Last posts on joan2024-03-29T02:05:16+01:00All Rights Reserved blogSpirithttps://starter.blogspirit.com/https://starter.blogspirit.com/fr/explore/posts/tag/joan/atom.xmlTaniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlPulsationtag:textespretextes.blogspirit.com,2018-01-27:31112652018-01-27T08:30:00+01:002018-01-27T08:30:00+01:00 « Et qu’avait fait Charlotte dans Boca Grande ? Marine...
<p><span style="font-size: 12pt;"><em><span style="font-family: 'Times New Roman','serif';"><a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/00/00/949591008.jpg" target="_blank" rel="noopener noreferrer"><img id="media-196690" style="float: right; margin: 0.2em 0 1.4em 0.7em;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/00/01/982086388.jpg" alt="didion,joan,un livre de raison,littérature anglaise,etats-unis,roman,traduction,culture" /></a>« Et qu’avait fait Charlotte dans Boca Grande ? Marine Bogart voulait-elle savoir ce que Charlotte avait fait de sa vie ou comment elle avait bien pu se faire tuer ? Dans un cas comme dans l’autre la réponse est obscure. Dans la mesure où je suis incapable de tirer des conclusions définitives. Je sais comment établir le schéma moléculaire de la vie, représenter les hélices simples, doubles des acides aminés, mais lorsque je m’efforce de définir le modèle du « caractère » de Charlotte Douglas je ne vois qu’une pulsation lumineuse. Je songe à ces arcs-en-ciel sur les taches d’huile des boulevards de Progreso après la pluie. Il me faut tenter de percevoir ce modèle. »</span></em></span></p><p><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: 'Times New Roman','serif';">Joan Didion,</span><em><span style="font-family: 'Times New Roman','serif';"> <a title="Je serai le témoin (T&P)" href="http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2018/01/23/je-serai-le-temoin-1162673.html" target="_blank" rel="noopener noreferrer">Un livre de raison</a></span></em></span></p>
Taniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlJe serai le témointag:textespretextes.blogspirit.com,2018-01-25:31112642018-01-25T08:30:00+01:002018-01-25T08:30:00+01:00 Le premier roman de Joan Didion traduit en français, si je ne me trompe,...
<p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Le premier roman de <a title="Wikipedia" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Joan_Didion" target="_blank" rel="noopener noreferrer">Joan Didion </a>traduit en français, si je ne me trompe, date de 1977 : <a title="Site de l'éditeur" href="http://www.grasset.fr/un-livre-de-raison-9782246863748" target="_blank" rel="noopener noreferrer"><em>Un livre de raison</em></a>. Quel est le sens du titre original, A<em> Book of Common Prayer</em> (traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Gérard-Henri Durand) ? Le TLF définit le<em> « livre de raison »</em> comme un <em>« Journal tenu par le chef de famille qui inscrivait, avec ses comptes, les événements tels que naissances, mariages, etc., et ses propres réflexions ».</em> Le rapport avec <a title="Wikipedia" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Livre_de_la_pri%C3%A8re_commune" target="_blank" rel="noopener noreferrer"><em>Le livre de la prière commune</em> </a>des anglicans reste plus mystérieux au premier abord.</span></p><p style="text-align: center;"><a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/01/02/3496918494.jpg" target="_blank" rel="noopener noreferrer"><img id="media-196688" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/01/01/4149069940.jpg" alt="didion,joan,un livre de raison,littérature anglaise,etats-unis,roman,traduction,culture" /></a></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Le roman se présente sous la forme de six cahiers, le premier commençant par cette phrase : <a title="Début du roman à lire en ligne" href="http://liseuse-hachette.fr/file/37721?fullscreen=1#epubcfi(/6/10[p1chap1]!/4/2[chap-006]/2[page_11]/2/2[niv1-001]/2/2/1:0)" target="_blank" rel="noopener noreferrer"><em>« Je serai le témoin de cette femme. »</em> </a>Point, à la ligne. Voici la suite : <em>« Traduire ainsi </em>seré su testigo,<em> une expression qui n’apparaît pas dans les lexiques à l’usage des touristes, de quelle utilité serait-elle au voyageur prudent ? Cela s’est passé ainsi : elle a quitté un homme, puis un deuxième ; elle a retrouvé le premier pour voyager avec lui ; elle l’a laissé mourir seul. Elle a perdu un enfant par la faute de l’« Histoire » et un autre à la suite de « complications » (je me contente de reproduire certains commentaires). Elle s’est crue capable de se débarrasser de ces fardeaux et, un jour, elle a débarqué à Boca Grande – en touriste. </em>Una turista<em>. Comme elle l’a dit, elle-même. »</em></span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Reconnaissez qu’il y a de quoi intriguer dans cet incipit. Qui parle ? de qui ? Grace Strasser-Mendana, née Tabor, se présente comme une anthropologue – <em>« j’ai consacré cinquante de mes soixante années à étudier des illusions »</em> – installée depuis 1935 en Amérique équatoriale où elle a épousé un planteur de cocotiers <em>« ici, dans Boca Grande »</em> et étudié la biochimie <em>« en amateur ».</em> Charlotte Douglas est la femme dont elle raconte l’arrivée, la vie et la mort à Boca Grande, ville et pays sans histoire (une fiction) que Charlotte considérait<em> « comme le point central de l’économie des deux Amériques »</em>, une escale de ravitaillement pour certaines lignes aériennes.</span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Pour son <em>« rapport de témoin »</em>, elle rassemble d’abord des faits, décrit la ville où elle vit et la province où ils récoltent le coprah, nommée <em>« Millonario »</em>, comme son beau-père, Victor Strasser, <em>« l’homme riche ».</em> Edgar, le fils aîné, a fait entrer Grace en l’épousant dans <em>« l’une des trois ou quatre grandes familles »</em> au pouvoir à Boca Grande, où les rivalités politiques et financières vont bon train. Elle dit continuer à vivre là parce qu’elle aime la lumière, <em>« la seule raison ».</em></span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Même si elle reçoit de ses nouvelles, son fils Gerardo lui est devenu <em>« étranger »</em> – machiste, susceptible, <em>« une façon d’être que je n’admire pas. »</em> Grace, qui va mourir bientôt d’un cancer du pancréas, ne s’intéresse qu’à Charlotte, elle n’arrive pas à comprendre le sens de son séjour à Boca Grande. Née en Californie, la quarantaine, Charlotte Douglas, <em>« La Norteamericana »</em>, a beaucoup voyagé, son passeport l’atteste.</span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">A l’hôtel Caribe, on l’entendait taper à la machine dans sa chambre toute la nuit. Elle n’apparaissait que le soir au casino, sans y jouer, puis allait manger seule à une terrasse ou au Jockey Club. Partout, on la remarquait : extrêmement mince, des cheveux bouclés d’un roux clair, une grosse émeraude carrée à la place de l’alliance. Des vêtements de prix, avec <em>« une sorte de délabrement ».</em> Cherchant parfois à attirer l’attention, faisant preuve d’esprit <em>« jusqu’à lasser ses interlocuteurs ».</em> A la réception de l’hôtel, elle s’inquiétait des messages, n’en recevait pas. Elle se rendait fréquemment à l’aéroport sans raison apparente, y traînait au bar, y lisait le journal.</span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">La liste du Département d’Etat précisait qu’il fallait prévenir l’ambassade des Etats-Unis en cas d’incident, sans qu’on sache pourquoi. Quand les proches de Grace la rencontrent, Charlotte se montre très séduisante avec les hommes, avec Victor, le beau-frère de Grace, et leur raconte toutes sortes d’histoires à propos de Léonard, de Warren et de Marine. Interrogée, elle précise que Léonard, son second mari, un juriste, <em>« s’occupe d’armes ».</em> Sinon, elle reste dans les généralités, <em>« comme si elle n’avait aucune vie personnelle ».</em> A Grace, elle parle parfois de Marine, sa fille et elle seraient <em>« inséparables ».</em></span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Le deuxième cahier débute un peu plus d’un an après la mort de Charlotte, alors que Grace, très malade, devient indifférente à ce que disent ses proches ou son fils. La <em>« turista »</em> lui avait donné quelques informations sur la disparition de Marine, Grace en a reçu d’autres de Léonard Douglas – <em>« mais l’essentiel de mon savoir, la part en laquelle je puis avoir le plus de confiance, me vient de ma formation en matière de comportement humain. »</em> Le FBI s’était présenté chez Charlotte pour enquêter sur Marine, dix-huit ans, qui avait participé à un attentat à la bombe – c’était un an avant que sa mère se réfugie à Boca Grande.</span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;"><em>Un livre de raison</em> est le récit d’une fascination, axé sur le désir de Grace de comprendre cette femme, cette épouse, cette mère, <em>« en politique innocente »</em>, aux connaissances lacunaires, sensuelle, secrète, très fine dans ses reparties. Grace s’intéresse de moins en moins à sa propre vie, mais le spectacle, le comportement, les confidences de Charlotte, son attente désespérée de Marine, le puzzle de sa vie, dont elle a été témoin, la concernent, elle cherche à en résoudre l’énigme. Cette<a title="Critique de Nathalie Crom dans Télérama" href="http://www.telerama.fr/livres/un-livre-de-raison,154358.php" target="_blank" rel="noopener noreferrer"><em> « enquête psychologique »</em></a> se déroule sur un fond de corruption et de violence sociale. </span></p><p style="text-align: center;"><a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/00/00/2189086963.jpg" target="_blank" rel="noopener noreferrer"><img id="media-196689" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/00/00/1049499184.jpg" alt="didion,joan,un livre de raison,littérature anglaise,etats-unis,roman,traduction,culture" /></a><br /><span style="font-family: arial,helvetica,sans-serif; font-size: 8pt;">Joan Didion en 1977 (Image via AP, source <a title="Interview en 1977 (Pictorial, en)" href="https://pictorial.jezebel.com/sisters-in-misery-what-it-was-like-to-interview-joan-d-1793791955" target="_blank" rel="noopener noreferrer">Pictorial</a>)</span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;"><em>« Chez la Californienne <a title="Un article fouillé sur Joan Didion (The Guardian, en)" href="https://www.theguardian.com/books/2005/may/21/usnationalbookawards.society" target="_blank" rel="noopener noreferrer">Joan Didion</a>, l’intelligence est un instinct sauvage. Son regard sur les choses, d’une acuité qui confine à l’effet spécial, agit sur le lecteur comme la détente d’un grand fauve. Son rapport au réel – et à la phrase – est animal : distant, juste, impitoyable, foudroyant plus souvent qu’à son tour »</em>, écrivait Judith Steiner dans le <a title="Article source" href="http://archives.magazine-litteraire.com/lam%C3%A9rique-1965-1990" target="_blank" rel="noopener noreferrer"><em>Magazine littéraire</em> </a>en 2009. Les retours à la ligne sont nombreux, les dialogues aussi, parfois coupés au couteau, parfois drôles (dans le genre vache). </span></p><p><span style="font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: 12pt;">Les personnages de ce roman participent à la vie mondaine, mais leur ressort intime reste le plus souvent caché et leur solitude, profonde. L’approche du sujet, par son détachement, m’a rappelé parfois l’univers du nouveau roman. On y trouve déjà cette grande lucidité qui frappe dans <a title="T&P" href="http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2015/02/03/une-annee-sans-lui-1139536.html" target="_blank" rel="noopener noreferrer"><em>L’année de la pensée magique</em> </a>(2005).</span></p>
Taniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlEnsembletag:textespretextes.blogspirit.com,2015-02-07:31106502015-02-07T18:07:00+01:002015-02-07T18:07:00+01:00 « Seuls ceux qui survivent à une mort se retrouvent véritablement...
<p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"><em><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">« Seuls ceux qui survivent à une mort se retrouvent véritablement seuls. Les liens qui constituaient leur existence – les plus profonds comme les plus insignifiants en apparence (jusqu’à ce qu’ils soient rompus) – ont tous disparu. <a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/01/02/2686104203.jpg" target="_blank"><img id="media-166160" style="float: right; margin: 0.2em 0 1.4em 0.7em;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/01/02/2015446419.jpg" alt="didion,joan,l'année de la pensée magique,récit,autobiographie,littérature anglaise,etats-unis,mort,couple,famille,séparation,deuil,écriture,culture" /></a>John et moi avons été mariés pendant quarante ans. Tout ce temps, excepté les cinq premiers mois de notre mariage, quand John était encore au magazine </span></em><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">Time</span><em><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">, nous avons travaillé chez nous. Nous étions ensemble vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ce qui inspira toujours un mélange de joie et d’inquiétude à ma mère et à mes tantes. </span></em><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">« Présent pour le meilleur ou pour le pire, mais jamais pour le déjeuner »</span><em><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">, me disait souvent l’une ou l’autre, les premières années. Impossible de compter toutes les fois, au cours d’une journée ordinaire, où il se passait soudain quelque chose qu’il fallait que je lui raconte. Ce réflexe n’a pas disparu avec sa mort. Ce qui a disparu, c’est la possibilité d’une réponse. »</span></em></p><p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">Joan Didion,<a title="Une année sans lui (T&P)" href="http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2015/02/03/une-annee-sans-lui-1139536.html" target="_blank"><em> L</em><em>’</em><em>année de la pensée magique</em></a></span></p><p style="margin: 0cm 0cm 10pt; text-align: center;"><span style="line-height: 115%; font-family: arial,helvetica,sans-serif; font-size: xx-small;"><a title="Source de la photo" href="http://www.samuelfrench.com/p/6640/year-of-magical-thinking-the" target="_blank">Photo </a>: <a title="La critique du New York Times" href="http://www.nytimes.com/2007/03/30/theater/reviews/30magi.html?pagewanted=all&_r=0" target="_blank"><em>L’année de la pensée magique</em></a>, Booth Theater, mise en scène David Hare, Vanessa Redgrave dans le rôle de Joan Didion</span></p><p> </p><p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"> </p><p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"> </p>
Taniahttp://textespretextes.blogspirit.com/about.htmlUne année sans luitag:textespretextes.blogspirit.com,2015-02-05:31106492015-02-05T08:30:00+01:002015-02-05T08:30:00+01:00 Le rendez-vous avec un livre obéit souvent à des règles capricieuses :...
<p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">Le rendez-vous avec un livre obéit souvent à des règles capricieuses : on ouvre celui-ci sans tarder, celui-là, on le réserve à certaines circonstances, à une certaine humeur. Ce que j’avais lu sur <em>L’année de la pensée magique</em> de <a title="Notice Wikipedia" href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Joan_Didion" target="_blank">Joan Didion </a>(2005, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Pierre Demarty) m’avait décidée à la lire, mais quelle était la bonne saison pour entrer dans ce livre de deuil ?</span> </p><p style="text-align: center;"><a href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/02/309954488.jpg" target="_blank"><img id="media-166156" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/02/01/3777708567.jpg" alt="didion,joan,l'année de la pensée magique,récit,autobiographie,littérature anglaise,etats-unis,mort,couple,famille,séparation,deuil,écriture,culture" /></a><br /><span style="line-height: 115%; font-family: arial,helvetica,sans-serif; font-size: xx-small; mso-fareast-font-family: Calibri; mso-fareast-language: EN-US; mso-ansi-language: FR-BE; mso-bidi-language: AR-SA;"><a title="Source de la photo" href="http://www.npr.org/2011/11/01/141862057/sorrowful-blue-nights-didion-mourns-her-daughter" target="_blank">Photo de famille</a> à Malibu, 1976</span></p><p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">C’est la catastrophe la plus redoutée : voir disparaître la personne avec qui on partage sa vie. <em>« La vie change vite. La vie change dans l’instant. On s’apprête à dîner et la vie telle qu’on la connaît s’arrête. La question de l’apitoiement. »</em> Ces phrases ouvrent le récit de Joan Didion, les premiers mots qu’elle a écrits après la mort de son mari, <a title="Notice Wikipedia" href="http://fr.wikipedia.org/wiki/John_Gregory_Dunne" target="_blank">John Gregory Dunne</a>, le 30 décembre 2003, vers neuf heures du soir, victime d’une attaque coronarienne, à la table où ils allaient dîner.</span></p><p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">Comment cela s’est-il passé ? Comment un instant <em>« ordinaire »</em> devient-il autre chose, qu’on n’a jamais connu ? Joan Didion veut rendre au plus près ce bouleversement dont on n’a aucune idée, quand bien même on l’a observé chez d’autres. Ce n’est pas du tout un livre de lamentations, de regrets, c’est une approche de l’indicible expérience de la perte, un effort de compréhension, un exercice nécessaire pour elle, une manière de reprendre sa vie en main : raconter une année sans lui.</span></p><p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">Quintana, leur fille, était depuis cinq jours aux soins intensifs pour une grippe sévère qui avait dégénéré brusquement en pneumonie. Ce mardi soir, ils venaient de rentrer de l’hôpital, John avait lu pendant qu’elle préparait le dîner, ils s’étaient assis à table.<em> « John parlait – puis ne parla plus. »</em></span></p><p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">Joan Didion est à la recherche des moindres faits, paroles, gestes qui ont précédé et suivi la crise fatale, l’appel des secours, l’intervention médicale sur place, puis aux urgences. Etrange de ne plus pouvoir en discuter avec John. <em>« Parce que nous étions tous deux écrivains et travaillions tous deux à la maison, nos journées étaient rythmées par le son de nos voix. »</em> Alors, ce silence, quand elle est rentrée du New York Hospital…</span></p><p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">Pour sortir de la confusion, Joan Didion se documente : registre des concierges de l’immeuble, certificat de décès, rapport d’autopsie. Des souvenirs surgissent, qui semblent des présages, comme quand il lui avait demandé récemment de noter quelque chose pour lui puis ajouté : <em>« Tu peux t’en servir si tu veux. » – « Que voulait-il dire ? Savait-il qu’il n’écrirait pas son livre ? »</em></span></p><p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;"><em>« L’affliction ne connaît pas la distance. L’affliction se manifeste par vagues, par de brusques élans, des appréhensions soudaines qui font fléchir les genoux, aveuglent le regard et annihilent le cours de la vie normale. »</em> Une amie est venue ce soir-là, a donné des coups de téléphone, a proposé de rester, mais elle a refusé. <em>« J’avais besoin d’être seule pour qu’il puisse revenir. Ainsi commença pour moi l’année de la pensée magique. »</em></span></p><p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">Joan Didion lit Freud, Melanie Klein, vide des étagères – <em>« c’était ce qu’on faisait après la mort de quelqu’un »</em> – bloque sur les chaussures – <em>« il aurait besoin de chaussures, s’il revenait ».</em> Les failles dans son raisonnement ne cessent de l’intriguer, même si en apparence, elle se comporte <em>« de manière tout à fait rationnelle ».</em> <span style="mso-spacerun: yes;"> </span>L’incinération, reportée en attendant que sa fille soit capable de participer à la cérémonie, aura lieu presque trois mois après la mort de John, en mars.</span></p><p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">«<em> Quand les temps sont difficiles, m’avait-on enseigné depuis toute petite, lis, apprends, révise, va aux textes. Savoir, c’était contrôler. »</em> Les écrits sur le chagrin du deuil, si banal, ne sont pourtant pas si nombreux. Des poètes la réconfortent : <em>« Rien ne me paraissait plus exact que ces poèmes et ces danses des ombres. »</em> Elle lit des essais, des études <em>« incontournables »</em> sur le deuil <em>« normal »</em> ou<em> « pathologique ».</em> Elle réfléchit.</span></p><p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">Sa vision du monde a changé. Des discussions lui reviennent, qui aujourd’hui font sens de manière nouvelle, et aussi des remarques sur John, sur ses romans. Ses pensées reviennent inlassablement au soir du 30 décembre : le déroulé des faits ouvre à chaque fois de nouvelles prises de conscience sur ce qui s’est passé alors, en elle et autour d’elle.</span></p><p style="margin: 0cm 0cm 10pt;"><span style="line-height: 115%; font-family: 'Times New Roman','serif'; font-size: medium;">Joan Didion est devenue veuve, et la santé de sa fille n’a pas fini de chanceler gravement – comment vivre ? Elle évite certains endroits, mais les souvenirs surgissent à l’improviste et l’esprit s’y engouffre. Savoir, compréhension, récit, analyse, <a title="La présentation d’Olivier Barrot (vidéo Ina)" href="http://www.ina.fr/video/3457213001" target="_blank"><em>L’année de la pensée magique</em> </a>témoigne du combat d’une femme contre <em>« l’apitoiement »</em> et rend compte, avec une volonté constante de lucidité, de ce qui fait la vie de couple, de ce que fait la séparation, de ce que peuvent les mots.</span></p>