la mort du père en particulier.</strong><img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/00/02/1c46af8624e57b13ab0fbc7b8f06c86f.jpg" id="media-26199" alt="1f00dcfaf101e798d9ed320937a3832d.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" /><strong>Comment Freud interprétait-il les rêves en général et plus particulièrement ceux, où il était question de la mort du père ? </strong>Pour le médecin viennois, le rêve serait la réalisation d’un désir condamnable caché, et le rêve où le père meurt serait tout particulièrement caractéristique du désir qu’éprouverait le fils de voir mourir son père, afin de pouvoir le remplacer auprès de sa mère. Pour donner à sa théorie un fondement prestigieux, Freud l’a rapprochée de l’histoire d’Œdipe qui a tué son père et épousé sa mère. Pour lui, ce mythe grec serait un modèle de comportement généralisé, le fils souhaitant la mort du père pour prendre sa place auprès de sa mère. Avoir un rêve où le père meurt serait donc l’expression de ce désir.A l’examen, la méthode de Freud s’avère la même pour le rêve et le mythe. Dans un cas comme dans l’autre, il plaque ses idées et tord les images ou l’histoire, pour leur donner le sens qui lui convient. <img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/02/00/ac40d6d91dd3f404c169c21f907f5104.jpg" id="media-26201" alt="a9db7aef82d21f5390a2c5fba244821b.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" /> Il n’analyse pas les images du rêve avec rigueur, il fausse le mythe. Voyons comment :<strong>Voici donc très brièvement le mythe d’Oedipe</strong>, qui, quand il tua un inconnu, ignorait totalement qu’il était son père. A la naissance d’ Œdipe, ses parents, le roi de Thèbes Laïos et la reine Jocaste, consultèrent l’oracle de Delphes pour connaître le destin de l’enfant royal. L’oracle déclara que Œdipe tuerait son père et épouserait sa mère. Pour empêcher la réalisation de cet affreux destin, les parents abandonnèrent leur fils dans les bois. Le bébé fut sauvé par un berger et adopté par le roi de Corinthe qui l’éleva comme son fils et lui cacha son origine. Parvenu à l’âge adulte, Œdipe se rendit à Thèbes et se trouva à un carrefour face à face avec le char d’un homme arrogant, qui lui bloquait la route.<img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/00/02/3593a782ed9d2d932473d3aa03d9ff1a.jpg" id="media-26202" alt="b65b50a99588aeee058849c31732097d.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" /> <img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/00/01/c53b396b091ad51465e591d33a062173.jpg" id="media-26203" alt="7069ff028897f87d0690e4720f09a440.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" /> Ils se disputèrent le passage, et l’homme, pour forcer Œdipe à lui céder, tua un de ses chevaux. Furieux, Œdipe, en fis de roi, exigea la place et lança sa lance sur ce voyageur agressif, qui mourut sous le coup. <img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/01/02/daef531629f6217e0d2244c6c69baa16.jpg" id="media-26206" alt="0f8b631e477f4cd7e745d11f4593d720.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" />Arrivé à Thèbes, Œdipe trouva à l’entrée le sphinx qui terrorisait la ville. Le monstre posait une énigme aux passants, et les dévorait s’ils ne savaient pas répondre. Œdipe résolut l’énigme et le sphinx se tua de dépit.<img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/01/00/7adf7f1c6dcc3c44e6571ec910861e64.jpg" id="media-26207" alt="9be7da48909c01c0325d0c3c25eeff49.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" /> Comme le roi venait de mourir et que la reine se retrouvait veuve, les habitant de Thèbes voulurent remercier Œdipe de les avoir libérer du sphinx ; ils lui offrirent de monter sur le trône et d’épouser leur reine Jocaste. Œdipe accepta et vécut quinze ans de bonheur avec elle. C’est seulement alors, après toutes ces années, qu’il apprit que sa femme était la veuve de l’inconnu qu’il avait tué, et que cet homme, le roi, était aussi son père. Jocaste était donc sa mère. Œdipe, de désespoir se creva les yeux.<img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/01/01/83168760bee49327e1eb193177f7e103.jpg" id="media-26208" alt="ac3cffea23795445eb062ce839835f2a.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" /> Les dieux le jugèrent innocent. Comme le montre le récit de ce mythe, Œdipe n’a donc pas tué son père pour prendre sa place auprès de sa mère. Le complexe d’Œdipe, célèbre pilier de la dogmatique freudienne, n’a donc rien à voir avec le mythe que Freud a déformé pour le faire coller à sa théorie. Celle-ci ne repose sur aucun fondement général que le mythe grec aurait déjà exprimé. Mais cela n’a pas empêché à cette théorie de connaître un essor extraordinaire et de faire couler des flots d’encre.<strong>Un extrait sur le complexe d’Oedipe</strong>Voici un exemple de l’échafaudage de cette théorie, tel qu’on peut le lire sur Internet à ce propos : <img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/01/01/b86969b8321fb38511fb1ddae46116cf.jpg" id="media-26209" alt="255bf5a7b549ccfb54ba3fd88a830d40.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" /><em>« Le complexe met en relation le jeu de l'amour et de la haine. Il noue le désir d'un sujet à celui d'un autre, duquel se met en place la question de lui même, de sa vie, de sa mort, du sexe.Le désir de Savoir porte le Désir Oedipien, selon S. Freud, car il met en relation la Libido et la pulsion génitale ; laquelle sera prépondérante aux autres pulsions. <img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/00/01/366377f0ad77f76772cb1306b147b0d8.jpg" id="media-26210" alt="b7eaf3e629fe39e8c336ae3c4f5d56c0.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" />Dans la forme simple qui constitue le modèle initial de l'Oedipe Freudien, l'enfant commence à désirer sa mère elle même au nouveau sens, et à haïr, de façon entièrement nouvelle, le rival qui est alors un obstacle à ce désir.D'un conflit entre ces deux relations, l'enfant va développer un investissement d'objet qui prend son départ du sein maternel et qui constitue le modèle d'un choix d'objet selon le type par étayage.Du père, le garçon s'empare par Identification. Les deux relations subsistent un moment, puis se transforment : ainsi né le complexe d'Oedipe. L'Identification au père prend alors une teinte hostile, elle tourne au désir d'écarter le père et de la remplacer par la mère : pour l'enfant, le vrai père est un Père Mort.Le conflit Oedipien est tourné vers la possession sexuelle de la mère et vers la mort du père. Le mouvement intérieur de ces désirs va se poursuivre dans une activité de fantasme. » </em><img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/01/00/a9fc6a617eef262010b5415bc2a9627d.jpg" id="media-26212" alt="7ff3c1b88c2bf0262e637847ae86d99a.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" />Ces affirmations me laissent perplexes. Je n’y comprends rien. Elles me semblent personnellement fumeuses et gratuites. Vous êtes-vous déjà interrogé sincèrement à ce sujet ? Avez-vous déjà rencontré la situation décrite dans le complexe d’Œdipe chez l’un de vos proches ?Une sage-femme sénégalaise me disait un jour : « - Je ne vous comprends pas, vous les Occidentaux. Chez nous, tout le monde dort dans la même chambre, et on n’a jamais vu un fils qui veuille coucher avec sa mère. »<strong>C’est le psychiatre suisse Carl Gustav Jung qui, le premier, il y a cent ans déjà, dès l’année 1909, a dénoncé les théories de son collègue Freud, qu’il connaissait bien.</strong> Malgré ce qu’on dit, Jung n’a jamais été le disciple de Freud et il a refusé d’être son dauphin, marquant par là ouvertement son désaccord. <img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/00/01/ab44e587c3eaefcf2f0948742040bb93.jpg" id="media-26214" alt="340b5e144a54fe964592ec8d9efaec88.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" />Jung a souligné l’idée obsessionnelle de la mort du père chez Freud, idée qui frisait la névrose. Il en fit lui même l’expérience, comme il le raconte dans son autobiographie « Ma Vie », au chapitre « Sigmund Freud ». Par deux fois, alors que les deux hommes discutaient sur ce thème, Jung s’opposa aux idées de Freud, qui tomba en syncope.Aujourd’hui, de plus en plus de chercheurs, de scientifiques, de médecins réfutent les théories freudiennes. Je partage ce point de vue. Depuis plus de trente ans que j’ai commencé à chercher à comprendre les rêves, je n’ai jamais pu donner raison à Freud, je n’ai jamais pu constater, après analyse avec les rêveurs, que ce rêve de mort serait systématiquement la réalisation d’un désir caché de la mort de leur père. Je ne comprends pas le succès de cette idée.<strong>Conclusion</strong>Si donc vous recevez ce genre de rêve, où le père meurt, soyez tranquille ! Non, avec ce rêve, vous ne désirez pas la mort de votre père de façon inconsciente. Non, vous ne nourrissez pas en cachette un instinct criminel. Et non, non et non, si vous êtes un homme, ce rêve ne montre pas que vous désirez secrètement tuer votre père pour prendre sa place dans le lit de votre mère ! Bon, mais, une fois qu’on a écarté la grille d’interprétation de la psychanalyse, que veut dire ce alors ce rêve?Je vous montrerai donc la prochaine fois, comment, ayant jeté au panier la camisole ou la grille d’interprétation freudienne, j’interprète, l’esprit libre, avec la technique logique et rigoureuse de l’interview, un rêve où le père meurt. Vous découvrirez alors une surprise.<div style="text-align: center"><img src="http://christiane-riedel.blogspirit.com/media/00/02/86455d124c44eb45bd4acf282b80d6ff.jpg" id="media-26218" alt="86455d124c44eb45bd4acf282b80d6ff.jpg" style="border-width: 0; margin: 0.7em 0;" /></div><strong>Illustration</strong>Je remercie l’auteur de l’illustration finale « Elucubrations », que j’ai trouvée sur « neko.bloxode.com »