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Bredin
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Mort de Raymond ARON en 1983
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2023-10-17T15:07:00+02:00
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Qu'en disait SARTRE ?
<p style="text-align: center;"><span style="font-family: arial, helvetica, sans-serif; font-size: 18pt;"><strong>Qu'en disait SARTRE ?</strong></span></p><p style="text-align: center;"><a href="http://bar-zing.blogspirit.com/media/01/02/1960301614.jpg" target="_blank" rel="noopener"><img id="media-1366764" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://bar-zing.blogspirit.com/media/01/02/3512075502.jpg" alt="Raymond-Aron-Sartre.jpg" width="428" height="435" /></a></p>
Marc Alpozzo
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Sartre, Existence et liberté
tag:marcalpozzo.blogspirit.com,2021-10-04:3150815
2021-10-04T06:00:00+02:00
2021-10-04T06:00:00+02:00
Nous n'aurons jamais assez parlé de Sartre . À la fois, parce qu'il n'a...
<p style="text-align: justify;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Nous n'aurons jamais assez parlé de <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/sartre" target="_blank" rel="noopener">Sartre</a></span>. À la fois, parce qu'il n'a jamais cessé de se tromper, et en même temps, parce qu'il continue de nous inspirer et de nourrir notre réflexion de sa liberté sans condition et sans limite. À partir d'un passage de <em>L'existentialisme est un humanisme</em>, il est tout à fait possible de cerner les enjeux de sa pensée. J'ai publié dans l'<em><span style="color: #800000;">Ouvroir</span></em> un grand nombre d'articles, nettement plus techniques, mais si je suis parti précisément de ce texte de Sartre, que je cite en annexe, c'est pour bien préciser le fondement moral de la liberté sartrienne, et il ne faut pas se dispenser de le préciser, d'autant que cette époque sans Dieu, nous donne à croire que la liberté est gratuite et sans aucune contrepartie. Ce que l'on oublie, ou feint d'oublier aujourd'hui, c'est que la « vraie » liberté ne peut se gagner qu’en conformité à des règles. C'est ainsi, avec Sartre, u</span></strong><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">ne bonne manière de remettre les pendules à l'heure. </span></strong></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/02/935882048.jpg" id="media-1092089" alt="" /></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;"><img id="media-1131749" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/01/3631339899.jpg" alt="jean-paul sartre,emmanuel kant,nietzsche,fedor dostoïevski,sartre" />En ce qui concerne la liberté, il convient d’en justifier la réalité, et d’en montrer les conséquences sur l’homme. Affirmer la liberté humaine conditionne la question de la responsabilité de l’homme et des résultats de son action dans le monde et la définition de l’humanité qu’il définit à partir de ses choix. En effet, si l’homme est libre, alors il ne peut se dédouaner de ses choix ; il ne saurait trouver d’excuses.<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">C’est ce que Sartre montre dans <em>L’existentialisme est un humanisme</em>, qui fut une conférence que le phénoménologue français a donnée après la guerre afin de clarifier sa philosophie. Il met en lien les thèmes de la liberté, de l’existence et de la morale. Aussi, la philosophie de Sartre est une philosophie athée. Or, en établissant un monde sans Dieu, Sartre recherche à tirer les conséquences de cette absence dans le ciel étoilé des idées. Voilà d’ailleurs pourquoi Sartre se demande si l’homme est né libre, sans nature humaine donnée et figée, peut-il échapper à cette liberté qu’il doit assumer, sans excuses ? La liberté est le fardeau de l’homme, qu’il doit assumer, seuls, sans excuses, car elle exprime l’existence de l’homme qui en précède l’essence, et le condamne à chaque instant à inventer l’homme.<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">Le texte de Sartre commence par une phrase de l’écrivain russe Fédor Dostoïevski, devenue très célèbre et tirée de son roman <em>Les Frères Karamazov</em>. Alors que son personnage Ivan cherche à connaître les conséquences d’une absence de Dieu, il s’écrit : « Si Dieu n’existait pas, tout serait permis ». Pour le personnage de Dostoïevski l’absence de Dieu se paierait de toute morale, puisqu’il en est précisément la figure régulatrice. Nietzsche avait lui-même réfléchi au 19<sup>ème</sup> siècle à la mort de Dieu et ses conséquences, dans le <em>Gai savoir</em> à l’aphorisme 125 et dans son ouvrage majeur <em>Ainsi parlait Zarathoustra</em>, montrant que la figure symbolique de l’image de Dieu n’organisant plus les comportements ou les pensées des hommes, emporterait la croyance des hommes en ce Dieu désormais disparu, étant donné que Dieu n’existe que par la foi des hommes. Ne se contentant pas seulement d’un constat sociologique de cette désaffection des hommes envers la religion, il y ajoutait alors un <em>déicide</em>, accusant les hommes d’être les responsables de leur nouvelle condition, et énonçant la crainte du risque de déboucher sur la <em>résurgence de Dieu</em> à travers un nouvel avatar (la science, le progrès, la démocratie, la vérité), et pour le moins de conduire l’humanité au <em>nihilisme</em> (le refus de toute valeur, y compris des valeurs supérieures).<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">Or, à la deuxième moitié du XXème siècle Sartre en fait « le point de départ de l’existentialisme ». Ce courant de philosophie, très à la mode à l’époque, repose sur une conception de l’existence encore inédite. En parlant de « point de départ » Sartre souligne combien cette conception de l’existence est nouvelle et sans précédent. En effet, il s’agit pour lui de poser un homme nouveau, sans Dieu, sans transcendance extérieure que la sienne. Aussi, Sartre retourne la phrase de Dostoïevski en affirmant que l’absence de Dieu court moins le risque de l’absence de toute morale que l’affirmation de la liberté absolue de l’homme. Autrement dit, une liberté totale, qui engage l’homme. Pourquoi ? Parce que « l’homme est délaissé » nous dit encore Sartre, ce qui veut sûrement dire que l’homme est désormais seul au monde, sans créateur, sans figure tutélaire, sans ligne de route, sans rien qui ne puisse le déterminer précisément. L’adjectif « délaissé » ici est même très fort, car il signifie sans secours, abandonné au milieu du monde, sans aucun chemin tracé d’avance. C’est pourquoi l’on peut dire que « tout est permis ». Mais il ne fait certainement pas le prendre au sens négatif, comme ce fut le cas au XIXe siècle, mais plutôt de manière positive et créatrice (ce que nous verrons plus tard), on peut alors parler des conséquences de la liberté puisque rien ne vient déterminer l’homme ou le contraindre : il ne faut plus lire le mot permis comme une autorisation morale désormais, mais comme la possibilité sans limite d’agir dans le sens qu’il a choisi. Si l’homme est délaissé, c’est parce qu’il ne « trouve ni en lui, ni hors de lui une possibilité de s’accrocher ». L’homme est ainsi ramené à sa seule volonté pour agir. Jusque-là, les actions des hommes étaient régulées par une morale qui leur venait de l’extérieur et qui était celle de la religion. Elle était donc une morale qui nous venait droit de Dieu. Mais dans la philosophie de Sartre, qui se pose d’emblée comme une philosophie athée, l’homme est sans Dieu, il ne peut donc s’en remettre qu’à lui-même ; il n’a pas été préalablement créé par un artisan créateur dans un but précis, comme par exemple ce stylo qui a été créé pour écrire ; il est d’emblée déterminé par rien, en-dehors de ses choix et de ses actions. On voit donc dans ce premier moment du texte, que l’homme ne peut nier sa liberté, par exemple au nom d’une contrainte qui lui viendrait de l’extérieur, comme par exemple l’occupation allemande, ou de l'intérieur comme une maladie psychique ; il semble dès le départ, que Sartre veuille nous faire prendre conscience de cette liberté qui est attachée à l’homme, que l’on pourrait nommer une liberté en situation.<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">Cela l’entraîne donc à agir « sans excuses », puisqu’il ne peut s’en remettre à rien ni à personne. Cette formule est intéressante, surtout pour la suite de notre analyse, car on perçoit déjà qu’elle engage la volonté de l’homme et par conséquent sa responsabilité. Cette liberté est une liberté sans condition. Or, qu’est-ce que ça veut dire ? On sait que la liberté a toujours été une notion très complexe à laquelle, depuis l’Antiquité, les philosophes ont attaché une grande importance et un grand soin à la penser de plusieurs manières : sous l’angle de la liberté politique, métaphysique, anthropologique. Sartre amène un tout nouveau volet à la notion de liberté, en la plaçant au-dessus de tout. De cette liberté ontologique, attachée essentiellement à l’homme, Sartre montre que l’homme ne peut se définir que par elle. L’homme est libre et il ne peut remettre en question cette liberté en se réfugiant dans des excuses de circonstances. Par exemple, durant l’occupation allemande, une personne ayant été contrainte de dénoncer un ami résistant à la Gestapo, ne peut se dédouaner de n’avoir eu d’autres choix que de se plier à ce qui était exigé d’elle, car elle avait le choix de ne pas répondre. Elle avait même le choix de ne pas choisir, puisque ne pas choisir est encore un choix. Il n’y a donc pas d’échappatoire à cette liberté. Ce que l’on doit sûrement entendre dans cette formule énigmatique pour la pensée, c’est que Sartre définit la liberté humaine d’un point de vue ontologique reposant sur le choix d’agir, Il s’agissait donc de comprendre dans cette première partie que l’absence de Dieu implique une liberté sans limite pour l’homme et sans excuses, ce qui entraîne la responsabilité des choix de l’homme. Quelles vont être les conséquences de cette nouvelle liberté humaine que Sartre nous présente ? <br /><br /></span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1092091" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/01/4045387759.jpg" alt="Jean-Paul Sartre, emmanuel kant, Nietzsche, fedor dostoïevski" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Sartre, en 1968</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">Sartre place l’homme au centre de sa propre liberté. Et il pose la condition même de cette liberté, ainsi que la conséquence. Il introduit l’inversion inédite d’une formule classique en philosophie, à savoir « l’essence précède l’existence ». Si l’on prend, au sens ontologique, le mot, « essence » que l’on peut rapprocher de la nature d’un être, on peut alors dire ce que c’est ce qui appartient nécessairement à l’être vivant ou la chose, c’est ce qui fait qu’un être est ce qu’il est, c’est ce qui constitue son identité, sa permanence par rapport à ce qui, en lui, est accidentel, lié aux circonstances, contingent. On peut dire par exemple, que l’homme est par essence un être mortel, qu’un coupe-papier est par essence, destiné à couper du papier, qu’il existe, mais avec ses caractéristiques propres (par exemple il est effilé, acéré, avec telle effigie, telle forme, telle matière, etc.) Cependant, qu’en est-il appliqué à l’homme ? C’est là où cette formule vient nous donner la réponse. Puisqu’on a vu dans la première partie que l’on ne pouvait plus présupposer l’existence d’un Dieu créateur, plus d’artisan de l’homme, alors l’homme commence par exister ; il surgit dans le monde, il se rencontre. Il continue sa phrase en nous expliquant que l’on ne trouve aucun concept d’homme préétabli auquel on pourrait et devrait se conformer. Il ne pourra jamais se référer à « une nature humaine donnée et figée ». En renversant la perspective classique depuis Platon, qui défend une approche essentialiste : l’essence précède l’existence, et qui engage la philosophie grecque et les philosophies suivantes à étudier l’Être, nous sommes alors engagés par Sartre à désormais étudier l’existence de l’homme et sa conséquence première, qui est la liberté. Si l’on fait un crochet par l’étymologie grecque « <em>Ex-sistere </em>», qui signifie : « se projeter hors de soi », cela revient alors à dire que <strong>l</strong><em>’homme existe en ce qu’il n’est rien de défini</em>, et qu’il devient ce qu’il a décidé d’être, ce qui semble peut-être plus éclairant. On comprend mieux pourquoi la notion de liberté apparaît à la suite de cette proposition. En effet, l’homme si l’homme n’a pas de « nature humaine » alors c’est qu’il crée son existence en se choisissant, ce qui reviendrait à dire qu’il est à l’inverse des objets qui ont une nature, une fonction déterminée, comme par exemple le coupe-papier dont on a parlé plus haut. Ainsi, l’homme est libre, il « est » liberté. Ce qui revient à dire que cette liberté l’habite, elle est coextensive à son être même. Il ne peut donc échapper à cette liberté. Échappant au déterminisme de la nature humaine, il n’y a pas de loi, pas de force extérieure, pas de contraintes qui pousse cet homme à agir plutôt dans ce sens ou dans cet autre sens. On peut alors parler d’une liberté pleine et entière, qui repose entièrement sur l’homme lui-même.<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">Or, s’il n’y a plus de nature humaine il n’y a plus de distinction préétablie du bien et du mal, et cela semble engager l’homme dans une exigence morale de la liberté, là encore totalement inédite. Sartre va d’ailleurs rappeler son hypothèse métaphysique en la reposant : « si [...] Dieu n’existe pas », est-ce l’on peut parler de dissolution des valeurs morales ? C’est donc bien à nouveau à ce débat moral que Sartre fait référence, mais pour le préciser cette fois-ci. On a vu qu’il avait éclairé la situation de l’homme, dont il a donné une définition stricte : « l’homme est liberté ». Or, prendre en charge sa liberté, c’est faire face dans un premier temps, à la désertion de toute morale ancienne, puisque tout ce qui a constitué jusqu’ici la morale, autrement dit les valeurs et les ordres, qui légitimaient notre conduite n’ont plus cours depuis que Dieu n’existe plus. C’est désormais à l’homme qu’il revient de prendre en charge ces valeurs-là. Ce qui peut nous intéresser en tant que lecteur, c’est que Sartre s’adresse à nous en nous montrant que si la liberté est désormais une valeur suprême pour nous Modernes, elle est aussi la source des valeurs, et ainsi, si la liberté humaine est à présent indépassable, car l’homme est liberté, il devient aussi la source des normes. On voit combien ce passage vient problématiser la morale, et même l’exigence morale qui a perdu depuis que Dieu n’existe pas toute signification ontologique. Plus rien ne peut légitimer les conduites humaines si ce n’est, les normes morales dont l’homme sera à l’origine.<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">Il n’est donc plus possible pour l’homme de trouver des valeurs pré-établies dans le ciel intelligible, qu’il lui suffirait simplement d’appliquer. Affranchies de ces anciennes valeurs, dissolues avec l’absence de Dieu, l’homme ne peut recourir à aucune justification ou ni excuse, puisqu’il détient aujourd’hui le pouvoir d’initier ou de commencer par lui-même toute action et d’en être véritablement l’auteur. Lorsqu’on lit Sartre, il nous semble que le ciel est vide, il n’y a donc pas plus de normes morales, pas plus de bien ni de mal <em>a priori</em>. En effet, il n’y a plus d’intellect suprême qui ait pu forger ces notions. C’est désormais à l’homme de décider ce qui est bien et de ce qui est mal, ainsi que de ce que doit être l’homme, puisqu’il est dans le monde « seul et sans excuses ».<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">Sartre part du sens ontologique de la liberté chez l’homme, afin de montrer que, dépossédé de toute nature humaine <em>a priori</em>, l’homme n’a pas d’autre alternative que d’aller chercher en lui les normes morales auxquelles il décide désormais de se référer pour agir ; il devient la seule source des normes et règles morales lorsqu’il décide d’agir. Or, qu’est-ce que cette idée engage ?<br /><br /></span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1092090" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/02/1695071827.jpeg" alt="Jean-Paul Sartre, emmanuel kant, Nietzsche, fedor dostoïevski" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Sartre et Beauvoir, dans les années 70</span><br /><br /></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">Une phrase, devenue célèbre, et qui synthétise à elle seule la philosophie de Sartre et le paradoxe de la liberté sartrienne, s'énonce ainsi : « l’homme est condamné à être libre ». De sa liberté, il ne peut s’en défaire. Elle le charge comme un fardeau. C’est sa terrible condamnation. Être libre pour l’homme, parce qu’il n’a pas de nature intrinsèque ou d’essence selon Sartre, et parce qu’il a une conscience est auto-réflexive, il est entièrement libre de se déterminer. On peut se demander comment cet homme peut bien être ainsi libre, sans nature humaine, puisqu’il ne s’est pas créé lui-même ; par-là il partage avec l’objet, qui lui est déterminé par son essence, comme par exemple l’arbre qui n’est pas libre de choisir son destin et doit vivre sa vie selon sa nature, on ne peut évidemment pas dire qu’un arbre est « condamné à être libre ». Alors, qu’est-ce qui distingue l’homme de l’arbre ? L’homme à sa différence est « jeté dans le monde » : il va d’abord exister en tant qu’existant, puis se définir ensuite, ce qui correspond à l’étymologie du mot « <em>Ex-ister </em>» : être hors de : hors du (néant). Si l’homme n’a donc pas d’essence, il est par conséquent « responsable de tout ce qu’il fait », nous dit Sartre à ce moment clé du texte. On voit que la notion de responsabilité, qui renvoie à celle de la morale, souligne combien le fait pour l’homme de se trouver être <em>projet</em>, le condamne à la liberté sans rémission, et va le forcer de <em>choisir</em>, c’est-à-dire, qu’il sera devant le choix d’endosser l’habit d’un personnage parmi une multitude (bourreau/médecin/écrivain/avocat), mais aussi qu’il sera obligé de choisir, puisque la vie lui fait obligation de choisir de vivre à la façon de tel ou tel personnage, ce qui l’oblige à assumer la pleine responsabilité de ses actes.<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">On a ensuite l’impression que, face aux adversaires de la liberté, Sartre enfonce le clou : contre ceux qui pourraient invoquer le mobile de la passion, qui conduirait les hommes à commettre certains actes, comme en présence d’une situation proprement inhumaine, la guerre par exemple, toutes les atrocités commises ; pour Sartre, nous avons une responsabilité au-delà de tout, c’est-à-dire, même face à une situation qui nous déborderait. Ce passage est important, parce que nous serions tentés de reprocher à Sartre de nous charger d’une liberté trop puissante comme on voudrait nous obliger à enfiler un costume bien trop grand pour nous. On peut évidemment penser au cas Eichmann, qui a signé des ordres de déportation de milliers de juifs vers les camps de la mort et qui n’a jamais pensé ne serait-ce qu’un instant à la dangerosité de son obsessionnelle obéissance au devoir, ou un soldat, absorbé, avalé ou encore annihilé par la meute que représente un bataillon, ou la spirale infernale des combats, au moment des assauts, des actes de tortures, etc., On peut lui reprocher de n’avoir pas déserté, ou désobéit aux ordres de ses supérieurs. La question est alors, que faisons-nous de la contagion émotionnelle, de la complexité des modes d’intériorisation de la dépendance à un groupe, non plus composé de subjectivités libres et autonomes, mais d’un mouvement global, aveugle et pulsionnel, fût-il précisément destructeur et cruel ? Sartre nous dit, en dépit des objections, que nous devons reconnaître cette conception radicale de la responsabilité. Malgré tous ces arguments, l’homme est liberté, et en ce sens, il doit reconnaître son entière responsabilité dans le choix de ses actes. C
Marc Alpozzo
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Faire de sa vie une oeuvre d'art. Note sur Sartre
tag:marcalpozzo.blogspirit.com,2021-05-18:3165982
2021-05-18T06:00:00+02:00
2021-05-18T06:00:00+02:00
On aura beau chercher à se débarrasser de Sartre , l'entreprise semble...
<p style="text-align: justify;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">On aura beau chercher à se débarrasser de <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/jean-paul-sartre/" target="_blank" rel="noopener">Sartre</a></span>, l'entreprise semble impossible tant sa philosophie est porteuse de quelque chose d’universel. Cette liberté radicale, qui nous incombe comme un fardeau, et dont l’homme tire toute sa responsabilité, est sûrement ce qu’il y a de plus pénible à reconnaître. C'est pénible, car cela nous frappe de frayeur. Et pourtant, il y a quelque chose d’indéniable dans la philosophie de Sartre : il a su <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2013/09/17/l-humanisme-de-sartre-2978158.html" target="_blank" rel="noopener">redéfinir l’homme à la sortie de la Seconde Guerre mondiale</a></span>, et cela, de manière presque définitive. Ce qu’il a montré, et qui peut déranger la pensée moderne qui n’est peut-être pas encore prête, c’est que <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2011/11/03/l-angoisse-de-l-homme-libre-ou-l-absence-de-dieu-dans-la-phi.html" target="_blank" rel="noopener">l’homme n’est pas définissable à l'avance</a></span>. <a href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/sartre" target="_blank" rel="noopener"><span style="color: #800000;">J'ai déjà beaucoup écrit sur la philosophie de Sartre</span></a>. Je profite de ce billet pour faire un point essentiel sur sa doctrine. En accès libre dans l'<span style="color: #800000;"><em>Ouvroir</em></span>. </span></strong></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/01/1042798455.jpg" id="media-1105346" alt="" /></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Cette prise de position très affirmée de la part de Sartre, concerne précisément l'idée qu'il existerait une nature humaine, c'est-à-dire une essence de l'homme, une définition éternelle de l'homme dont ce dernier ne pourrait pas sortir et qui le contraindrait à vivre d'une seule façon possible. Or, on trouve une opposition ferme de la part de Sartre dans sa philosophie à cette idée. Et il le démontre, en partant du principe qu'« il est impossible de trouver en chaque homme une essence universelle qui serait la nature humaine, ». Certes, s’il ne remet pas pour autant en cause l'idée qu'il puisse y avoir une universalité humaine, il faut toutefois noter cette nuance qui prête à penser que cette universalité réside dans la condition de l'homme et non dans sa nature. Aussi, l'universalité de l'humanité ne réside pas dans une nature humaine qui serait composée de caractères invariables, communs à tous les hommes, dont ils ne pourraient sortir et qui limiteraient leur liberté, mais dans une condition qui se définit comme le cadre général à l'intérieur duquel peut s'exercer la liberté de l'homme.<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Aussi, par <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2008/03/12/le-fardeau-de-la-liberte-note-sur-sartre.html" target="_blank" rel="noopener"><em>condition de l'homme,</em></a></span> il nous faut entendre : « l'ensemble des limites <em>a priori</em> qui esquissent sa situation fondamentale dans l'univers. ». Mais qu’est-ce que cela signifie ? Précisément, que la liberté de l'homme est limitée, mais que cette condition définit <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2016/08/31/sartre-ou-la-liberte-angoissante-3078895.html" target="_blank" rel="noopener">le contexte dans lequel cette liberté va pouvoir s'exercer</a></span>. Si par exemple « les situations historiques varient », on notera toutefois que la manière dont le sujet va se comporter dans un contexte donné ne sera pas déterminée par celui-ci, mais dépendra de son seul choix. Ainsi, on ne choisit certes pas de « naître esclave dans une société païenne ou seigneur féodal ou prolétaire. », mais néanmoins, on est responsable de la manière dont on va vivre sa condition historique et sociale. D’où cette lourde insistance de la part de Sartre sur ce qui fait l'universalité de l'humanité, et qui ne sont jamais des caractéristiques innées que tous les hommes posséderaient par nature, mais le fait qu'ils soient tous plongés dans un monde dans lequel ils doivent accomplir leur existence comme projet.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: center;"><img id="media-1105347" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/01/3983549474.jpg" alt="tinamen.jpg" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">5 juin 1989, boulevard de Tiananmen square, Chine</span></p><p style="text-align: center;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">De fait, ce que je suis n'est pas défini à l'avance par une nature quelconque ; cela résulte en réalité, de la manière dont on choisit d'affronter le monde ; <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2020/04/30/l-anthropologisation-du-neant-chez-sartre-3148534.html" target="_blank" rel="noopener">les limites inhérentes à ma condition ne sont pas infranchissables</a></span> ; ma liberté me permet de « franchir ces limites », de « les reculer ou [...] les nier » ou de m'« en accommoder ». C’est donc la notion de condition de l'homme que l’on doit creuser pour comprendre comment Sartre a choisi de traiter de la question de l'universalité humaine, puisqu’en désignant le cadre dans lequel l'homme conduit son existence et la construit comme projet, elle ne l'enferme pas dans des limites qu'il ne devrait pas dépasser. La critique sartrienne de la notion de nature, ne permet alors plus aucun alibi pour imposer une norme et limiter la liberté de l'homme. C'est aussi au nom de cette soi-disant nature de l'homme que l'on a pu juger et condamner certains comportements hors-normes comme contre-nature, que l'on a pu imposer un certain conformisme social et intellectuel.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">C’est ainsi que la notion de condition de l'homme nous permet de penser qu'il n'y a pas une seule façon d'être homme et que chaque être humain peut choisir ce qu'il fera de son existence, rien en lui n'est défini à l'avance, il n'est que ce qu'il devient, ce qu'il choisit de devenir dans certaines conditions données. Sartre prétend même que nous sommes totalement libres du fait même que nous sommes conscients d'exister ; que cette conscience fait de chacun de nous un être qui sans cesse se crée et construit son existence comme projet. Et, par la conscience, nous nous distancions de nous-mêmes et du monde, nous n'adhérons plus parfaitement à ces réalités, et de ce fait nous nous dégageons de la nature et de ses déterminismes pour nous réaliser comme liberté.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">On peut donc difficilement affirmer qu'il existe une nature de l'homme, et qu'il n'est pas fondamentalement libre ; c'est plutôt parce qu'il est fondamentalement libre qu'il n'y a pas à proprement parler de nature de l'homme, il y a une condition de l'homme conscient de son existence dans le monde parmi d'autres consciences.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><span style="color: #800000;"><strong>À voir aussi :</strong></span><br /><iframe width="480" height="270" src="https://www.youtube.com/embed/2j87vUSadHg?feature=oembed" frameborder="0" allow="accelerometer; autoplay; clipboard-write; encrypted-media; gyroscope; picture-in-picture" allowfullscreen="allowfullscreen"></iframe></span></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Jean-Paul SARTRE : l'écrivain, l'intellectuel <br />et le politique (Interview à Radio-Canada)</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p><span style="color: #800000;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Pour mémoire dans l'Ouvroir : </span></strong></span></p><h1><a href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2011/11/03/l-angoisse-de-l-homme-libre-ou-l-absence-de-dieu-dans-la-phi.html"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt; color: #800000;">L’angoisse de l’homme libre ou l’absence de Dieu dans la philosophie de Sartre</span></strong></a></h1><h1><span style="color: #800000;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2008/03/12/le-fardeau-de-la-liberte-note-sur-sartre.html" target="_blank" rel="noopener"> Le fardeau de la liberté, note sur Sartre </a> </span></span></strong></span></h1><h1><strong><a href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2016/08/31/sartre-ou-la-liberte-angoissante-3078895.html"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt; color: #800000;">Sartre ou la liberté angoissante</span></a></strong></h1><p><span style="color: #800000;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">En ouverture : <br />« Sartre, Beauvoir et les Vian au bistro » photo D. R. </span></strong></span></p>
Marc Alpozzo
http://marcalpozzo.blogspirit.com/about.html
Que reste-t-il de Sartre ? La responsabilité morale et collective
tag:marcalpozzo.blogspirit.com,2021-05-10:3165978
2021-05-10T06:00:00+02:00
2021-05-10T06:00:00+02:00
On trouve dans la conférence de 45 de Sartre , l' Existentialisme est...
<p style="text-align: justify;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">On trouve dans la <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2019/07/06/le-sartre-dannie-cohen-solal-ou-une-conscience.html" target="_blank" rel="noopener">conférence de 45 de Sartre</a></span>, l'<em>Existentialisme est un humanisme</em>, une réflexion à propos des choix que nous faisons dans notre existence. Aussi est-ce à la fois intéressant et intriguant. En effet, quelle est sérieusement la portée de ces choix ? Et quelle est l'étendue de notre pouvoir de choisir ? Si l’on s’en tient à la thèse de Sartre, nous pouvons dire que les choix que nous faisons construisent notre identité, définissent ce que nous sommes. Ils ont pourtant une autre portée tout à fait considérable, puisque selon <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/jean-paul-sartre/" target="_blank" rel="noopener">Sartre</a></span>, nos choix engagent également les autres. Pouvons-nous admettre cette thèse ? Selon le célèbre philosophe français, nous sommes non seulement responsables de nous-mêmes, mais aussi de tout un chacun. De quoi alourdir le <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2013/09/17/l-humanisme-de-sartre-2978158.html" target="_blank" rel="noopener">fardeau de notre responsabilité</a></span> vis-à-vis d'autrui, et charger cette liberté sans appel qui nous incombe. Je fais un point dans l'<span style="color: #800000;"><em>Ouvroir</em></span>. </span></strong></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/01/2737573824.jpg" id="media-1105332" alt="" /></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">« Quand nous disons que l'homme se choisit, nous entendons que chacun d'entre nous se choisit, mais par là, nous voulons dire aussi qu'en se choisissant il choisit tous les hommes », écrit Sartre, et ce qui revient à dire, que l'homme est à la fois responsable de lui-même (en se choisissant), mais qu’il est aussi responsable des autres (puisqu’en se choisissant il choisit tous les hommes). Voilà une articulation morale et philosophique qui n’est pas aisée pour la pensée. Voyons de plus près. Sartre affirme d'abord que « l'homme se choisit ». De cette affirmation générale, qui vaut pour tout homme, pour « chacun d'entre nous » précise Sartre, cela engage alors notre capacité de se choisir qui est <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2020/03/29/la-proximite-et-la-distance-de-la-conscience-note-sur-sartre-3148556.html" target="_blank" rel="noopener">une propriété essentielle des hommes</a></span>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Selon Sartre, l'homme se caractérise par son libre-arbitre. Mais si l'homme choisit, que choisit-il en réalité ? L'homme choisit ce qu'il est. Rappelons peut-être que la liberté dans la philosophie de Sartre est radicale et sans excuses. Que l’homme est toujours libre de choisir, et qu’il ne peut pas ne pas choisir. Pourtant, lorsque l’homme choisit, il doit aussi se demander : « qu'est-ce que je suis ? ». Puis-je choisir de croire ou de ne pas croire une idée si je ne suis pas convaincu ? Puis-je choisir de désirer ou de ne pas désirer quelque chose si je ne désire pas cette chose ? Je dois être naturellement convaincu de la vérité d'une idée pour pouvoir y croire, et je ne peux pas décider d'être convaincu. En choisissant par exemple mes lectures, en changeant ma manière de vivre, en exerçant ma réflexion, je peux modifier ce qui me caractérise en tant qu'esprit. C’est ainsi que l’on doit comprendre l'expression « choisir tous les hommes » sur le même modèle que l'expression « se choisir ».</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: center;"><img id="media-1105333" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/01/3805205402.jpg" alt="jean-paul-sartre-a-milano-en-1961.jpg" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Jean-Paul Sartre à Milan, en 1961</span></p><p style="text-align: center;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Or, levons un malentendu : « Se choisir » ne signifie pas que l'on s'est choisi soi-même pour réaliser quelque chose. En réalité, « Se choisir » veut dire en fait « choisir ce que je suis ». Par conséquent, on peut proposer que « choisir tous les hommes » signifie « choisir ce que sont tous les hommes ». Si l’on dépasse alors le paradoxe à savoir en choisissant ce que je suis et en me choisissant, je choisis ce que sont tous les hommes, comment les autres peuvent-ils par eux-mêmes choisir ce qu'ils sont, puisque j'ai choisi ce qu'ils sont ? Nous pouvons probablement arriver à cette idée : je suis responsable de moi-même lorsque je me choisis), aussi, je suis responsable des autres, puisque je ne peux être responsable que de ce que je choisis, ou du moins que de ce qui découle de mes choix ; en affirmant que je choisis les autres, Sartre cherche à exprimer l'idée que je suis responsable des autres.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Cette affirmation de la responsabilité morale que nous avons vis-à-vis de ce que nous sommes relève de l’idée que notre identité et notre essence ne sont pas définies à l'avance ; que c'est dans notre existence, par nos choix que nous construisons ce que nous sommes. Parce que chez l'homme, « l'existence précède l'essence », on voit que selon Sartre toute dénégation de la responsabilité de l'homme devient impossible ; sauf à recourir à la « mauvaise foi ». Si j’affirme ce que je suis comme étant le résultat de mon enfance, ou des conditions sociales dans lesquelles je vis, ce que je fais pour Sartre, c’est que <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2011/01/07/sartre-et-le-regard-d-autrui-1.html" target="_blank" rel="noopener">je nie cette liberté fondamentale que chacun a de choisir ce qu'il est.</a></span> Or, si je puis choisir ce que je suis, c'est parce que ce que je suis n'est pas essentiellement défini par mes caractéristiques physiques, ni même par mes croyances ou mes désirs. Ce qui fait ce que je suis, ce sont les valeurs que j'accepte comme telles. Aussi, il est à noter que ces valeurs n'ont de sens pour moi que parce que je les choisis, et en les choisissant, je contribue à rendre légitime aux yeux des autres un tel choix. Par conséquent, j'engage par mes choix les autres.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Notre pouvoir de choisir est considérable, et Sartre nous invite à réfléchir à la manière dont nous vivons et aux fausses excuses que nous utilisons pour éviter d'affronter les questions existentielles de notre propre identité, personnelle et collective.<br /><br /></span></p><p style="text-align: center;"><span style="color: #800000;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">À voir aussi :</span></strong></span><br /><iframe width="480" height="270" src="https://www.youtube.com/embed/Fe91KVvGG2I?feature=oembed" frameborder="0" allow="accelerometer; autoplay; clipboard-write; encrypted-media; gyroscope; picture-in-picture" allowfullscreen="allowfullscreen"></iframe></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Enterrement de Sartre, 21 avril 1980</span></p><p style="text-align: center;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="color: #800000;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Pour mémoire dans l'Ouvroir :</span></strong></span></p><h1><span style="color: #800000;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2013/09/17/l-humanisme-de-sartre-2978158.html">L’humanisme de Sartre</a></span></strong></span></h1><h1><strong><a href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2020/03/29/la-proximite-et-la-distance-de-la-conscience-note-sur-sartre-3148556.html"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt; color: #800000;">La proximité et la distance de la conscience. Note sur Sartre</span></a></strong></h1><h1><a href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2011/01/07/sartre-et-le-regard-d-autrui-1.html"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt; color: #800000;">Sartre et le regard d'autrui</span></strong></a></h1><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="color: #800000;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">En ouverture : <br />l'enterrement de Sartre © Patrick Frilet / Sipa</span></strong></span></p>
Marc Alpozzo
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Sartre ou Heidegger. Philosophie de l'angoisse
tag:marcalpozzo.blogspirit.com,2020-06-27:3148580
2020-06-27T06:00:00+02:00
2020-06-27T06:00:00+02:00
Je vais tenter d’exposer le double visage de la phénoménologie de...
<p style="text-align: justify;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Je vais tenter d’exposer le double visage de la phénoménologie de l’angoisse. Celle de <a href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/sartre" target="_blank" rel="noopener"><span style="color: #800000;">Sartre</span></a> et celle de <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/martin-heidegger/" target="_blank" rel="noopener">Heidegger</a></span>, dont j'ai abondamment parlé dans ces pages.</span></strong></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/00/4141573067.jpg" id="media-1087265" alt="" /></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">La question sous-jacente à toute cette <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2018/02/02/le-dasein-au-milieu-du-monde-une-experience-de-l-appartenanc-3101493.html" target="_blank" rel="noopener">recherche</a></span>, menée dans ce blog, n’était donc pas spécifiquement Sartre <em>ou</em> Heidegger, mais quelle voie la phénoménologie a-t-elle prise en ce qui concerne l’<span style="color: #ff0000;"><a style="color: #ff0000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/l%27angoisse" target="_blank" rel="noopener"><span style="color: #800000;">angoisse</span></a></span>. Il s’avère que Sartre a systématiquement tenté de se démarquer de Heidegger. Il s’avère également qu’une alternative entre les deux penseurs s’est naturellement imposée à notre regard.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Au moment de conclure, il ne s’agit pas de spécifiquement prendre parti, mais de distinguer les analyses, les doctrines, et de faire un premier bilan. <span style="color: #ff0000;"><a style="color: #ff0000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/jean-paul+sartre" target="_blank" rel="noopener"><span style="color: #800000;">Sartre</span></a></span> contre <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/heidegger" target="_blank" rel="noopener">Heidegger</a>,</span> a établi une métaphysique de la <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2008/03/12/le-fardeau-de-la-liberte-note-sur-sartre.html" target="_blank" rel="noopener">liberté</a>,</span> lorsque le second avait pris soin d’établir une<span style="color: #800000;"> </span><span style="color: #ff0000;"><span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2020/03/29/l-emergence-du-dasein-ou-de-l-absence-a-la-presence-dans-etr-3148542.html" target="_blank" rel="noopener">métaphysique de l’être</a></span> </span>susceptible de nous conduire à la liberté, ou tout du moins à la libération.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Contre Heidegger, Sartre croit naïvement, si j'ose dire, que le <em>cogito</em> doit être sauvegardé, qu’il s’agit de se tourner vers l’homme, et d’établir une philosophie anthropologique, dans laquelle les consciences entrent en conflit pour entretenir le principe fondamental qui sous-tend toute existence humaine : la liberté.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> Mais ce refus de l’autre ne peut être tout à fait pris au sérieux. D’une part, Sartre n’est pas <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2014/03/03/hegel-le-vrai-est-le-tout-3139616.html" target="_blank" rel="noopener">Hegel</a></span>. Les morceaux de bravoure qui mettent en scène un homme sartrien puissant et maître de lui-même contre le déterminisme élémentaire prêtent plutôt à sourire, – la caricature d’une sorte de dernier romantique, chevaleresque et halluciné se doit d’être ici soulignée –, et rappellent décidément trop le <em>pathos</em> d’une philosophie, recherchant par dessus tout à se défaire du tragique de l’existence, et qui œuvre pour trouver une place, très inconfortable, soit dit en passant, à l’homme dans un monde, <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2011/11/03/l-angoisse-de-l-homme-libre-ou-l-absence-de-dieu-dans-la-phi.html" target="_blank" rel="noopener">où Dieu serait définitivement absent</a>.</span> D’autre part, la rigidité métaphysique à laquelle Sartre se livre, pour mettre à jour une <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2016/08/31/sartre-ou-la-liberte-angoissante-3078895.html" target="_blank" rel="noopener">liberté absolue</a></span>, inconditionnée et sans limite, emprisonne son discours dans une philosophie à la fois artificielle et aliénante. En effet, là où Sartre prétendait nous donner la liberté, il nous la ôte en réalité, faisant de la conscience un moi en suspend, ou plus précisément un moi suspendu à la liberté et au <span style="color: #ff0000;"><a style="color: #ff0000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2011/01/07/sartre-et-le-regard-d-autrui-1.html" target="_blank" rel="noopener"><span style="color: #800000;">regard</span> <span style="color: #800000;">d’autrui</span></a></span><span style="color: #800000;">.</span> Dans sa trajectoire, le <em>Soi</em> devient ainsi insaisissable, et le même se confond alors avec l’Autre, c’est-à-dire que le <em>moi</em> ne parvient jamais à se découvrir entièrement, toujours dépendant du regard aliénant et contradictoire d’autrui. Ce moi, à jamais perdu, semble-t-il, nous revient alors, sous forme de fantôme, par la présence de l’Autre. Mais ça n’est pas l’<span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2020/04/15/l-ethique-de-la-conscience-note-sur-levinas.html" target="_blank" rel="noopener">Autre du même</a>,</span> car toute l’articulation sartrienne autour de l’en-soi et du pour-soi, a rendu caduque la tentative transcendante de concilier l’en-soi et le pour-soi dans une toute nouvelle forme d’être-au-monde.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Aussi, la recherche philosophique que j'ai menée, à tenter d’établir une phénoménologie de l’angoisse à partir de la doctrine de Sartre, qui nous a présenté une la liberté quelque peu douteuse, par laquelle les choix libres créent l’essence de l’individu, mais dont l’affirmation de cette liberté inconditionnée demeure une difficulté philosophique majeure, tant elle ne semble pas en toute circonstance totalement réaliste. Qui plus est, l’angoisse qui s’y rattache, ne paraît en conséquence, guère profonde. Car il semble, puisque le concept d’angoisse ne peut être précisé qu’à partir de la liberté, et que le concept de néant n’est autre que la conscience elle-même, que Sartre tend à purifier l’homme moderne de toute cause déterministe extérieure, afin de libérer sa totale souveraineté, et de le définir à partir de ses expériences les plus intimes. Dans la réalité de cette philosophie, le retour aux choses mêmes se heurtent à une liberté fascinée par sa propre image : en effet, qui est véritablement libre, le moi ou l’Autre qui est constamment présent en lui, par la violence de son regard, au point de le transformer en une ipséité pathétique ?</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Il nous faudra probablement prendre la précaution de suivre la piste heideggérienne de l’angoisse, et ainsi réhabiliter la doctrine du <em>Mitsein</em> (être-avec). <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2018/02/02/le-dasein-au-milieu-du-monde-une-experience-de-l-appartenanc-3101493.html" target="_blank" rel="noopener">Etre-au-monde <em>avec</em> les autres</a> </span>n’a rien d’aliénant. Dans cette coexistence, nous commençons par faire connaissance avec le monde de la préoccupation et de l’inauthenticité, c’est-à-dire la « dictature du On ». Notons toutefois que cette coexistence, comparée à la relation sartrienne de conflits permanents que je puis avoir avec l’autre, se montre ici toute pacifique, une tension certes s’installant : celle d'une double possibilité : être-soi, ou être soumis à la domination des Autres, mais ça n’est pas un conflit ouvert, où l’autre persécuterait le moi, l’empêchant ainsi de se réaliser en tant qu’Autre du même, parce que le contenant ainsi sous le joug de son regard comme chez Sartre ; ce serait plutôt une possibilité propre pour le <em>Dasein</em> de se ranger du côté du monde de la préoccupation et de la fuite dans l’indifférence du « On », ou choisir de lutter pour ad-venir à soi, dans le pouvoir-être-propre.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">À la différence de Sartre donc, dans le monde heideggérien, je ne suis pas soumis désespérément à la rencontre avec autrui, mais je commence au départ par ne pas être moi-même, c’est-à-dire je commence par <em>participer </em>du On-même. Aussi, là où l’interprétation de l’angoisse souffrait d’une certaine pauvreté philosophique chez Sartre, elle trouve chez Heidegger, une profonde importance, et une lumière encore jamais atteinte jusqu'au penseur allemand. Pour trouver la libération, parvenir au soi-même, il ne s’agit pas, comme pour Sartre de concentrer toute sa philosophie autour de la conscience et de la saisie du néant comme activité néantisante, mais de revenir au monde, et de saisir le néant dans le monde. Je ne suis désormais plus <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2011/01/07/la-nuit-de-l-angoisse-note-sur-heidegger.html" target="_blank" rel="noopener">angoissé de ne pas être ce que je suis</a>,</span> et d’être ce que je ne suis pas, mais je suis dès à présent, confronté au Rien de l’angoisse, qui est véritablement le mouvement de saisie de l’ouverture au monde et à moi-même.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">De plus, en ne refusant ni Autrui ni la mort, mais en les analysant longuement, Heidegger réussit le pari philosophique de réconcilier le <em>Dasein</em> avec le monde et avec lui-même. En étudiant la présence et l’absence du <em>Dasein</em> dans le monde, Heidegger établit une relation saine avec l’Autre dans l’être-avec, et permet au <em>Dasein</em> de se comprendre comme l’être-pour-la-mort, ce qui lui donne enfin, l’autorisation de s’en libérer.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Bref, faire <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2011/01/07/la-nuit-de-l-angoisse-note-sur-heidegger.html" target="_blank" rel="noopener">l’expérience de l’angoisse pour Heidegger</a>,</span> c’est faire l’expérience de la possibilité certaine de sa mort prochaine, c’est faire l’expérience du Rien comme possibilité actuelle de mon pouvoir-ne-pas-être, c’est se confronter et s’arracher à la peur et à la fuite de soi, et s’accepter, dans le passage de soi à soi-même, comme sa propre possibilité dé-voilante, et ainsi trouver une issue à la fatalité de l’existence, en l’acceptant pour définitivement s’en détacher.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Bien souvent, le destin que l’homme antique cherchait à fuir, en précipitait la réalisation : refusant ainsi de reconnaître que l’homme pourrait être soumis à des forces plus puissantes que lui, Sartre est parvenu à faire de l’homme, un être parfaitement impuissant, profondément aliéné et tourmenté. Dans ce refus d’une histoire écrite à l’avance, Sartre n’a pas vu que Heidegger ne se soumettait pas à la possibilité irréversible d’un fatalisme de l’existence, mais qu’il avait compris que la liberté nous était donnée par l’être lui-même, et qu’il s’agissait pour l’homme de revenir à l’être, et de se comprendre dans sa radicale passivité.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">La crise d’angoisse sartrienne ayant été cette crise salvatrice et profonde qui donna l’occasion à l’homme de se choisir désormais libre et paisible au sein du monde. Or, n’est-ce pas là le rôle de la philosophie de nous réconcilier avec le monde et avec nous-mêmes.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: center;"><img id="media-1087266" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/01/3195031887.jpg" alt="heidegger champs.jpg" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Heidegger dans ses terres</span></p><p style="text-align: justify;"> </p>
Marc Alpozzo
http://marcalpozzo.blogspirit.com/about.html
L’anthropologisation du Néant. Note sur Sartre
tag:marcalpozzo.blogspirit.com,2020-04-30:3148534
2020-04-30T11:51:00+02:00
2020-04-30T11:51:00+02:00
Il nous faut montrer comment le néant apparaît sur fond d’interrogation...
<p style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">Il nous faut montrer comment le néant apparaît sur fond d’interrogation sur l’être, c’est-à-dire montrer comment la non-coïncidence à soi est possible parce que le pour-soi secrète en lui du néant. Voici une autre longue étude sur la philosophie de <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/sartre" target="_blank" rel="noopener">Sartre</a></span>, en accès libre dans l'<span style="color: #800000;"><em>Ouvroir</em></span>.</span></strong></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/00/1620735297.jpeg" id="media-1087261" alt="" /></p><p align="center"><strong> </strong></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong> <span style="font-size: 14pt;">1. </span></strong></span><span style="font-size: 14pt;"><strong style="font-family: georgia, palatino, serif;">Le non-être hante l’être ou la fissure ontologique</strong></span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Nous sommes parvenus là, à un point capital de <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2016/08/31/sartre-ou-la-liberte-angoissante-3078895.html" target="_blank" rel="noopener">notre recherche</a></span> : c’est la description dialectique du néant dont le principe serait que l’être puisse être son propre néant. Aussi, voilà l’occasion de faire un premier point important pour la suite de notre démonstration : à la différence de Heidegger qui s’intéresse essentiellement à l’être, Sartre porte un intérêt spécifique à l’homme, et dessine avec <em>L’Être et le Néant</em>, une philosophie anthropologique, c’est-à-dire que le philosophe français occupe toute son œuvre à interroger la « totalité qu’est l’homme dans-le-monde » (EN, p. 38), questionnant à la fois la place de l’homme au sein du monde, et ses comportements, ainsi décidé à saisir le sens profond de leur relation. Or, s’il lui faut, pour ce faire, questionner le rapport synthétique qui unit l’homme et le monde, cette interrogation anthropologique ne sera possible que sur fond de questionnement métaphysique à partir de l’existence du néant. Cette question apparaît d’ailleurs dès la partie du livre, – spécifiquement intitulée « Le problème du néant »<a href="#_ftn1" name="_ftnref1">[1]</a>. Essayons de suivre le philosophe pas à pas.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Première idée sartrienne : le non-être apparaît toujours dans les limites d’une attente humaine. Prenons l’exemple de notre auteur : lorsque je cherche Pierre dans un bar et que je ne trouve pas Pierre, je suis là en train de poser la possibilité de trouver Pierre dans ce bar, ce qui prouve que, dans mon rapport au monde, « le monde ne découvre pas ses non-êtres à qui ne les a d’abord posés comme des possibilités » (EN, p. 41). Tâchons de comprendre : lorsque je cherche Pierre dans un bar, et que je me demande s’il s’y trouve, quelles sont en réalité les questions que je me pose : 1) je pose la question du rapport de l’homme et de l’être-en-soi ; 2) j’interroge l’être même, susceptible, dans cette situation par exemple, de fournir une réponse négative. Or, à ce propos que nous dit Sartre ? Si la négation se pose à partir du questionnement, elle ne relève pas de la « qualité du jugement » donc de la subjectivité. Cherchant Pierre, j’interroge par le regard, par le geste. J’interroge en questionnant. De fait, à ce moment-là, qu’attends-je si ce n’est un « dévoilement de l’être », acceptant dans le même temps l’éventualité d’un non-être, c’est-à-dire une « compréhension préjudicative » du non-être. On constate alors que c’est dans l’interrogation, le sens de la question, que l’on trouve ce que le dévoilement de l’être autorise à savoir le transcendant du non-être.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Deuxième idée sartrienne : l’être n’est donc pas partout. Certes, l’être est absolu en ce sens qu’il s’impose à la conscience, mais elle peut l’interroger, et s’il en est ainsi, c’est qu’il n’est pas tout. Parce que l’être peut répondre aux questions de la conscience par un « oui » ou par un « non », on peut alors dire que l’être est « hanté » par le non-être, par le néant. C’en est la condition nécessaire.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Troisième idée : pour le pour-soi, étant en perpétuel décalage avec lui-même, – par la présence même du Néant qui sépare le pour-soi de soi –, la temporalisation de la conscience joue un grand rôle à partir du manque qui la hante et la condamne à une fuite perpétuelle. En effet, à la différence de l’être en-soi qui est a-temporel, au sein du pour-soi s’entrecroisent deux dimensions : la temporalité horizontale qui permet au pour-soi d’avancer dans le temps en changeant<a href="#_ftn2" name="_ftnref2">[2]</a> ; la temporalité verticale qui projette le pour-soi dans le monde auprès de ce qui n’est pas lui. Cette possibilité là de se transcender<a href="#_ftn3" name="_ftnref3">[3]</a> suppose d’abord que l’on peut admettre que le monde est radicalement autre que ce que l’on est.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Désormais nous pouvons comprendre que l’étonnement, le questionnement, l’interrogation philosophique sont rendus possibles par le Néant. L’existence de la négation étant impérative sans quoi l’on ne pourrait interroger l’Être ; le Néant doit nous être donné d’une manière ou d’une autre<a href="#_ftn4" name="_ftnref4">[4]</a>. Aussi, pour progresser, nous faut-il comprendre à présent trois points fondamentaux concernant l’identité même du Néant :</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>1)</strong> Ni « en dehors » de l’être, ni « notion complémentaire et abstraite » à l’être, le Néant n’a de réalité propre ni ne précède l’être ; il en est la donation même. Le Néant existe au sein même de l’être.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>2)</strong> Le Néant est au cœur de l’être, sans quoi des réalités – que Sartre appelle « négatités » – telles l’absence, la distance, l’altérité, etc. ne pourraient exister.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>3)</strong> L’Être est et le Néant n’est pas. Ils vivent indépendamment l’un de l’autre. Mais seul l’Être « peut se néantiser ». C’est-à-dire que, pleinement positif, l’Être n’implique pas le Néant, mais dans leur rapport mutuel, il permet au Néant de se néantiser<a href="#_ftn5" name="_ftnref5">[5]</a>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Aussi, est-ce précisément par cette fissure ontologique que la liberté vient au monde. Nous allons à présent le démontrer.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: center;"><img id="media-1090652" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/00/478945654.jpeg" alt="jean-paul sartre" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Le grand oeuvre de Sartre, paru en 1943</span></p><p style="text-align: center;"> </p><p><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 14pt;"><strong>2. L’homme ou l’être par qui le néant arrive dans le monde </strong></span></p><p><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong> </strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">On vient d’établir que le non-être « hante » l’être. Il nous faut à présent montrer que c’est par l’homme que le non-être arrive au monde. À ce propos, Sartre nous dit : « Il est évident que le non-être apparaît toujours dans les limites d’une attente humaine. C’est parce que j’attends à trouver quinze cents francs que je <em>n’</em>en trouve <em>que</em> treize cents. C’est parce que le physicien <em>attend</em> telle vérification de son hypothèse que la nature peut lui dire non. Il serait donc vain de nier que la nature peut lui dire non. Il serait donc vain de nier que la négation apparaisse sur le fond primitif d’un rapport de l’homme au monde ; le monde ne découvre pas ses non-êtres à qui ne les a d’abord posés comme des possibilités. »<a href="#_ftn6" name="_ftnref6">[6]</a> Essayons de comprendre. L’être ne se nie pas lui-même. Il ne s’exprime pas non plus. Il est. Seul l’homme peut, par son pouvoir de création et de transformation, se nier, se transformer. Pour cela, l’homme formule un dessein. Il questionne le monde qui l’entoure. Il interroge la nature et s’interroge par la même occasion. C’est dans cette seule logique que nous pouvons comprendre le propre de la négation. En interrogeant le monde ou un objet en particulier, l’homme, par sa qualité de jugement, donne une valeur à ce qu’il interroge. Par exemple, si ma voiture a une panne, ou ma montre est à l’arrêt, je vais interroger le carburateur ou les bougies de la voiture, le mécanisme de la montre ; je vais interroger le mécanicien ou l’horloger. Je n’attends bien sûr pas un jugement de leur part mais un « dévoilement d’être » à partir duquel je pourrai alors formuler un jugement. Pour résumer, lorsque j’interroge l’être d’une chose, je prends le risque d’un « dévoilement d’être » comme celui d’un « non-être ». Par exemple, ma montre pourrait ne <em>rien</em> avoir. Ce Néant d’être implique néanmoins la remise en question de l’être. Qu’a-t-elle cette montre ? Elle n’a rien. Vérifions cette idée : L’être est, et il ne peut rien lui arriver d’autre qu’être. Seul « le Néant est la possibilité propre de l’être et son unique possibilité »<a href="#_ftn7" name="_ftnref7">[7]</a>, ce qui veut dire que l’en-soi ne peut par nature avoir de possibles. Le pour-soi, donc l’homme, est l’unique étant en mesure de se tenir face à ses possibilités. Car l’homme seul dispose du moyen d’interroger. Par le questionnement, l’homme sort l’être de sa massivité, de son en-soi. L’être étant ce qu’il est ne peut sortir de son être, se dépasser vers toute possibilité de lui-même. Il lui faut un être qui ne soit pas ce qu’il est, et qui soit ce qu’il n’est pas. C’est-à-dire l’homme. Donc un être qui s’interroge, et qui se tient face à ses possibilités. Prenons l’exemple de la destruction : la nature ne s’autodétruit pas, dit Sartre. Elle ne fait que modifier et redistribuer les masses d’êtres. L’homme en revanche, par son activité interrogatrice détruit la nature. D’abord parce que l’homme interroge l’être, introduisant là, une néantisation, par « le découpage limitatif d’un être dans l’être » (EN, p. 43). Interrogeant l’être, l’homme transcende l’être. Il fait advenir le Néant au monde, parce qu’en son être même, il est question de néant, ce qui veut clairement dire dans l’exemple cité, qu’envisageant la nature, il la met en question. Or, pouvant ainsi la mettre en question, il dispose du pouvoir de la transformer, de la nier, de la retourner contre elle-même. Il porte donc en lui le pouvoir de l’anéantir, ce dont ne dispose pas un cyclone, même si ce dernier cause un nombre considérable de morts. Le cyclone ne transforme rien, car il ne remet rien en question. Il est. Ce sera donc l’homme lui-même qui jugera que le cyclone fut meurtrier. En soi, le cyclone ne l’était pas. C’est ainsi que l’on peut considérer la célèbre formule sartrienne : « l’homme est l’être par qui le néant vient au monde »<a href="#_ftn8" name="_ftnref8">[8]</a>. En interrogeant la masse d’être, l’homme se met en dehors, et dispose ainsi du pouvoir de néantisation de l’être.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">Il est sûrement utile de préciser ici, que la négation du monde est possiblement explicable par l’image de la même manière. Pour la conscience imageante, le monde est une totalité synthétique réelle, tandis qu’en même temps, elle fait de l’objet imagé un néant par rapport au monde.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">Reprenons l’exemple de Pierre que je cherche dans ce bar. Au moment, où je cherche Pierre, à la fois je saisis d’un seul et même mouvement le monde dans sa totalité, mais je saisis également le monde comme monde-où-Pierre-n’est-pas. Pour ce faire, la conscience ne doit pas demeurer engluée dans le monde, mais doit pouvoir lui échapper. Et c’est justement parce qu’elle a ce pouvoir d’imaginer que la conscience n’est pas un étant intra-mondain, chose parmi les choses, telle l’eau dans le verre, ou une chambre dans une maison. On pourrait alors parler, à la suite de Sartre, de « recul néantisant » (EN, p. 117), pour précisément dire que l’être produit un néant au sein de l’être. De fait, il nous est aisé de comprendre que la conscience n’est pas un être en-soi, mais suppose dans l’existence de son être son propre néant<a href="#_ftn9" name="_ftnref9">[9]</a>. Cet être qui échappe à l’être en posant une question, se met entre parenthèses du monde par ce <em>recul néantisant</em> sous forme d’interrogation, suspendant ainsi son jugement. Aussi est-ce dans cette non-coïncidence à soi que le pour-soi secrète en lui-même du néant. On dira de ce trou d’être, à la suite de Sartre, qu’il est une « fissure intrasconscientielle ». Ce rien séparant le pour-soi de lui-même permet alors la sortie de soi vers le monde, disons la transcendance, et ainsi sa présence au monde. </span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">Rappelons-nous : la conscience est vide. Si celle-ci produit de la négation, ça n’est évidemment pas à la manière d’une chose, comme si la négation « habitait » la conscience, mais parce que le non-être hante l’être à l’intérieur de nous et à l’extérieur. Ce que Sartre souhaite précisément dire lorsqu’il écrit : « L’Être par qui le Néant arrive dans le monde est un être en qui, dans son Être, il est question du Néant de son Être : <em>l’être par qui le Néant vient au monde doit être son propre Néant</em>. Et par-là il faut entendre non un acte néantisant, qui requerrait à son tour un fondement dans l’Être, mais une caractéristique ontologique de l’Être requis »<a href="#_ftn10" name="_ftnref10">[10]</a>. Cette anthropologisation du Néant radicalise la contingence du Néant sur le plan ontologique. Or, Sartre réévalue philosophiquement le Néant sur fond d’interrogation. Et quand l’homme formule la moindre question, c’est toujours l’être qu’il interroge. Ce dernier ne pouvant être interrogé dans sa totalité que sur le mode d’un jugement affirmatif ou négatif, c’est systématiquement entaché du risque d’une négativité qu’il sera ainsi questionné. Pouvant ainsi anéantir – même provisoirement – la masse d’être grâce à son pouvoir de mise en question, l’homme, ou tel que Sartre l’appelle, « la réalité-humaine » peut ainsi modifier son rapport avec cet être. « Pour elle, mettre hors de circuit un existant particulier, c’est se mettre elle-même hors de circuit par rapport à cet existant. En ce cas elle lui échappe, elle est hors d’atteinte, il ne saurait agir sur elle, elle est retirée <em>par-delà un néant</em>. Cette possibilité pour la réalité humaine de sécréter un néant qui l’isole, Descartes après les Stoïciens, lui a donné un nom : c’est la <em>liberté</em>. »<a href="#_ftn11" name="_ftnref11">[11]</a></span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">Ce long passage de <em>L’Être et le Néant</em> est absolument capital. D’abord, parce que Sartre y introduit enfin l’idée fondamentale de la liberté humaine. Mais également parce qu’il justifie cette liberté qui s’impose à l’homme comme sa seule essence. En effet, doué du pouvoir d’imaginer, d’interroger, de douter, de percevoir, de désirer, etc., la réalité-humaine est un être qui échappe à l’être, en pouvant à la fois néantiser le monde et se néantiser lui-même. De fait, la réalité humaine n’étant pas un être en-soi, l’homme dispose de ce pouvoir d’échapper aux lois déterministes qui fondent l’ordre du monde, ce qui en fait clairement un « homme libre ». La liberté étant néantisante selon Sartre, il faut la comprendre comme un « petit lac de non-être » offrant les moyens à l’homme de s’arracher à soi et à l’être. </span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1087262" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/00/2224784142.jpg" alt="jean-paul sartre" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Sartre écrivait dans la même pièce que Beauvoir, Paris en 1970</span></p><p style="text-align: justify;">________________________________________</p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref1" name="_ftn1">[1]</a> EN, Première partie.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref2" name="_ftn2">[2]</a> Cette métamorphose permanente attachée au pour-soi est le propre même de sa liberté.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref3" name="_ftn3">[3]</a> Sartre emploie le terme de transcendance pour parler de quelque chose qui nous dépasse, qui est hors de notre présent immédiat.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref4" name="_ftn4">[4]</a> « La condition nécessaire pour qu’il soit possible de dire <em>non</em>, c’est que le non-être soit une présence perpétuelle, en nous et en dehors de nous, c’est que le néant <em>hante</em> l’être. » EN, pp. 46-47.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref5" name="_ftn5">[5]</a> Il est à noter que le Néant ne le pourrait par lui-même
Marc Alpozzo
http://marcalpozzo.blogspirit.com/about.html
Les ambiguïtés de la conscience sartrienne
tag:marcalpozzo.blogspirit.com,2020-04-09:3148532
2020-04-09T09:18:00+02:00
2020-04-09T09:18:00+02:00
La « vraie vie », nous dit Sartre , n’est pas ailleurs ; elle est dans...
<p style="text-align: justify;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">La « vraie vie », nous dit <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/heidegger" target="_blank" rel="noopener">Sartre</a></span>, n’est pas ailleurs ; elle est dans la conscience ; elle est dans notre rapport aux autres ; elle est dans cette liberté inconditionnée que l’on reçoit en héritage dès notre <em>arrivée</em> au monde. </span></strong></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/02/3718171029.jpg" id="media-1087140" alt="" /></p><p style="text-align: justify;"><strong> </strong></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong> </strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>1– La conscience et sa nudité</strong></span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Il n’existe pas d’arrières-mondes. En posant d’emblée ce principe moderne, Sartre entend libérer la philosophie de l’illusion métaphysique, et ainsi affirmer une philosophie du concret et de la contingence, mettant désormais fin aux grands dualismes classiques<a href="#_ftn1" name="_ftnref1">[1]</a>, par exemple, être/paraître, intérieur/extérieur, acte/puissance. Mais l’originalité spécifique sartrienne, se réclamant d’une phénoménologie de l’objet concret, montre que le paraître exprime l’« être d’un existant », en radicalisant ainsi <em>le retour vers les choses mêmes<a href="#_ftn2" name="_ftnref2"><strong>[2]</strong></a></em>. Dès les premières lignes de l’introduction de <em>L’Être et le Néant</em>, Sartre souligne avec zèle le poids du réel, son urgence<a href="#_ftn3" name="_ftnref3">[3]</a>, en abordant directement, et frontalement, l’être du phénomène.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Le phénomène, nous dit Sartre, se dévoile tel qu’il est<a href="#_ftn4" name="_ftnref4">[4]</a>. C’en sera d’autant plus facile de le décrire dans sa nudité absolue. À cela, Sartre tentant le pas, réduit la philosophie de l’être à l’acte même, et ainsi efface toute possibilité de puissance pré-existante. Écoutons-le : « Tout est acte. Derrière l’acte il n’y a ni puissance, ni « <em>exis</em> », ni vertu. Nous refuserons, par exemple, d’entendre par « génie » – au sens où l’on dit que Proust « avait du génie » ou qu’il « était » un génie – une puissance singulière de produire certaines œuvres, qui ne s’épuiserait pas, justement dans la production de celle-ci. <em>Le génie de Proust, ce n’est ni l’œuvre considérée isolément, ni le pouvoir subjectif de la produire : c’est l’œuvre considérée comme l’ensemble des manifestations de la personne</em>. »<a href="#_ftn5" name="_ftnref5">[5]</a> L’Être est ainsi réduit à son apparition. La description phénoménologique sartrienne se refusant désormais de recourir à l’hypothèse d’une réalité transcendante, comme si, soudain, Sartre trouvait là le moyen d’enfin rendre le monde à sa vérité. C’est tout du moins la démarche qu’il entend suivre, faisant de la recherche de l’être, probablement l’unique « argument ontologique » de tout son livre <em>L’Être et le Néant</em>. Une recherche de l’être qui débouche sur l’être de l’apparition, c’est-à-dire l’être du phénomène. Or, cette présence de l’être dans le phénomène, – ayant pour fonction première de désenchanter le monde, – n’est pas à proprement parler un renversement du platonisme, mais son surpassement, dans un mouvement qui réconcilie l’être et l’apparence<a href="#_ftn6" name="_ftnref6">[6]</a>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> Cependant, ne nous y trompons pas : à la différence de Heidegger qui fait du <em>Dasein</em> un berger de l’être, cette recherche de l’être sartrienne a pour seul objectif de fonder un principe d’identité qui, de manière tautologique, exprime l’idée que le phénomène <em>est</em> phénomène. Un monisme phénoménal exigeant alors nécessairement un dépassement, parce que plongé dans le monde, je n’ai pas de rapport direct à ce dernier. On trouve alors une distance entre la conscience et le monde<a href="#_ftn7" name="_ftnref7">[7]</a> à la manière d’un écart. En effet, l’être qui m’<em>apparaît</em> n’est pas l’être de l’existant. Ce dépassement aura donc lieu, et ce sera dans l’opposition entre être et paraître<a href="#_ftn8" name="_ftnref8">[8]</a>. Les premières pages de l’introduction, dont le but est de clarifier cette « Recherche », opposent le phénomène à l’apparaître, en posant comme principe que le phénomène est pour nous uniquement ce qui nous apparaît<a href="#_ftn9" name="_ftnref9">[9]</a>. Étant essentiellement en soi, le Phénomène est tel qu’il est, et s’oppose à nous dès son apparition.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">La philosophie de Sartre est à la fois une philosophie du phénomène, mais également une phénoménologie essentialiste. En affirmant ainsi que « l’apparence <em>est</em> l’essence »<a href="#_ftn10" name="_ftnref10">[10]</a>, Sartre introduit là le concept husserlien d’intentionnalité<a href="#_ftn11" name="_ftnref11">[11]</a>, et met désormais en question les rapports entre l’objet et la perception. Pour comprendre, prenons son exemple de l’apparition de la tasse. Elle est posée là, mais elle n’est pas moi. Comment vais-je être affecté par elle ? C’est le jeu du fini et de l’infini, ou plutôt le jeu « fini dans l’infini », ce nouveau dualisme sartrien, qu’il s’agit de questionner. Suivons-le pas-à-pas. La tasse est cette « apparition » finie, prise dans le flux des possibilités « infinies ». Lorsque je perçois la tasse que j’intentionne, l’objet déborde ma perception ; je dois affronter la richesse de ses déterminations, et accepter de ne pouvoir le saisir dans sa totalité. Pourquoi ? Parce qu’affrontant l’objet, j’exclus chaque fois une infinité d’autres points qui m’attendent<a href="#_ftn12" name="_ftnref12">[12]</a>. L’être étant la <em>condition</em> de tout dévoilement. Parce que Sartre veut montrer que le phénomène est tel qu’il apparaît, nous ne devons pas chercher derrière ou au-delà du phénomène qui s’identifie à l’être. Il n’y a aucune essence cachée derrière l’apparence. Elles se révèlent d’un coup ensemble. Et en étant déjà dans le phénomène, l’être s’annonce comme <em>transphénoménal<a href="#_ftn13" name="_ftnref13"><strong>[13]</strong></a></em>. Ce qui appelle un dépassement du phénomène vers un être non-phénoménal<a href="#_ftn14" name="_ftnref14">[14]</a>.Voyons désormais comment cela affecte principalement la conscience.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><ol style="text-align: justify;" start="2"><li><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong> La proximité et la distance de la conscience</strong></span></li></ol><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong> </strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>α. La conscience n’a pas de contenu</strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong> </strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">La conscience est vide. Elle n’est ni une faculté, ni une propriété, ni même un contenant, mais elle est <em>relation à</em>, intentionnalité. C’est-à-dire que « la conscience est conscience positionnelle <em>du</em> monde » (EN, p. 18.) La conscience, n’ayant pas de dedans, s’élance vers l’extérieur, est dirigée vers le « dehors ». De fait, lorsque la conscience est connaissance, elle est connaissance de son objet, en tant qu’elle est conscience d’elle-même d’être connaissance de <em>son</em> objet. Que faut-il alors comprendre ? D’une part, que Sartre rejette toute possibilité d’intériorité de la conscience<a href="#_ftn15" name="_ftnref15">[15]</a>. D’autre part, que la conscience est pure spontanéité<a href="#_ftn16" name="_ftnref16">[16]</a> et, qu’ainsi, elle s’engendre elle-même<a href="#_ftn17" name="_ftnref17">[17]</a>, c’est-à-dire qu’elle se distingue d’une chose en ce sens que, n’étant pas une présence à soi, elle implique une distance à soi, un rien ou un néant qui, la séparant d’elle-même, creusent à la fois la réflexion et la temporalisation<a href="#_ftn18" name="_ftnref18">[18]</a>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Aussi Sartre, faisant de l’acte intentionnel un inconditionné immotivé, doit à la fois résoudre, dans cette introduction, le problème du monisme que l’être du phénomène a soulevé, – puisque le phénomène n’est, en lui-même, pour nous, rien d’autre que ce qu’il présente de lui –, en donnant une réponse au monisme phénoménal que cela suppose, grâce au dépassement de l’opposition être et paraître par l’apparaître de l’être<a href="#_ftn19" name="_ftnref19">[19]</a>. Le tour de force phénoménologique sartrien étant là de refuser la réduction de l’<em>esse</em> du phénomène à son <em>percipi<a href="#_ftn20" name="_ftnref20"><strong>[20]</strong></a></em> et d’ainsi montrer que, par le négatif, l’existence est constituable. On voit désormais, qu’avec Sartre, le <em>cogito</em>, ne pouvant aller jusqu’à l’essence, demeure au niveau de la perception. C’est d’ailleurs « une condition suffisante : il suffit que j’aie conscience d’avoir conscience de cette table pour que j’en aie en effet conscience. Cela ne suffit certes pas pour me permettre d’affirmer que cette table existe <em>en soi</em> – mais bien qu’elle existe <em>pour moi</em>. »<a href="#_ftn21" name="_ftnref21">[21]</a> De fait, quand la conscience se dirige vers quelque chose, elle se transcende, c’est-à-dire qu’elle se porte au-delà d’elle-même<a href="#_ftn22" name="_ftnref22">[22]</a>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Cela tient de l’idée principale : la conscience sartrienne est vide. De fait, la voilà contrainte de se porter vers le dehors, parce qu’elle est conscience non positionnelle d’elle-même comme conscience positionnelle. C’est ainsi que Sartre conçoit la notion d’intentionnalité : une conscience qui ne peut ni avoir honte, ni être fière, ni vouloir, ni juger si elle ne se porte pas au-delà d’elle-même, c’est-à-dire si elle ne se projette pas « vers le dehors, vers le monde » (EN, p. 19.)</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">En fait, on trouve deux consciences chez Sartre : la première qui est conscience existante comme consciente d’exister (conscience positionnelle) – c’est l’attitude préréflexive, irréfléchi de la conscience tournée vers un objet distraitement, on parlera de conscience thétique ou positionnel – et de la même manière que Descartes doit douter pour avoir conscience de penser, lorsque je compte, selon Sartre, la conscience non-positionnelle et non-thétique de compter me permet d’avoir conscience de compter – c’est l’attitude réflexive ou réfléchie, c’est-à-dire le moment où la conscience peut se tourner sur elle-même et non plus sur un objet extérieur<a href="#_ftn23" name="_ftnref23">[23]</a>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Pour comprendre, écoutons le philosophe français : « Cette conscience (de) soi, nous ne devons pas la considérer comme une nouvelle conscience, mais comme <em>le seul mode d’existence qui soit possible pour une conscience de quelque chose</em>. »<a href="#_ftn24" name="_ftnref24">[24]</a> Considérons d’abord que la conscience sartrienne s’offre d’emblée sous une double dimension : Toute conscience est conscience de quelque chose<a href="#_ftn25" name="_ftnref25">[25]</a> (c’est-à-dire qu’elle est <em>projet de</em>, <em>projet vers</em>) ; ce qui veut donc dire qu’il ne pourrait y avoir de conscience qui ne soit conscience de quelque chose, <em>et</em> Toute conscience est conscience (de) soi, (c’est-à-dire cette conscience non préréflexive qui se prend elle-même comme objet, et qui ne vise donc plus aucun objet du monde, se saisissant elle-même, dans un moment de mise au point, de compréhension d’une situation passé.) Ne visant pas ce qui fait précisément de la conscience une transcendance. Or, cela veut précisément dire qu’à la fois la conscience échappe à toute définition par l’être, mais que, ne dérivant d’aucune essence, elle ne saurait être pensable à partir d’un futur antérieur. C’est le jeu de parenthèses qui nous renseigne sur la question. Le « de » de « conscience de soi » étant mis entre parenthèses, car toute conscience de soi authentique est, selon Sartre, toujours « conscience non-positionnelle de soi » (EN, p. 20)<a href="#_ftn26" name="_ftnref26">[26]</a>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Ceci étant désormais établi, continuons avec cette précision très importante que Sartre formule ainsi : « Toute conscience est conscience <em>de</em> quelque chose. Cette définition de la conscience peut être prise en deux sens bien distincts : ou bien nous entendons par là que la conscience est constitutive de l’être de son objet, ou bien cela signifie que la conscience en sa nature la plus profonde est rapport à un être transcendant. »<a href="#_ftn27" name="_ftnref27">[27]</a> Nous trouvons dans cette affirmation l’ambiguïté même de la conscience sartrienne : l’être d’une intention veut que toute conscience est à la fois conscience de quelque chose et conscience de soi comme étant conscience de quelque chose. Or, cela veut précisément dire que la conscience n’est jamais <em>in</em>consciente de soi. L’intention dans la conscience s’exprime dans son double caractère phénoménal : à la fois l’objet intentionné, et à la fois le sujet qui ne peut l’intentionner qu’en lui étant irréductiblement transcendant<a href="#_ftn28" name="_ftnref28">[28]</a>. La conscience n’existe qu’à condition qu’elle apparaisse, ce qui signifie, en d’autres termes, que la conscience existe par elle-même, et n’est pas tirée du néant, ceci impliquant dans l’être de la conscience un être non-conscient et transphénoménal. L’être est au fondement de la conscience, au sens où la conscience est antérieure au néant, et ce, même si elle est cause de sa manière d’être.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>β. La conscience est « manque »</strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Considérons désormais que « La réduction de la conscience à la connaissance, en effet, implique qu’on introduit dans la conscience la dualité sujet-objet. »<a href="#_ftn29" name="_ftnref29">[29]</a> Considérons également que le <em>cogito préréflexif</em> <a href="#_ftn30" name="_ftnref30">[30]</a> est cette conscience de soi qui est « rapport immédiat et non cognitif de soi à soi » : la conscience est conscience <em>de</em> quelque chose. C’est-à-dire que c’est la conscience elle-même qui se produit comme révélation-révélée d’un être qui n’est pas elle, mais qui se donne immédiatement en tant qu’existant dès lors qu’elle est révélée. Voilà à présent que la thèse de Sartre s’éclaire : « être conscience de quelque chose c’est être en face d’une présence concrète et pleine qui <em>n’est pas</em> la conscience. »<a href="#_ftn31" name="_ftnref31">[31]</a> Entendons qu’il n’y a pas que le phénomène. Il y a également le monde. Et ce monde, avant nous, <em>est</em>. Irréductible à la conscience, ce monde est en-soi<a href="#_ftn32" name="_ftnref32">[32]</a>. Il est <em>plénitude</em>. De la même manière, la conscience est une subjectivité absolue, et est irréductible au mode d’être du monde. Elle est <em>manque</em>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">De fait, si l’on veut considérer l’être du phénomène comme dépendant de la conscience, il nous faut admettre la part de non-être inhérent à l’objet dans la conscience. Car ça n’est pas sur le mode de la présence que les phénomènes dépendent de la conscience, mais sur le mode de l’absence. Un objet se donne à ma subjectivé par « apparition ». Et même si une apparition renvoie déjà à une autre, « chacune d’elles est déjà à elle toute seule un <em>être transcendant</em>, non une matière impressionnelle subjective – une <em>plénitude d’être</em>, non un manque – une <em>présence</em>, non une absence. »<a href="#_ftn33" name="_ftnref33">[33]</a> Cela relève du principe du « fini dans l’infini » tel que nous l’avons vu plus haut. En prenant ici le même chemin que Heidegger, Sartre introduit l’idée de non-être en philosophie, et en affirme la crédibilité. Nous ne reviendrons pas sur les vives critiques que l’idée de non-être ont suscité jusqu’au maître de Fribourg<a href="#_ftn34" name="_ftnref34">[34]</a>, mais il est intéressant de constater là, que si l’être est<a href="#_ftn35" name="_ftnref35">[35]</a>, il appelle nécessairement l’être du non-être. Plus précisément, pour Sartre, le non-être est le <em>fondement</em> de l’être, à la manière du néant qui précèderait l’être au point d’en être la condition d’existence. On pourrait d’ailleurs légitimement croire que la thèse est ici paradoxale, voire <em>provocatrice</em>. Il n’en est rien. Mais continuons.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Négligeant d’emblée le retour à l’être heideggérien, la philosophie de Sartre se veut une philosophie de la subjectivité, c’est-à-dire une philosophie du sujet, ou plus justement une philosophie de la conscience<a href="#_ftn36" name="_ftnref36">[36]</a> en tant que, continuant le dualisme kantien, son intuition phénoménologique présente le sujet selon deux angles: un être-au-delà-du-phénomène : <em>l’être-en-soi</em> (qui nous échappe), et un être (ne pouvant saisir de l’être que ce qui lui apparaît) : <em>l’être-pour-soi<a href="#_ftn37" name="_ftnref37"><strong>[37]</strong></a></em>.</span></p><p style="text-align: justify;">&nb
Marc Alpozzo
http://marcalpozzo.blogspirit.com/about.html
La proximité et la distance de la conscience. Note sur Sartre
tag:marcalpozzo.blogspirit.com,2020-03-30:3148556
2020-03-30T10:34:00+02:00
2020-03-30T10:34:00+02:00
Parce que Sartre veut montrer que le phénomène est tel qu’il apparaît,...
<p style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size: 12pt; font-family: georgia, palatino, serif;">Parce que <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/heidegger" target="_blank" rel="noopener">Sartre</a></span> veut montrer que le phénomène est tel qu’il apparaît, nous ne devons pas chercher derrière ou au-delà du phénomène qui s’identifie à l’être. Il n’y a aucune essence cachée derrière l’apparence. Elles se révèlent d’un coup ensemble. Et, en étant déjà dans le phénomène, l’être s’annonce comme <em>transphénoménal.</em> Ce qui appelle un dépassement du phénomène vers un être non-phénoménal</span></strong></p><p> </p><p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1"></a></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/01/227322713.jpg" id="media-1087196" alt="" /></p><p><strong> </strong></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>α. La conscience n’a pas de contenu</strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong> </strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">La conscience est vide. Elle n’est ni une faculté ni une propriété ni même un contenant mais elle est <em>relation à</em>, intentionnalité. C’est-à-dire que « la conscience est conscience positionnelle <em>du</em> monde » (EN, p. 18.) La conscience n’ayant pas de dedans, s’élance vers l’extérieur et est dirigée vers le « dehors ». De fait, lorsque la conscience est connaissance, elle est connaissance de son objet, en tant qu’elle est conscience d’elle-même d’être connaissance de <em>son</em> objet. Que faut-il alors comprendre ? D’une part, que Sartre rejette toute possibilité d’intériorité de la conscience<a href="#_ftn1" name="_ftnref1">[1]</a>. D’autre part, que la conscience est pure spontanéité<a href="#_ftn2" name="_ftnref2">[2]</a> et, qu’ainsi, elle s’engendre elle-même<a href="#_ftn3" name="_ftnref3">[3]</a>, c’est-à-dire qu’elle se distingue d’une chose en ce sens que, n’étant pas une présence à soi, elle implique une distance à soi, un rien ou un néant qui, la séparant d’elle-même, creusent à la fois la réflexion et la temporalisation<a href="#_ftn4" name="_ftnref4">[4]</a>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Aussi Sartre, faisant de l’acte intentionnel un inconditionné immotivé, doit à la fois résoudre, dans cette introduction, le problème du monisme que l’être du phénomène a soulevé, – puisque le phénomène n’est, en lui-même, pour nous, rien d’autre que ce qu’il présente de lui –, en donnant une réponse au monisme phénoménal que cela suppose, grâce au dépassement de l’opposition être et paraître par l’apparaître de l’être<a href="#_ftn5" name="_ftnref5">[5]</a>. Le tour de force phénoménologique sartrien étant là de refuser la réduction de l’<em>esse</em> du phénomène à son <em>percipi<a href="#_ftn6" name="_ftnref6"><strong>[6]</strong></a></em> et, d’ainsi montrer que, par le négatif, l’existence est constituable. On voit désormais, qu’avec Sartre, le <em>cogito</em>, ne pouvant aller jusqu’à l’essence, demeure au niveau de la perception. C’est d’ailleurs « une condition suffisante : il suffit que j’aie conscience d’avoir conscience de cette table pour que j’en aie en effet conscience. Cela ne suffit certes pas pour me permettre d’affirmer que cette table existe <em>en soi</em> – mais bien qu’elle existe <em>pour moi</em>. »<a href="#_ftn7" name="_ftnref7">[7]</a> De fait, quand la conscience se dirige vers quelque chose, elle se transcende, c’est-à-dire qu’elle se porte au-delà d’elle-même<a href="#_ftn8" name="_ftnref8">[8]</a>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Cela tient de l’idée principale : la conscience sartrienne est vide. De fait, la voilà contrainte de se porter vers le dehors, parce qu’elle est conscience non-positionnelle d’elle-même comme conscience positionnelle. C’est ainsi que Sartre conçoit la notion d’intentionnalité : une conscience qui ne peut ni avoir honte, ni être fière, ni vouloir, ni juger si elle ne se porte pas au-delà d’elle-même, c’est-à-dire si elle ne se projette pas « vers le dehors, vers le monde » (EN, p. 19.)</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">En fait, on trouve deux consciences chez Sartre : la première qui est conscience existante comme consciente d’exister (conscience positionnelle) – c’est l’attitude préréflexive, irréfléchi de la conscience tournée vers un objet distraitement, on parlera de conscience thétique ou positionnel – et, de la même manière que Descartes doit douter pour avoir conscience de penser, lorsque je compte, selon Sartre, la conscience non-positionnelle et non-thétique de compter me permet d’avoir conscience de compter – c’est l’attitude réflexive ou réfléchie c’est-à-dire le moment où la conscience peut se tourner sur elle-même et non plus sur un objet extérieur<a href="#_ftn9" name="_ftnref9">[9]</a>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Pour comprendre, écoutons le philosophe français : « Cette conscience (de) soi, nous ne devons pas la considérer comme une nouvelle conscience, mais comme <em>le seul mode d’existence qui soit possible pour une conscience de quelque chose</em>. »<a href="#_ftn10" name="_ftnref10">[10]</a> Considérons d’abord que la conscience sartrienne s’offre d’emblée sous une double dimension : Toute conscience est conscience de quelque chose<a href="#_ftn11" name="_ftnref11">[11]</a> (c’est-à-dire qu’elle est <em>projet de</em>, <em>projet vers</em>) ; ce qui veut donc dire qu’il ne pourrait y avoir de conscience qui ne soit conscience de quelque chose, <em>et</em> Toute conscience est conscience (de) soi, (c’est-à-dire cette conscience non préréflexive qui se prend elle-même comme objet, et qui ne vise donc plus aucun objet du monde, se saisissant elle-même, dans un moment de mise au point, de compréhension d’une situation passé.) Ne visant pas ce qui fait précisément de la conscience une transcendance. Or, cela veut précisément dire qu’à la fois la conscience échappe à toute définition par l’être, mais que, ne dérivant d’aucune essence, elle ne saurait être pensable à partir d’un futur antérieur. C’est le jeu de parenthèses qui nous renseigne sur la question. Le « de » de « conscience de soi » étant mis entre parenthèses, car toute conscience de soi authentique est, selon Sartre, toujours « conscience non-positionnelle de soi » (EN, p. 20)<a href="#_ftn12" name="_ftnref12">[12]</a>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Ceci étant désormais établi, continuons avec cette précision très importante que Sartre formule ainsi : « Toute conscience est conscience <em>de</em> quelque chose. Cette définition de la conscience peut être prise en deux sens bien distincts : ou bien nous entendons par là que la conscience est constitutive de l’être de son objet, ou bien cela signifie que la conscience en sa nature la plus profonde est rapport à un être transcendant. »<a href="#_ftn13" name="_ftnref13">[13]</a> Nous trouvons dans cette affirmation l’ambiguïté même de la conscience sartrienne : l’être d’une intention veut que toute conscience est à la fois conscience de quelque chose et conscience de soi comme étant conscience de quelque chose. Or, cela veut précisément dire que la conscience n’est jamais <em>in</em>consciente de soi. L’intention dans la conscience s’exprime dans son double caractère phénoménal : à la fois l’objet intentionné, et à la fois le sujet qui ne peut l’intentionner qu’en lui étant irréductiblement transcendant<a href="#_ftn14" name="_ftnref14">[14]</a>. La conscience n’existe qu’à condition qu’elle apparaisse, ce qui signifie, en d’autres termes, que la conscience existe par elle-même, et n’est pas tirée du néant, ceci impliquant dans l’être de la conscience un être non conscient et transphénoménal. L’être est au fondement de la conscience, au sens où la conscience est antérieure au néant, et ce, même si elle est cause de sa manière d’être.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>β. La conscience est « manque »</strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Considérons désormais que « La réduction de la conscience à la connaissance, en effet, implique qu’on introduit dans la conscience la dualité sujet-objet. »<a href="#_ftn15" name="_ftnref15">[15]</a> Considérons également que le <em>cogito préréflexif</em> <a href="#_ftn16" name="_ftnref16">[16]</a> est cette conscience de soi qui est « rapport immédiat et non cognitif de soi à soi » : la conscience est conscience <em>de</em> quelque chose. C’est-à-dire que c’est la conscience elle-même qui se produit comme révélation-révélée d’un être qui n’est pas elle, mais qui se donne immédiatement en tant qu’existant dès lors qu’elle est révélée. Voilà à présent que la thèse de Sartre s’éclaire : « être conscience de quelque chose c’est être en face d’une présence concrète et pleine qui <em>n’est pas</em> la conscience. »<a href="#_ftn17" name="_ftnref17">[17]</a> Entendons qu’il n’y a pas que le phénomène. Il y a également le monde. Et ce monde, avant nous, <em>est</em>. Irréductible à la conscience, ce monde est en-soi<a href="#_ftn18" name="_ftnref18">[18]</a>. Il est <em>plénitude</em>. De la même manière, la conscience est une subjectivité absolue, et est irréductible au mode d’être du monde. Elle est <em>manque</em>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">De fait, si l’on veut considérer l’être du phénomène comme dépendant de la conscience, il nous faut admettre la part de non-être inhérent à l’objet dans la conscience. Car, ça n’est pas sur le mode de la présence que les phénomènes dépendent de la conscience, mais sur le mode de l’absence. Un objet se donne à ma subjectivé par « apparition ». Et même si une apparition renvoie déjà à une autre, « chacune d’elles est déjà à elle toute seule un <em>être transcendant</em>, non une matière impressionnelle subjective – une <em>plénitude d’être</em>, non un manque – une <em>présence</em>, non une absence. »<a href="#_ftn19" name="_ftnref19">[19]</a> Cela relève du principe du « fini dans l’infini » tel que nous l’avons exposé plus haut. En prenant ici le même chemin que Heidegger, Sartre introduit l’idée de non-être en philosophie, et en affirme la crédibilité. Nous ne reviendrons pas sur les vives critiques que l’idée de non-être ont suscité jusqu’au maître de Fribourg<a href="#_ftn20" name="_ftnref20">[20]</a>, mais il est intéressant de constater là, que si l’être est<a href="#_ftn21" name="_ftnref21">[21]</a>, il appelle nécessairement l’être du non-être. Plus précisément, pour Sartre, le non-être est le <em>fondement</em> de l’être, à la manière du néant qui précèderait l’être au point d’en être la condition d’existence. On pourrait d’ailleurs légitimement croire que la thèse est ici paradoxale, voire <em>provocatrice</em>. Il n’en est rien. Mais continuons.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Négligeant d’emblée le retour à l’être heideggérien, la philosophie de Sartre se veut une philosophie de la subjectivité, c’est-à-dire une philosophie du sujet, ou plus justement une philosophie de la conscience<a href="#_ftn22" name="_ftnref22">[22]</a> en tant que, continuant le dualisme kantien, son intuition phénoménologique présente le sujet selon deux angles: un être-au-delà-du-phénomène : <em>l’être-en-soi</em> (qui nous échappe), et un être (ne pouvant saisir de l’être que ce qui lui apparaît) : <em>l’être-pour-soi<a href="#_ftn23" name="_ftnref23"><strong>[23]</strong></a></em>.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Sartre appelle donc <em>en-soi</em> ce qui est pure identité à soi. A la différence de la conscience (de) soi, l’être est en-soi, non parce qu’il renvoie à soi, mais parce qu’il est. Entendons, sous la plume de notre auteur, que l’être-en-soi ne comporte pas la moindre distance, en comparaison avec l’être-pour-soi (la conscience (de) soi) qui, nous l’avons dit, est essentiellement fondé sur le manque, donc la distance à soi. L’être-en-soi est pure densité, « opaque à lui-même » car précisément plein de lui-même. Pour exprimer cette absence de distance ou ce manque de rapport à soi, Sartre emploie cette expression : « <em>l’être est ce qu’il est</em> »<a href="#_ftn24" name="_ftnref24">[24]</a>. Traduisons : isolé en son être, l’être ne peut s’écarter de son être, incapable de tout devenir, de tout arrachement à soi, de tout rapport à ce qui n’est pas lui. Contingent, l’être-en-soi, en tant qu’il est ni possible ni nécessaire, <em>est</em> tout simplement.</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">L’être du pour-soi se définit en revanche comme manque, et comme distance à soi. C’est ce que Sartre exprime par la formule, devenue depuis célèbre : « l’être <em>pour soi</em> se définit au contraire comme étant ce qu’il n’est pas et n’étant pas ce qu’il est. »<a href="#_ftn25" name="_ftnref25">[25]</a> Qu’est-ce à dire ? Contrairement à l’être en soi qui n’a ni secret, ni opacité, ni « dedans qui s’opposerait à un dehors », qui est brut, monolithique, « être […] et, en dehors de cela, <em>rien</em> » (EN, p. 40), le pour-soi est incapable de coïncider avec soi, car il est dévoilement de l’être, transcendant, hanté par le néant. </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> </span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1087197" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/02/545514607.jpg" alt="Jean-Paul Sartre, R. Breeur, Isabelle Stal, George Berkeley, Edmund Husserl, heidegger, " /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Jean-Paul Sartre écrivant au café Flore, à Paris</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;">_________________________________________</p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref1" name="_ftn1">[1]</a> R. Breeur accuse Sartre pour sa part, de laisser ainsi libre cours à sa « haine de toute intimité et de la mièvrerie de l’intériorité ou de la psychologie d’introspection ». <em>Op. cit.</em>, p. 234.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref2" name="_ftn2">[2]</a> Précisons que dans des œuvres antérieures à <em>L’Être et le Néant</em>, nous ne sommes maîtres ni de nos pensée ni de nos actes qui, créés ex nihilo, nous débordent car ils sont spontanés. (Cf. <em>La Transcendance de l’Ego</em> (1936) et <em>La nausée</em> (1938).)</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref3" name="_ftn3">[3]</a> I. Stal apporte un éclairage intéressant sur les deux théories de la conscience sartrienne. A la fois celle de la maturité, que nous étudierons ici, officielle et lumineuse, et une seconde plus clandestine et souterraine que nous avons choisi d’ignorer ici. Voir à ce propos I. Stal, <em>op. cit.</em>, p. 18 sq.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref4" name="_ftn4">[4]</a> Nous reviendrons plus loin sur cette notion et nous verrons le rôle crucial que celle-ci joue dans la phénoménologie de l’angoisse sartrienne.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref5" name="_ftn5">[5]</a> Cf. EN, Introduction, II, « Le phénomène d’être et l’être du phénomène », p. 14 sq. Notons tout de même que la description de la conscience par Sartre, réconcilie le phénomène et le noumène, en rejetant ainsi le dualisme de l’apparence et de l’essence.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref6" name="_ftn6">[6]</a> Nous savons que l’empiriste anglais George Berkeley avait écrit une théorie de la vision et portait un intérêt à la nature de la sensation, concluant que tout ce qui existe n’existe qu’en tant que perçu par un sujet percevant. Aussi, aboutit-il à cette constatation : « <em>esse est percipi</em> » (être, c’est être perçu) et « <em>esse est percipere</em> » (être, c’est percevoir). Ce qui signifie clairement qu’un être n’existe pas en soi, mais doit être perçu par un autre être percevant pour exister, d’où la seconde formule : <em>être, c’est percevoir</em>. Cette réflexion féconde et très stimulante peut nous amener à en déduire que la cause des idées n’est pas dans les choses, mais dans l’esprit qui les perçoit. Néanmoins, ces formules de Berkeley ne sauront satisfaire Sartre, car selon le phénoménologue français : « l’être de la connaissance ne peut être mesuré par la connaissance ; il échappe au « <em>percipi</em> ». Ainsi l’être-fondement du <em>percipere</em> et du <em>percipi</em> doit échapper lui-même au <em>percipi</em> : il doit être transphénoménal. » EN, p. 17.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref7" name="_ftn7">[7]</a> EN, p. 18.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref8" name="_ftn8">[8]</a> On voit là apparaître le problème de la dualité sujet-objet fondée à partir du <em>cogito</em> cartésien. Nous reviendrons dans la seconde partie de ce travail de recherche sur cette limite phénoménologique dont Sartre n’a su sortir.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref9" name="_ftn9">[9]</a> « Toute conscience positionnelle d’objet est en même temps conscience non positionnelle d’elle-même. » EN, p. 19. </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref10" name="_ftn10">[10]</a> EN, p. 20.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><a href="#_ftnref1
Pierre Vallet
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La Société Historique et Archéologique du XIV annonce
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2017-02-28T15:19:00+01:00
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La Société Historique et Archéologique du 14ème présentera un cycle de...
<p style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size: 10pt;">La Société Historique et Archéologique du 14ème présentera un cycle de conférences qui auront lieu à la mairie du 14ème aux dates suivantes :</span></strong></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 10pt;"><strong>le samedi 4 mars 15h</strong> : <strong><em>Le Paris assiégé, </em></strong>par Claire Tissot assistée d'Yvan Belledame pour les illustrations.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 10pt;"><strong>le samedi 25 mars</strong> : <strong><em>Aragon, Sartre et le 14ème, </em></strong>par Jean-Louis Robert.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 10pt;"><strong>le samedi 29 avri</strong>l : <strong>N</strong><strong><em>ouvelles approches du boulevard Raspail, </em></strong>par Georges Grand.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 10pt;"><a href="http://lavoixdu14e.blogspirit.com/media/00/02/918988242.jpg" target="_blank"><img id="media-956390" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://lavoixdu14e.blogspirit.com/media/00/02/2820486964.jpg" alt="Paris assiége 1870-1871 Claire Tissot.jpg" /></a>En ce qui concerne la <strong>prochaine conférence ayant pour sujet le Paris assiégé (1870), le 4 mars,</strong> c'est <strong>Madame Claire Tissot</strong> archiviste paléographe, qui viendra parler de la vie d'une famille habitant le 14ème pendant le siège de Paris par les Prussiens en 1870. Madame Tissot qui a fait sa carrière à la BNF et à l'Institut National d'Histoire de l'Art, a étudié une importante correspondance sur le sujet. C'est à travers l'échange de lettres et correspondances diverses recueillies parmi les <strong>familles Fouqué et Lecoeur</strong> que Madame Tissot a pu relater la vie quotidienne des Parisiens pendant 132 jours de blocus. Madame Tissot a édité par ailleurs un livre paru aux Editions de l'Harmattan : <em>"Paris</em> <em>assiégé 1870-1871".</em></span></p><p style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size: 10pt;"><em>Horaires et lieu : à la mairie du 14ème à 15 heures, à la salle polyvalente.</em></span></strong></p>
erelyon
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La Folie de la sagesse
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2014-02-02T10:31:00+01:00
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Dimanche 2 février 2014 Télécharger Ecclésiaste 1.12-18 et...
<p>Dimanche 2 février 2014</p><p style="text-align: left;"><img id="media-641659" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://westofparis.com/erelyon/affiches/Ecclesiaste_moyen.jpg" alt="Ecclesiaste_moyen.jpg" /></p><p><object width="200" height="20" data="http://erelyon.blogspirit.com/files/dewplayer.swf?son=http://westofparis.com/erelyon/2014/20140202_Ecclesiaste_1_12_18_2_12_16_La_Folie_de_la_sagesse.MP3" type="application/x-shockwave-flash"><param name="data" value="http://erelyon.blogspirit.com/files/dewplayer.swf?son=http://westofparis.com/erelyon/2014/20140202_Ecclesiaste_1_12_18_2_12_16_La_Folie_de_la_sagesse.MP3" /><param name="src" value="http://erelyon.blogspirit.com/files/dewplayer.swf?son=http://westofparis.com/erelyon/2014/20140202_Ecclesiaste_1_12_18_2_12_16_La_Folie_de_la_sagesse.MP3" /></object> <sup><a href="http://westofparis.com/erelyon/2014/20140202_Ecclesiaste_1_12_18_2_12_16_La_Folie_de_la_sagesse.MP3">Télécharger</a></sup></p><p>Ecclésiaste 1.12-18 et 2.12-16</p><p>(Jonah Haddad) | 26 min</p><p> </p><p><iframe width="320" height="240" style="border: none; overflow: hidden; width: 340px; height: 42px;" src="http://www.facebook.com/plugins/like.php?href=http://erelyon.blogspirit.com/archive/2014/02/02/la-folie-de-la-sagesse-2993361.html&locale=fr_FR&layout=standard&show_faces=false&width=450&action=like&font=verdana&colorscheme=light&height=21" scrolling="no" frameborder="0" allowtransparency="true"></iframe></p>
hommelibre
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Solstice: une symbolique de la lumière
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2013-12-22T00:18:00+01:00
2013-12-22T00:18:00+01:00
Diverses symboliques se rattachent à la lumière. Elles sont des...
<p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;"><a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/02/02/3924390929.jpg" target="_blank"><img id="media-160667" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/00/01/1748224992.jpg" alt="noel,lumière,symbole,symbolique,obscurité,saint jean,christianisme,nature,marx,sartre,humain,masculin,féminin" width="301" height="220" /></a>Diverses symboliques se rattachent à la lumière. Elles sont des expressions d’un lien entre la conscience humaine, corps et esprit, et la nature en tant qu’expression de l’univers, entre le microcosme et le macrocosme. Lumière et chaleur ont cette puissance, qu’elles communiquent au monde, de s’affranchir de l’attraction terrestre, de se détacher le la Terre mère et de transformer le monde en agissant sur lui. C’est symboliquement une fête plutôt masculine avec son feu qui se dresse et les plantes qui jaillissent vers l’extérieur comme des phallus. </span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">La Saint-Jean d’hiver est fêtée le 27 décembre. Un peu après le solstice d’hiver, alors que le soleil commence à remonter dans le ciel après les quelques jours de profonde plongée immobile dans l’obscurité. On peut imaginer l’ébranlement symbolique de ce nouveau mouvement, même si ce n’est pas réellement un mouvement puisque ce n’est pas le soleil qui bouge. On peut l’illustrer par analogie avec une vague dans son creux, au tsunami quand la mer se retire, et qui accumule une incroyable puissance pour se reconstituer et déferler. Monter n’est pas la même chose que descendre. On le sait au printemps, quand la force éclôt et s’accroche à la vie, alors qu’en comparaison la période symétrique de l’automne est une forme d’abandon, ou un lâcher prise.</span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">Le solstice d’hiver est ce moment d’inversion si capital. Quand tout est abandonné, quand la chute est à son terme, le mouvement repart en direction de la lumière. Noël est une fête de la lumière, calée sur l’ancien culte de Mithra qui perdura jusqu’au troisième siècle de notre ère. Le christianisme a repris cette date avec la symbolique de la vie qui revient. La lumière recommence à illuminer le monde.</span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">La symbolique appliquée à l’humain permet d’apprécier le solstice d’hiver comme une période plutôt féminine, une période de creux comme le sexe de la femme, qui est à l’intérieur et non à l’extérieur. Au profond du ventre de la femme la vie va germer et prendre forme. Est-ce vraiment la date de la naissance de Jésus? Cela n’est pas important. </span><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;"><a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/00/02/593531679.jpg" target="_blank"><img id="media-160668" style="float: right; margin: 0.2em 0 1.4em 0.7em;" title="" src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/00/02/3932840016.jpg" alt="noel,lumière,symbole,symbolique,obscurité,saint jean,christianisme,nature,marx,sartre,humain,masculin,féminin" width="300" height="194" /></a></span>La pédagogie du symbole prime sur le réel. En ce sens le christianisme est plus qu’une simple religion au sens marxiste d’opium du peuple, d’aliénation ou de «soupir de la créature opprimée»: c’est une pédagogie associé à des rituels d’apprentissage. La Saint-Jean d’hiver est la fête de Jean l’évangéliste, celui qui annonce la lumière en accomplissement. Si la force de l’été est une conversion, une mutation suite à la plénitude du cycle de l’énergie, la force de l’hiver est l’annonce du renouveau, la lente fermentation, l’espoir dans l’ombre.</span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">La lumière rend visible. C’est ce qui attend le monde après sa gestation dans l’obscurité bienfaisante de la matrice. Cette vision cyclique est toujours applicable aux phénomènes et à l’émergence de toute vision ou conscience. Notre époque, quoiqu’en disent certains, est puissamment masculine. Tout est mis dans le visible, même la vie privée. Tout est dans l’action, dans la volonté transformatrice, dans l’autodétermination, dans la consommation, dans la jouissance rapide - qui est à la fois la beauté reproductrice et la désolation relationnelle de l’homme. Des femmes prennent à leur compte la puissance symbolique masculine: elles découvriront ce qui y est rattaché. Les hommes semblent moins empressés de prendre à leur compte l’abandon féminin à ce qui est en dehors de nos volontés. Ne vivant pas l’accouchement, marqueur fondamental, leur corps ne leur enseigne pas cette disposition. La poésie peut la leur enseigner, dans une certaine mesure. Mais il leur est difficile d’associer ensemble la poésie et la guerre ou l'exploration conquérante.</span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">Que l’on soit ou non chrétien, se plonger dans cette compréhension symbolique relie à plus grand que nous, à des nourritures au-delà de nos théories et de nos politiques. Le solstice d’hiver et la fête de Noël sont ces moments précieux que l’univers nous donne pour écouter ce qui se dit dedans, quand nos volontés se mettent au repos et que nous acceptons, dans la froidure, de ne pas être maîtres de tout. Cette attitude est la condition pour qu’un nouveau cycle commence. Certaines approches politiques refusent la notion de cycle, considérant que l’humain y est trop assujetti à la nature alors qu’il devrait, comme disait Sartre, inventer son chemin - au prix de se couper de la nature. Je crois de mon côté qu’il faut voir dans les cycles, dans les répétitions, le rituel d’apprentissage qui, peu à peu, fixe les briques de l’évolution.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;"><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">__________________________________________________________________________</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;"><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">Mardi:</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;"><a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/archive/2013/12/20/les-contes-de-crocodile-river-251136.html" target="_blank"><span style="text-decoration: underline; color: #800000;">Les contes de Crocodile River</span></a><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;"><a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/00/02/3847290451.jpg" target="_blank"><img id="media-160619" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/02/01/1790045968.jpg" alt="goetelen,livre,atypic,créativité,contes,crocodile river,afrique du sud,new york,paris,oprah winfrey,zurich,crocodile,lion,brousse,savane,rivière," width="141" height="198" /></a></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: small;">Il y a deux fêtes de la Saint-Jean. La plus citée est la Saint-Jean d’été, le 24 juin. C’est le moment de la plus grande force de la lumière solaire pour l’hémisphère nord. Non seulement le jour est long mais la lumière produit la chaleur qui fait pousser les végétaux vers l’extérieur. C’est la fête de Jean le baptiste, le convertisseur d’âmes, l’artisan de la mutation, celui qui annonce la lumière proche.</span></p>
hommelibre
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Ocralise et ambrelace
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2013-09-28T16:13:00+02:00
2013-09-28T16:13:00+02:00
Pour en rester aux yeux, les prés ont foncé leurs verts, sauf le...
<p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;"><a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/01/00/3106314381.jpg" target="_blank"><img id="media-153340" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/00/02/4073145751.jpg" alt="été,penser,soi-même,sartre,camus,cioran,liberté,identité,valeurs,narcissisme,hitler,ambre,ocre," /></a>Pour en rester aux yeux, les prés ont foncé leurs verts, sauf le couvert, cette vive plantation végétale </span><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">pétante comme des épinards,</span> qui fera l’engrais naturel de la terre. Ailleurs le tracteur tourne et retourne ses mottes frisées.</span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">Les feuilles des arbres, moins brillantes, s’ocralisent et s’ambrelacent, habillent veloureusement</span><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;"> la campagne</span> </span><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">paisible</span></span> de couleurs nostalgiques.</span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">Les parfums traînants multiplient les paysages du nez: ici une lie de vin; là un humus écarquillé tout juste sorti de catacombes végétales; là encore un goût âcre et sucré de bois fraîchement scié.</span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">La symphonie d’été n’est pas achevée. Elle continue. Notes et accords éveillent une exaltation mineure, une tierce peut-être. Comment ne pas se sentir plein dans cette beauté insistante du début d’automne? Est-il encore utile de penser, alors que tout est là, ressenti, l’esprit comblé, le corps jouisseux?</span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">Penser: le seul mot ravive les couleurs palpitantes de l’histoire humaine.</span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">Autour de Cioran, Camus et Sartre s’était développée l’idée de <em>«penser contre soi-même»</em>. Dans la foulée de la deuxième guerre mondiale un rejet virulent s’était exprimé. Rejet du modèle autoritaire si total d’Hitler et consorts. On y avait associé le masculin, l’homme et père, la parentalité supposée bridée dans un patriarcat pourtant partageux, et toute forme d’autorité que, dès lors, on ne s’accordait plus à soi. </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">Le culte du anti-héros, du looser, du médiocre, de l’incapable heureux, faisait des ravages. Parfois c’était au nom d’une revendication sociale qui devait égaliser le petit et le grand, qui masquait le manque de talent et de compétences intellectuelles de certains. Propulsés hors de toute humilité, ceux-ci n’acceptaient pas leurs incompétences et ne tentaient rien pour en sortir. Nul is bioutifoule. Alors que dans le même temps d’autres cultivaient la pensée productiviste: <em>«Je suis tout, je peux tout»</em>, et jouaient à la crevette qui veut se faire baleine.</span><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;"><a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/01/00/3173261925.jpg" target="_blank"><img id="media-153341" style="float: right; margin: 0.2em 0 1.4em 0.7em;" title="" src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/02/01/3185366332.jpg" alt="été,penser,soi-même,sartre,camus,cioran,liberté,identité,valeurs,narcissisme,hitler,ambre,ocre," width="283" height="229" /></a></span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">Le <em>«Je»</em> objectif était devenu inassummable et paradoxalement le <em>«Je»</em> subjectif était et est de plus en plus revendiqué et assumé comme dernier territoire personnel. Si la démarche de <em>«penser contre soi-même»</em> avait quelque intérêt pour desceller les croyances d’alors et pour promouvoir l’esprit critique (à son propre encontre), ses effets furent une perte de confiance dévastatrice de l’humain occidental en lui-même, en ses valeurs, en son Histoire. </span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">La compensation de cette perte fut et est encore un narcissisme exacerbé mais désespérément vide, n’appelant qu’à davantage de consommation de tous ordres pour combler ce vide: sensations nouvelles, expériences fortes ou extrêmes, intensité émotionnelle, faim de multiplicité sexuelle, mythe du nouveau et du progrès, surenchères diverses, etc, etc, etc. La consommation frénétique de bien matériels, psychiques, politiques ou amoureux sert de paravent au vide de sens.</span><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">Qui est ce <em>«Je»</em> dont on fait tant cas: un ensemble de sensations? Un répétiteur de mots appris des autres et dont l’ordonnance a été légèrement modifiée? Un agrégat d’éléments divers reliés par un ressenti aussi mystérieux que l’est la gravitation dans l’univers? Une prise de pouvoir et d’espace? Le sentiment d’une appartenance, et à quoi? </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">Le XXe siècle a achevé le démembrement de certaines idées et d'un corpus intellectuel de l’humain. Aujourd’hui, les spasmes résiduels sur les valeurs ne recréent pas une identité humaine occidentale solide: trop d'émotion pour être fiables. Aujourd’hui, la politique-même est un enfermement d’individus stéréotypés dans un train sans locomotive. Aujourd’hui, plus que jamais, tout est à repenser, à reconstruire. Mais toutes les ruines du passé ne sont pas encore déblayées. Des ombres errantes, à gauche comme à droite, devant la démesure de tout réinventer et de trier objectivement le passé, tentent de remettre debout les vieilles ruines, sans plus entendre les cris sanglants dont elles sont imprégnées.</span></p><p style="text-align: justify;"><br /><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">Bel été de l’automne, je replonge dans ce parfum âcre et sucré, boiseux, et mon vélo glisse entre rivière et pré, dans la douceur enveloppante où je remarque un premier fraîchissement.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;"><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;"><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><em><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">P.S: Si vous habitez Lausanne, c'est aujourd'hui la Nuit de la lecture. <a href="http://www.lanuitdelalecture.ch/" target="_blank"><span style="text-decoration: underline; color: #800000;">Programme ici</span></a>.</span></em></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><em><span style="font-size: medium;"><span style="font-family: verdana,geneva;"><img id="media-153342" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/01/00/2622318933.jpg" alt="été,penser,soi-même,sartre,camus,cioran,liberté,identité,valeurs,narcissisme,hitler,ambre,ocre" width="64" height="90" />Sur mon autre blog Genève bouge, vie et politique genevoise: <a href="http://genevebouge.blog.tdg.ch/archive/2013/09/28/mobilite-mme-kunzler-prevoit-bien-le-blocage-de-geneve-2-et.html" target="_blank"><span style="text-decoration: underline; color: #800000;">Mobilité</span></a></span><a href="http://genevebouge.blog.tdg.ch/archive/2013/09/28/mobilite-mme-kunzler-prevoit-bien-le-blocage-de-geneve-2-et.html" target="_blank"><span style="text-decoration: underline; color: #800000;">, </span></a><span style="font-family: verdana,geneva;"><a href="http://genevebouge.blog.tdg.ch/archive/2013/09/28/mobilite-mme-kunzler-prevoit-bien-le-blocage-de-geneve-2-et.html" target="_blank"><span style="text-decoration: underline; color: #800000;">le blocage de Genève est bien planifié</span></a>.</span></span></em></p><h3 id="p1"> </h3><p> </p><p> </p><p><span style="font-size: small;">Et toujours</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: small;"><span style="color: #800000;"><a href="http://www.doa-album.ch" target="_blank"><span style="color: #800000;">www.doa-album.ch</span></a></span>:</span></p><p style="text-align: justify;"><a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/02/01/3398144286.jpg" target="_blank"><img id="media-153339" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/00/00/582636588.jpg" alt="été,penser,soi-même,sartre,camus,cioran,liberté,identité,valeurs,narcissisme,hitler,ambre,ocre," width="175" height="175" /></a></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">L’été de l’automne est aisément reconnaissable.</span><br /><span style="font-family: verdana,geneva; font-size: medium;">La lumière est feutrinée, elle se couche, oblique. Les particules d’humide et de poussière n’étincèlent plus comme en pleine juillettude.</span></p>
Marc Alpozzo
http://marcalpozzo.blogspirit.com/about.html
L’angoisse de l’homme libre ou l’absence de Dieu dans la philosophie de Sartre
tag:marcalpozzo.blogspirit.com,2013-01-01:2422931
2013-01-01T08:54:00+01:00
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L’angoisse sartrienne nous engage dans une épreuve. Pour Sartre, cette...
<p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;"><strong>L’angoisse sartrienne nous engage dans une épreuve. Pour Sartre, cette épreuve est celle de la liberté, dont le sentiment d’angoisse est le révélateur. L’angoisse est, en elle-même, chez Sartre, à l’origine d’une remise en question de soi. Certes, l’angoisse sartrienne n’a rien à nous dévoiler par elle-même. Pour <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/heidegger" target="_blank" rel="noopener">Sartre</a></span>, <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2016/08/31/sartre-ou-la-liberte-angoissante-3078895.html" target="_blank" rel="noopener">la question phénoménologique de l’angoisse</a></span> se concentre précisément sur cette <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2008/03/12/le-fardeau-de-la-liberte-note-sur-sartre.html" target="_blank" rel="noopener">question de la liberté humaine</a></span> qui, engageant également une disposition permanente, ne déclenche jamais à proprement parler un ébranlement – c’est-à-dire une crise –, mais est l’expression d’une appréhension à affronter ses possibilités. La « vraie vie », nous dit Sartre, n’est pas ailleurs, <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2020/03/29/la-proximite-et-la-distance-de-la-conscience-note-sur-sartre-3148556.html" target="_blank" rel="noopener">elle est dans la conscience</a></span>, elle est dans notre rapport aux autres ; elle est dans cette liberté inconditionnée que l’on reçoit en héritage dès notre <span style="text-align: justify;">arrivée</span> au monde. Il convient sur ce point d’élucider cette interprétation phénoménologique de l’angoisse. <span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Cet article est tiré d'une allocution prononcée à Cornillon le 13 juillet 2011 lors d'un colloque organisé sur</span><span style="color: #000000;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> <span style="color: #800000;"><em>Dieu</em></span> </span></span><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">par le philosophe André Villani. Paru dans les</span><span style="color: #000000;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><span style="color: #800000;"><em> Carnets de la Philosophie</em></span></span></span><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><em>,</em> numéro 17, de juin 2011, il est désormais en accès libre dans l'</span><span style="color: #000000;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><span style="color: #800000;"><em>Ouvroir</em></span>.</span></span></strong></span></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/01/3391282842.jpg" id="media-914036" alt="" /></p><p style="text-align: center;"> </p><p style="text-align: center;"><img id="media-872177" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/02/2196130626.jpg" alt="sartre1.jpg" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Jean-Paul Sartre</span></p><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>§. 1– La liberté et sa nudité</strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong> </strong>« Pour (la conscience), nous dit Sartre, mettre hors de circuit un existant particulier, c’est se mettre elle-même hors de circuit par rapport à cet existant. En ce cas, elle lui échappe, elle est hors d’atteinte, il ne saurait agir sur elle, elle est retirée <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2020/04/30/l-anthropologisation-du-neant-chez-sartre-3148534.html" target="_blank" rel="noopener"><em style="mso-bidi-font-style: normal;">par-delà un néant</em></a></span>. Cette possibilité pour la réalité humaine de sécréter un néant qui l’isole, Descartes après les Stoïciens, lui a donné un nom : c’est la <em style="mso-bidi-font-style: normal;">liberté</em>. »<a style="mso-footnote-id: ftn1;" title="" href="http://www.blogspirit.com/admin/posts/post.php?blog_id=23322&blog_type=weblog#_ftn1" name="_ftnref1"></a><span class="MsoFootnoteReference"><span style="mso-special-character: footnote;"><span class="MsoFootnoteReference"><span style="line-height: 115%; mso-fareast-font-family: 'Times New Roman'; mso-fareast-language: FR; mso-ansi-language: FR; mso-bidi-language: AR-SA;">[1]<br /><br /></span></span></span></span></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> Ce passage de <em style="mso-bidi-font-style: normal;">L’Être et le Néant</em> est absolument capital. D’abord, parce que Sartre y introduit l’idée fondamentale de la liberté humaine. Mais également parce qu’il justifie cette liberté qui s’impose à l’homme comme sa seule essence. La liberté étant néantisante selon Sartre, il faut la comprendre comme un « petit lac de non-être » offrant les moyens à l’homme de s’arracher à soi et à l’être. L<span style="mso-bidi-font-weight: bold;">a liberté de la conscience pour Sartre, se fond avec son existence. Or, cela veut précisément dire que la conscience en tant que liberté doit être conscience (de) soi comme telle. Elle est une conscience consciente de sa liberté dans l’angoisse.<br /><br /></span></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> <em style="mso-bidi-font-style: normal;"><span style="mso-bidi-font-weight: bold;">Quid</span></em><span style="mso-bidi-font-weight: bold;"> de l’angoisse ? <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2016/08/31/sartre-ou-la-liberte-angoissante-3078895.html" target="_blank" rel="noopener">Pour Sartre, l’angoisse est angoisse de ma liberté</a></span>. Parce que « c’est dans l’angoisse que l’homme prend conscience de sa liberté »<a style="mso-footnote-id: ftn2;" title="" href="http://www.blogspirit.com/admin/posts/post.php?blog_id=23322&blog_type=weblog#_ftn2" name="_ftnref2"></a><span class="MsoFootnoteReference"><span style="mso-special-character: footnote;"><span class="MsoFootnoteReference"><span style="line-height: 115%; mso-fareast-font-family: Calibri; mso-fareast-language: EN-US; mso-ansi-language: FR; mso-bidi-language: AR-SA; mso-bidi-font-weight: bold; mso-bidi-font-family: 'Times New Roman';">[2]</span></span></span></span>, ce qui signifie explicitement que l’homme ne pourrait prendre conscience de sa liberté sans être immédiatement pris d’angoisse. Et il ne serait pas excessif d’affirmer que l’angoisse sartrienne <em style="mso-bidi-font-style: normal;">est</em> le mode de révélation de notre liberté. Pourquoi ? <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2008/03/12/le-fardeau-de-la-liberte-note-sur-sartre.html" target="_blank" rel="noopener">Parce qu’au moment où je réalise que suis absolument libre, cette prise de conscience subite est aussitôt sujette à une angoisse</a></span>.<br /><br /></span></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> <span style="mso-spacerun: yes;"> </span>En revanche, l’angoisse étant angoisse devant soi, elle est, selon Sartre, une sorte de vertige devant notre liberté essentiellement.<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> L’homme agit. Il est pris dans l’action, et ne saurait se substituer à celle-ci, car elle n’est déterminée par rien si ce n’est par lui-même. Ni déterminisme, ni cause extérieure ne sauront donc venir contrecarrer ma liberté. Certes, en fonction de la difficulté de la tâche qu’il m’aura été confiée par exemple, ou de l’étroitesse du chemin qui longe le précipice, une certaine conduite m’est imposée, un certain degré de déterminisme pèse sur mon action, mais ça ne saurait être suffisant pour être totalement la <em style="mso-bidi-font-style: normal;">cause</em> de mon échec dans ma mission ou de ma chute dans le précipice. Je peux par exemple avoir <em style="mso-bidi-font-style: normal;">horreur</em> du vide, ce qui me rendra très prudent ; je peux également choisir de me jeter dans le vide, c’est-à-dire de me suicider. Cette possibilité tout offerte de mettre <em style="mso-bidi-font-style: normal;">librement</em> fin à ma vie, fait le sel de cette existence, lui confère son caractère unique, à la fois, capitale et élémentaire, puisque ma liberté inconditionnée me donne la possibilité à chaque instant d’accepter ou de refuser ma situation dans le monde. C’est d’ailleurs la peur de la mort, mon horreur du vide qui crée cette « contre-angoisse ». Tel un garde-fou, cette dernière transmue ma liberté inconditionnée en « indécision ». Mais « l’indécision, à son tour, appelle la décision : on s’éloigne brusquement du bord du précipice et on reprend sa route »<a style="mso-footnote-id: ftn3;" title="" href="http://www.blogspirit.com/admin/posts/post.php?blog_id=23322&blog_type=weblog#_ftn3" name="_ftnref3"></a><span class="MsoFootnoteReference"><span style="mso-special-character: footnote;"><span class="MsoFootnoteReference"><span style="line-height: 115%; mso-fareast-font-family: Calibri; mso-fareast-language: EN-US; mso-ansi-language: FR; mso-bidi-language: AR-SA; mso-bidi-font-weight: bold; mso-bidi-font-family: 'Times New Roman';">[3]</span></span></span></span>.<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> Voilà exposé l’objet de mon angoisse : je m’angoisse devant tous les possibles qui s’ouvrent à moi. Car, quoi que j’en dise, il me faudra bien choisir. Or, si au moment de choisir, je suis pris de vertige, c’est justement parce que le moi qui aura choisi ne dépend pas du moi qui est là en train de choisir, ni de celui qui a précédemment choisi. Il y a au milieu la manifestation de la liberté qui s’exprime dans ce rien qui sépare le moi du présent du moi de l’avenir un néant à la manière d’un blanc.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>§. 2 – Le fardeau de la liberté</strong></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Ceci exposé, essayons désormais de sonder cette liberté qui est à l’origine de l’angoisse. Selon Sartre, l’homme est seul dans la nature à disposer de la volonté. Aussi,<span style="color: #800000;"> <a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2013/09/17/l-humanisme-de-sartre-2978158.html" target="_blank" rel="noopener">il est seul à être libre</a></span>. Et, si la liberté n’a pas d’essence, elle est toutefois au fondement de toutes les essences, puisque, en agissant, l’homme entretient avec le monde un rapport fondamental, celui de transcender toute relation déterministe en affirmant ses propres possibilités. Or, l’une des possibilités fondamentales, la toute première, c’est <em style="mso-bidi-font-style: normal;">ma</em> liberté. Elle est la possibilité pour moi de secréter mon propre néant, voire d’être mon propre fondement. Écoutons Sartre : « Motifs et mobiles (n’ont alors) de sens qu’à l’intérieur d’un ensemble pro-jeté qui est justement un ensemble de non-existants. »<a style="mso-footnote-id: ftn4;" title="" href="http://www.blogspirit.com/admin/posts/post.php?blog_id=23322&blog_type=weblog#_ftn4" name="_ftnref4"></a><span class="MsoFootnoteReference"><span style="mso-special-character: footnote;"><span class="MsoFootnoteReference"><span style="line-height: 115%; mso-fareast-font-family: Calibri; mso-fareast-language: EN-US; mso-ansi-language: FR; mso-bidi-language: AR-SA; mso-bidi-font-weight: bold; mso-bidi-font-family: 'Times New Roman';">[4]<br /><br /></span></span></span></span></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> <span style="mso-spacerun: yes;"> </span>Et de rajouter : « du seul fait, […] que j’ai conscience des motifs qui sollicitent mon action, ces motifs sont déjà des objets transcendants pour ma conscience, ils sont dehors ; en vain, chercherai-je à m’y raccrocher : j’y échappe par mon existence même. Je suis condamné à exister pour toujours par-delà mon essence, par-delà les mobiles et les motifs de mon acte : <em style="mso-bidi-font-style: normal;">je suis condamné à être libre </em>»<a style="mso-footnote-id: ftn5;" title="" href="http://www.blogspirit.com/admin/posts/post.php?blog_id=23322&blog_type=weblog#_ftn5" name="_ftnref5"></a><span class="MsoFootnoteReference"><span style="mso-special-character: footnote;"><span class="MsoFootnoteReference"><span style="line-height: 115%; mso-fareast-font-family: Calibri; mso-fareast-language: EN-US; mso-ansi-language: FR; mso-bidi-language: AR-SA; mso-bidi-font-weight: bold; mso-bidi-font-family: 'Times New Roman';">[5]</span></span></span></span>. Voilà l’une des réflexions sartriennes les plus célèbres et les plus emblématiques. Cette condamnation, on peut la considérer comme un fardeau, c’est-à-dire que la liberté, je ne peux ni la refuser, ni en réchapper. Or, cette liberté est absolue, et l’homme ne saurait se libérer de son projet. On retrouve cette liberté dans ses choix empiriques, dans ses goûts ou ses envies ; on retrouve également cette liberté dans des traits de caractères qui, quoi qu’en disent les psychologues, renvoient à des choix originels, et explicitent le désir d’être. Voilà pourquoi, si la liberté peut être une fin, elle est surtout un fardeau.<br /><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> C’est en ce seul sens, que nous devons comprendre la liberté sartrienne comme une liberté angoissante. Car nous pouvons à tout moment renoncer à notre choix, et s’en choisir un nouveau. Nous angoissons de la fragilité du choix puisque nous avons « pleinement conscience du choix que nous sommes » (EN, p. 541). Aussi est-il impossible de ne pas reconnaître que nous sommes entièrement libres de donner la direction qui nous convient à notre vie et à nos choix. Alors s’ouvre à l’homme la possibilité radicale de se choisir, et de conserver la possibilité en permanence de modifier son avenir. Cette angoisse, dépendant essentiellement de toutes les possibilités qui s’ouvrent à lui, « est témoin de cette modificabilité perpétuelle de notre projet initial »<a style="mso-footnote-id: ftn6;" title="" href="http://www.blogspirit.com/admin/posts/post.php?blog_id=23322&blog_type=weblog#_ftn6" name="_ftnref6"></a><span class="MsoFootnoteReference"><span style="mso-special-character: footnote;"><span class="MsoFootnoteReference"><span style="line-height: 115%; mso-fareast-font-family: Calibri; mso-fareast-language: EN-US; mso-ansi-language: FR; mso-bidi-language: AR-SA; mso-bidi-font-weight: bold; mso-bidi-font-family: 'Times New Roman';">[6]</span></span></span></span>. Être libre équivaut à être en sursis<a style="mso-footnote-id: ftn7;" title="" href="http://www.blogspirit.com/admin/posts/post.php?blog_id=23322&blog_type=weblog#_ftn7" name="_ftnref7"></a><span class="MsoFootnoteReference"><span style="mso-special-character: footnote;"><span class="MsoFootnoteReference"><span style="line-height: 115%; mso-fareast-font-family: Calibri; mso-fareast-language: EN-US; mso-ansi-language: FR; mso-bidi-language: AR-SA; mso-bidi-font-weight: bold; mso-bidi-font-family: 'Times New Roman';">[7]</span></span></span></span>, car notre existence jusqu’à la mort, engage à chaque instant la possibilité imprévisible et incompréhensible de changer, de renoncer, de s’engager, etc. </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> </span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1071885" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/02/282281467.2.jpg" alt="jean-paul sartre,auschwitz,dieu,gabriel marcel,etienne gilson,cornillon,andré villani" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Le voyageur incertain de Jérémie Dru</span></p><p><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> Aussi voudrais-je ici émettre un avis : ce qui apparait clairement, c’est que Sartre présente l’angoisse comme n’étant pas spécifiquement révélatrice de soi, mais conscience de ma liberté. Or, à quoi l’homme sartrien doit-il vraiment faire face ? À sa liberté créatrice. Étant essentiellement pro-jet, l’homme sartrien s’élance vers une existence contingente dans laquelle il sera forcé de faire des choix. La liberté étant de choisir, ne pas choisir équivalant à choisir encore<a style="mso-footnote-id: ftn8;" title="" href="http://www.blogspirit.com/admin/posts/post.php?blog_id=23322&blog_type=weblog#_ftn8" name="_ftnref8"></a><span class="MsoFootnoteReference"><span style="mso-special-character: footnote;"><span class="MsoFootnoteReference"><span style="line-height: 115%; mso-fareast-font-family: Calibri; mso-fareast-language: EN-US; mso-ansi-language: FR; mso-bidi-language: AR-SA; mso-bidi-font-weight: bold; mso-bidi-font-family: 'Times New Roman';">[8]</span></span></span></span>. L’homme est donc tel qu’il se veut, tel qu’il se conçoit. Il n’y a pas de doute. Aucun sentiment, aucune émotion, aucune souffrance n’est livré au déterminisme extérieur. Certes, l’homme sartrien peut bien souffrir de la fatigue, de la honte, d’une infirmité, mais il aura encore le choix de leur donner un sens. Cela relève de l’usage de cette pure liberté, c’est-à-dire poser des valeurs. D’où cette difficulté : si l’homme sartrien se révèle dans l’action, est-il ce qu’il se fait ou, au contraire, à l’image de l’homme antique, est-il un homme qui, ayant conscience qu’il ne peut infléchir sur tous les événements extérieurs et intérieurs, accepte toutefois qu’il est en possession du pouvoir d’adopter une attitude libre vis-à-vis de ce déterminisme extérieur : la colère, la joie, l’indifférence, etc. ? Placé « en situation », l’homme sartrien serait cet homme libre de donner un sens aux événements ? Sartre ne précise-t-il pas « qu’un homme ne rencontre d’obstacle que dans le champ de sa liberté », et qu’il n’y a pas « d’obstacle absolu » (EN, p. 569) ? Par exemple, si je me retrouve aux pieds d’un rocher à escalader<a style="mso-footnote-id: ftn9;" title="" href="http://www.blogspirit.com/admin/posts/post.php?blog_id=23322&blog_type=weblog#_ftn9" name="_ftnref9"></a><span class="MsoFootnoteReference"><span style="mso-special-character: footnote;"><span class="MsoFootnoteReference"><span style="line-height: 115%; mso-fareast-font-family: Calibri; mso-fareast-language: EN-US; mso-ansi-language: FR; mso-bidi-language: AR-SA; mso-bidi-font-weight: bold; mso-bidi-font-family: 'Times New Roman';">[9]</span></span></span></span>, cet obstacle, pour Sartre, n’en est un que pour ma volonté. Vais-je choisir de l’escalader, ou vais-je choisir de rebrousser chemin ? En réalité, c’est par ma seule liberté que je <em style="mso-bidi-font-style: normal;">choisirais</em> que ce rocher est « escaladable » ou « non escaladable ». Autant dire que cette volonté sartrienne est toute-puissante. Et quand l’obstacle montre une trop forte résistance, la volonté est encore assez puissante pour donner un sens à cette résistance, car le déterminisme qui s’oppose à elle, loin de l’affaiblir, éclaire cette liberté, puisqu’il oblige l’homme à choisir. Le subjectivisme auquel Sartre recourt, devient là, un objectivisme impliquant son entière responsabilité. Face au « coefficient d’adversité » que représente le rocher, je fais un choix, et par ce choix, je me choisis librement un être, puisque cet être est réduit au faire. Problème : ce choix représente-t-il véritablement cette subjectivité ? Il la représente dans sa totalité, nous répond Sartre, d’où l’obligation du choix, mais également d’en endosser la responsabilité pour l’homme sartrien. Dans l’angoisse, la réalité-humaine saisit certes son absolue liberté. </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> </span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Pour Sartre, l’homme se trouve impuissant à triompher du néant. Le néant devenant cette rupture ontologique, sans cesse récurrente, mais finalement jamais surmontée, qui rattache l’homme à lui-même, parce qu’il se doit d’assumer les notions d’instant, de temps, de changement. L’homme sartrien, fondé sur le <em style="mso-bidi-font-style: normal;">Cogito</em> cartésien, saisit sa pensée dans l’existence, ce qui fait que chaque réalité-humaine, dans sa particularité de devoir assumer son absolue liberté, est seule. L’homme peut par exemple se traiter durement : c’est-à-dire imaginer qu’il est passé à côté de sa vi
Bernard LECOMTE
http://lecomte-est-bon.blogspirit.com/about.html
La démocratie vue par...
tag:lecomte-est-bon.blogspirit.com,2012-01-09:2516698
2012-01-09T09:00:00+01:00
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Normal 0 21...
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Marc Alpozzo
http://marcalpozzo.blogspirit.com/about.html
Sartre ou la liberté angoissante
tag:marcalpozzo.blogspirit.com,2011-09-01:3078895
2011-09-01T12:54:00+02:00
2011-09-01T12:54:00+02:00
La liberté de la conscience pour Sartre , se fond avec son existence....
<p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>La liberté de la conscience pour <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/sartre" target="_blank" rel="noopener">Sartre</a></span>, se fond avec son existence. Or, cela veut précisément dire que la conscience en tant que liberté doit être conscience (de) soi comme telle. Elle est même une conscience consciente de sa liberté dans l’angoisse. </strong></span><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>Cette longue étude est parue dans le numéro 16, des <span style="color: #800000;"><em>Carnets de la philosophie</em></span>. Elle est désormais disponible dans l'<span style="color: #800000;"><em>Ouvroir</em></span>.</strong></span></p><p class=""> </p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/00/1659183705.jpg" id="media-931717" alt="" /></p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong><em><br /><span style="font-size: 14pt; color: #800000;">Première partie </span></em><span style="font-size: 14pt; color: #800000;"> </span></strong></span></p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>I. </strong><strong>Les choix angoissés de l’angoisse</strong></span></p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> <strong>La structure néantisante de la temporalité</strong></span></p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> <em>Quid</em> de l’angoisse ? Tandis que Heidegger considère l’angoisse comme la saisie du néant de soi, Sartre oppose au philosophe allemand une angoisse qui est angoisse de notre liberté. Parce que « c’est dans l’angoisse que l’homme prend conscience de sa liberté »<span class=""><span class="">[1]</span></span>, cela signifie explicitement que l’homme ne pourrait prendre conscience de sa liberté sans être immédiatement pris d’angoisse. Il n’est pas même excessif d’affirmer que l’angoisse sartrienne <em>est</em> le mode de révélation de notre liberté. Pourquoi ? Parce qu’au moment où je réalise que suis absolument libre, cette prise de conscience subite est aussitôt sujette à une angoisse.</span></p><p class="" style="text-align: justify;"> </p><p class="" style="text-align: justify;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><em>L’angoisse et la peur</em></span></strong></p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> Une angoisse qui, à la manière de Heidegger, ne devra pas être confondue avec la peur. Car la peur est toujours peur devant quelque chose, peur devant n’importe quel étant. L’angoisse étant en revanche angoisse devant soi. Un « soi » sartrien à distinguer toutefois du « soi » heideggérien, en ce sens que l’angoisse est, selon Sartre, une sorte de vertige devant notre liberté essentiellement. Écoutons-le : « Le vertige est angoisse dans la mesure où je redoute non de tomber dans le précipice mais de m’y jeter »<span class=""><span class="">[2]</span></span>. Par exemple, sur le champ de bataille, le soldat a bien sûr peur de la mort. Il a peur d’être tué. Mais cette peur-là n’a pourtant rien à voir avec l’angoisse qui tient le même soldat au moment où il a « peur d’avoir peur », c’est-à-dire qu’il ressent l’angoisse de ne savoir résister à sa peur. À cet instant-là, cette peur précise n’est plus assimilable à toute autre forme de peur d’un événement ou d’un étant extérieur à soi. Cette angoisse que ressent le soldat au moment où la bataille fait rage, est cette angoisse devant lui-même. Vais-je tenir ? Vais-je trouver le courage de continuer ? Vais-je au contraire <em>flancher</em> ? Le soldat fait désormais face à l’angoisse, dans la mesure où il s’est soustrait du déterminisme des choses. N’étant plus agit par celles-ci, donc pris dans leur tourbillon, mais agissant désormais sur elles, il se découvre à présent suspendu au-dessus du vide. Toutes les conduites sont alors possibles, et seul le soldat disposera du choix de décider laquelle adopter. Le voilà faisant connaissance avec sa liberté.</span></p><p class="" style="text-align: justify;"> </p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> <strong><em>L’homme acteur de sa vie</em></strong></span></p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Ceci établi, prenons le temps d’une mise au point : l’homme agit. Il est pris dans l’action. Aussi, ne saurait-il se substituer à celle-ci. Néanmoins, cette action n’est déterminée par rien si ce n’est par lui-même. Face à une fonction ou un prix honorifique serais-je désormais à la hauteur d’une mission que l’on va me confier ou d’honorer le prix que l’on m’aura donné ; empruntant un chemin escarpé longeant un profond précipice, vais-je pouvoir éviter le « danger de mort » qui s’ouvre sous mes pieds. Toutes les conduites qui me sont loisibles d’adopter seront justement « <em>mes</em> possibilités » (EN, p. 67). Il ne dépend que de moi de réussir ou d’échouer la mission qui m’a été confiée, de faire attention au précipice ou de m’y jeter. Ni déterminisme, ni cause extérieure ne sauront venir contrecarrer ma liberté. « Le possible que je fais <em>mon</em> possible concret ne peut paraître comme mon possible qu’en s’enlevant sur le fond de l’ensemble des possibles logiques que comporte la situation. Mais ces possibles refusés, à leur tour, n’ont d’autre être que leur « être-tenu », c’est moi qui les maintiens dans l’être et, inversement, leur non-être présent est un « ne pas devoir être tenu »<span class=""><span class="">[3]</span></span>. Certes, en fonction de la difficulté de la tâche qu’il m’aura été confiée, par exemple, ou de l’étroitesse du chemin qui longe le précipice, une certaine conduite m’est imposée, un certain degré de déterminisme pèse sur mon action, mais cela ne saurait être suffisant pour être totalement la <em>cause</em> de mon échec dans ma mission ou de ma chute dans le précipice. Je peux par exemple, avoir <em>horreur</em> du vide, ce qui me rendra très prudent ; je peux également choisir de me jeter dans le vide, c’est-à-dire de me suicider. Cette possibilité toute offerte de mettre <em>librement</em> fin à ma vie, fait le sel de cette existence, lui confère son caractère unique, à la fois capitale et élémentaire, puisque ma liberté inconditionnée me donne la possibilité à chaque instant d’accepter ou de refuser ma situation dans le monde. C’est d’ailleurs la peur de la mort, mon horreur du vide qui crée cette « contre-angoisse ». Tel un garde-fou, cette dernière transmue ma liberté inconditionnée en « indécision ». Mais « l’indécision, à son tour, appelle la décision : on s’éloigne brusquement du bord du précipice et on reprend sa route »<span class=""><span class="">[4]</span></span>.</span></p><p class="" style="text-align: justify;"> </p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> <strong><em>L’angoisse devant le choix</em></strong></span></p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Voilà exposé l’objet de mon angoisse : je m’angoisse devant tous les possibles qui s’ouvrent à moi. Car, quoi que j’en dise, il me faudra bien choisir. Or, j’angoisse parce que ma liberté se découvre en moi sur le mode du « n’être pas », c’est-à-dire d’un <em>rien</em> qui vient irrémédiablement s’insinuer entre les motifs et l’acte. Ma conscience n’a pas de motifs en elle puisqu’elle est vide. Aussi va-t-elle les poser, pour ensuite leur donner un sens, c’est-à-dire une signification et une importance. « Ce n’est pas <em>parce que</em> je suis libre que mon acte échappe à la détermination des motifs, mais, au contraire, la structure des motifs comme inefficients est condition de ma liberté »<span class=""><span class="">[5]</span></span>. Mon acte dépend de mon avenir qui ne dépend pas de mon présent. On voit là toute l’importance de la structure néantisante de la temporalité dans le jeu ma liberté. Le choix de ma décision repose entièrement sur mes épaules. C’est <em>moi</em> qui vais choisir. Et je suis seul apte à décider de ce choix. On peut tout autant, comme pour le joueur, être pris d’une « angoisse devant le passé » (EN, p. 69). Aussi, est-ce l’histoire ordinaire du joueur repenti qui a « librement et sincèrement » choisi de ne plus jamais jouer, mais qui, une fois placé devant le tapis vert, ne sait plus tenir ses bonnes résolutions. En lui, se livre alors ce « débat intérieur » sur fond de liberté inconditionnée qu’il s’agit de comprendre sur le mode du « n’être pas ». Hier encore, ce joueur pensait en avoir définitivement fini avec la spirale infernale du jeu. Il croyait sa résolution inébranlable. Mais voilà, dans l’angoisse, il saisit le statut précaire de sa décision, l’illusion de son aspect irréversible. Dans le flux temporel, cette décision est bien la sienne, mais sur le mode de la non-coïncidence. Entre le moi qui a choisi de ne plus jouer la veille, et le moi qui craque aujourd’hui, reprenant ainsi le jeu comme si de rien n’était, il y a ce néant qui s’est logé entre le moi de la veille et le moi présent, le séparant de lui-même, faisant de la décision crue efficace et irréversible, une conquête de chaque instant.<br /><br /></span></p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Or, si au moment de choisir je suis pris de vertige, c’est justement parce que le moi qui aura choisi ne dépend pas du moi qui est là en train de choisir, ni de celui qui a précédemment choisi. Il y a au milieu la manifestation de la liberté qui s’exprime dans ce rien qui sépare le moi du présent du moi de l’avenir un néant à la manière d’un blanc.<br /><br /></span></p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> À ses arguments, toutes les objections des détracteurs de la liberté, tenant des conditions déterministes fondées sur les principes psychologiques, sont rejetées par Sartre. Et même si l’angoisse ne saurait être la <em>preuve</em> de la liberté humaine, elle en demeure la condition essentielle, fondée sur le mode nécessaire de l’interrogation. Cette angoisse est celle d’un moi qui n’est jamais au repos. Chaque fois, à chaque instant, il se doit de choisir, et ainsi de se <em>re</em>faire. Cette liberté est permanente, et sans la liberté de ne pas choisir. À la manière d’une condamnation, j’assume cette liberté qui m’est donnée entière et irréversible. Car je vis libre et sans excuse. Voilà d’ailleurs pourquoi « dans l’angoisse la liberté s’angoisse devant elle-même en tant qu’elle n’est jamais sollicitée ni entravée par <em>rien</em>. »<span class=""><span class="">[6]</span></span></span></p><p class="" style="text-align: justify;"> </p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> <strong>La liberté angoissée devant elle-même</strong></span></p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">L’angoisse sartrienne, à l’instar de l’angoisse heideggérienne, est rare. D’abord parce que l’homme d’action est bien trop affairé quotidiennement pour se préoccuper outre mesure de sa liberté. Il s’agite, s’affaire, se divertit. La vie va vite. Bien sûr, je peux à n’importe quel instant découvrir ma liberté. Au moment où j’allume cette cigarette qui me révèle ma possibilité concrète ou mon désir de fumer, ou lorsque je débouchonne ce stylo et que j’attrape cette feuille blanche qui m’apprend « ma possibilité la plus immédiate » de travailler à cet article. Mais la plupart du temps, je suis en action, et mon action fonctionne sur le mode <em>irréfléchi</em>. Me voilà, dans la majeure partie des cas, et « à chaque instant lancé dans le monde et engagé » (EN, p. 75). Lorsque je réalise mes actes, je les crois et les découvre comme s’ils étaient « des exigences, des urgences, des ustensiles » (EN, p. 74). Je ne me sens pas libre, mais dépendant de leur caractère d’utilité. Je me sens englué, malgré ma volonté, dans le monde de la productivité et des nécessités matérielles. Pourtant, si j’interrompais juste un instant cet empressement aveugle, et que je réfléchissais à ce que je suis en train de faire, je découvrirais alors que je rédige un article, que j’aligne des mots, que je construis des phrases ; qu’à la fois je produis un texte, mais que j’analyse et interprète la philosophie d’un phénoménologue du XX<sup>ème </sup>siècle, que cela me demande un effort de concentration et de créativité, et qu’à tout moment, je puis me sentir épuisé, n’en pouvoir plus, et ainsi abandonner mon entreprise. Cet article est donc de l’ordre de <em>mon</em> possible. Voilà pourquoi il est concrètement une possibilité pour laquelle je peux ressentir de l’angoisse. Car, ma liberté exerçant en permanence son « pouvoir néantisant » peut, à tout instant, me faire lâcher, et je n’aurais aucune certitude à ce propos jusqu’à l’instant définitif, celui où j’aurais écrit en bas de la dernière page du texte, enfin établi, le mot « Fin ».</span></p><p class="" style="text-align: justify;"> </p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> <strong><em>La possibilité de mon possible</em></strong></span></p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Mais pour que, soudain, cette idée m’angoisse, il me faut réaliser le néant en tant que possible qui me sépare, à chaque instant, de la réalisation de mon projet final. Or, la plupart du temps, je me réfugie derrière des actes rassurants. Je dois écrire cet article, et saisir le sens de ce devoir qui m’est dicté par les conventions sociales et les nécessités économiques, – donc le monde des besoins. Or, cela est suffisant pour éluder la question réelle, c’est-à-dire celle de ce travail comme étant « <em>ma</em> possibilité ». En d’autres termes, l’échéance posée par le rédacteur en chef de cette revue est largement suffisante pour que, en en saisissant le sens, je sois à ma table de travail en train de rédiger. J’occulte alors toute « possibilité du quiétisme, du refus de travail et finalement du refus du monde et de la mort »<span class=""><span class="">[7]</span></span>. Je me suis prémuni d’avoir à me poser les bonnes questions. Le sens de ce travail philosophique étant garanti par les valeurs communes dans lesquelles je suis engagé avec l’ensemble social. Le sens de mon travail m’étant ainsi donné par ces valeurs, je n’ai pas le sentiment d’avoir à m’interroger à son propos. Je me protège ainsi de « l’intuition angoissante » qui me révèlerait que je suis seul responsable de l’exigence que je m’impose. « Il s’ensuit que ma liberté est l’unique fondement des valeurs et que <em>rien</em>, absolument rien, ne me justifie d’adopter telle ou telle échelle de valeurs. »<span class=""><span class="">[8]</span></span> Il faut néanmoins se garder de croire que la conscience sartrienne chute ainsi dans le On, niant la valeur de sa liberté au profit de valeurs ambiantes. Alors que pour Heidegger le <em>Dasein</em>, plongé en immersion dans la quotidienneté ne peut jamais, sans la crise d’angoisse, s’emparer de lui-même pour se découvrir comme source absolue du sens du monde<span class=""><span class="">[9]</span></span>, la conscience sartrienne sitôt jetée au monde, et immédiatement mise « en situation ». Certes, le monde dans lequel la conscience est jetée est un monde de la préoccupation au même titre que le monde heideggérien, mais dès lors que je quitte un moment l’affairement, c’est-à-dire tous les garde-fous contre l’angoisse, dès lors que je suis, même malgré moi, « renvoyé à moi-même », puisque je suis responsable de moi dans l’avenir, alors tous ces garde-fous placés contre l’angoisse, sont mis en défaut. J’ai beau essayé de renvoyer mes actes aux valeurs communes, rien n’y fera. « J’émerge seul et dans l’angoisse en face du projet unique et premier qui constitue mon être, toutes les barrières, tous les garde-fous s’écroulent, néantisés par la conscience de ma liberté : je n’ai ni ne puis avoir recours à aucune valeur contre le fait que c’est moi qui maintiens à l’être les valeurs ; rien ne peut m’assurer contre moi-même, coupé du monde et de mon essence par ce néant que je <em>suis</em>, j’ai à réaliser le sens du monde et de mon essence : j’en décide, seul, injustifiable et sans excuse. »<span class=""><span class="">[10]</span></span> Le Néant et l’angoisse se situant dans la conscience, c’est-à-dire dans la vie intérieure, il me suffit de me dégager un moment du monde dans lequel je suis engagé pour que soudain, ma conscience prenne conscience de sa liberté. Cette compréhension « pré-ontologique » de mon essence s’oppose à <em>l’esprit de sérieux</em> par lequel la conscience saisit les exigences communes du monde, celles que l’on partage en refusant d’y réfléchir, de crainte d’affronter sa liberté, et de comprendre que ces valeurs procèdent de celle-ci, car seule ma liberté donne du sens au monde. L’angoisse est alors ce par quoi je me saisis comme libre et comme seul auteur du sens que je confère au monde<span class=""><span class="">[11]</span></span>.</span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1071101" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/02/3473576065.jpg" alt="sartre,l'être et le néant" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Jean-Paul Sartre et Cohn-Bendit en 1974 (Photo : Alain Nogues)</span></p><p class="" style="text-align: justify;"> </p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-size: 14pt; color: #800000;"><strong><em><span style="font-family: georgia, palatino, serif;">2ème partie</span></em></strong></span></p><p class="" style="text-align: justify;"> </p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>1. </strong><strong>La fuite de la conscience devant l’angoisse</strong></span></p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong><br /></strong><strong>Contingence et possibilités</strong></span></p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Je peux toutefois résister à « cette saisie réflexive de la liberté par elle-même » (EN, p. 77) et même si, cette défense réflexive contre l’angoisse ne peut en réalité rien contre « l’évidence de la liberté » (EN, p. 78) sartrienne.</span></p><p class="" style="text-align: justify;"> </p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> <strong><em>Les deux premières fuites</em></strong></span></p><p class="" style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Il est en réalité à notre
Marc Alpozzo
http://marcalpozzo.blogspirit.com/about.html
Sartre et le regard d'autrui
tag:marcalpozzo.blogspirit.com,2011-02-09:2060881
2011-02-09T18:38:00+01:00
2011-02-09T18:38:00+01:00
On trouve, à propos du regard d’autrui, de très longues descriptions...
<p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt;"><strong style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino;">On trouve, à propos du regard d’autrui, de très longues descriptions phénoménologiques dans le grand œuvre de <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/sartre" target="_blank" rel="noopener">Sartre</a></span>, <em>L’Être et le Néant</em>. Elles vont ici occuper mon analyse. On verra ainsi comment une relation intime noue subtilement ma <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2016/08/31/sartre-ou-la-liberte-angoissante-3078895.html" target="_blank" rel="noopener">liberté</a></span> au regard d’autrui. On verra également comment Sartre entraîne les consciences à ne pas savoir se hisser hors d’un conflit inextricable et infini.<span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"> Cette longue étude est p<strong><span style="box-sizing: border-box; margin: 0px; padding: 0px; border: 0px; outline: 0px; vertical-align: baseline; line-height: 25.2px; text-align: right; background-image: initial; background-attachment: initial; background-size: initial; background-origin: initial; background-clip: initial; background-position: initial; background-repeat: initial;">arue dans le numéro 15, des</span></strong><span style="color: #000000;"><strong><span style="box-sizing: border-box; margin: 0px; padding: 0px; border: 0px; outline: 0px; vertical-align: baseline; line-height: 25.2px; text-align: right; background-image: initial; background-attachment: initial; background-size: initial; background-origin: initial; background-clip: initial; background-position: initial; background-repeat: initial;"><span style="color: #800000;"><em> Carnets de la Philosophie</em></span></span></strong></span><strong><span style="box-sizing: border-box; margin: 0px; padding: 0px; border: 0px; outline: 0px; vertical-align: baseline; line-height: 25.2px; text-align: right; background-image: initial; background-attachment: initial; background-size: initial; background-origin: initial; background-clip: initial; background-position: initial; background-repeat: initial;">, de janvier 2011. La voici désormais en accès libre dans l'<span style="color: #800000;"><em>Ouvroir</em></span>.</span></strong></span></span></strong></span></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/02/2196130626.jpg" id="media-872205" alt="" /></p><p class="MsoNormal" style="text-align: justify; text-indent: 7.1pt; mso-pagination: none; mso-layout-grid-align: none; text-autospace: none;"> </p><p class="MsoNormal" style="text-align: justify; text-indent: 7.1pt; mso-pagination: none; mso-layout-grid-align: none; text-autospace: none;"> </p><p class="MsoListParagraphCxSpFirst" style="margin-left: 25.1pt; mso-add-space: auto; text-align: justify; text-indent: -18.0pt; mso-pagination: none; mso-list: l0 level1 lfo1; mso-layout-grid-align: none; text-autospace: none;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><!-- [if !supportLists]-->1.<span style="font-stretch: normal;"> </span><!--[endif]--><strong>Le regard d’Autrui comme scandale</strong></span></p><p class="MsoListParagraphCxSpLast" style="margin-left: 25.1pt; mso-add-space: auto; text-align: justify; mso-pagination: none; mso-layout-grid-align: none; text-autospace: none;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong> </strong></span></p><p class="MsoNormal" style="text-align: justify; text-indent: 7.1pt; mso-pagination: none; mso-layout-grid-align: none; text-autospace: none;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Je prends d’abord conscience de l’existence d’autrui par son corps. Par exemple, je vois cet homme à la machine à café du hall de l’université, et aussitôt, ce dernier m’apparaît comme un <em>objet</em>. Certes, dans cette « relation d’objectivité », je n’ai aucune certitude de son existence. Comment puis-je être sûr que ma <em>perception</em> ne me fait pas défaut ? Le problème bien sûr est cartésien. Mais Sartre sait se tirer de ce mauvais pas en montrant que la relation à l’autre ne s’épuise pas dans le champ de la connaissance abstraite. On ne trouve donc pas d’objectivation de la relation à l’autre. D’abord, parce qu’il s’agit pour Sartre d’en finir avec l’idéalisme établissant par exemple que cet ordinateur que je vois posé sur ma table de travail renvoie à une série infinie d’apparitions. Ensuite, parce qu’il veut, à la suite de Heidegger, nous montrer que l’homme n’est jamais enfermé dans son intériorité. Pour cela, il va montrer que ma liberté est livrée au regard d’autrui. Suivons l’exemple de Sartre : je suis installé dans un jardin public. Il y a des chaises le long d’une pelouse non loin de moi. Un homme passe près des chaises. Je vois cet homme marcher. Mais je ne le saisis pas une seule seconde comme chose parmi les choses. Certes, je le saisis comme objet, mais également comme homme. Je le saisis comme homme, et non en tant que seul objet, car je sais que je ne pourrais jamais le réduire à une chaise, ou à une poupée, et ainsi le ranger dans les « choses temporo-spatiales »<a title="" href="file:///C:/Users/Marc/Desktop/articles/Sartre%20et%20le%20regard.doc#_ftn1" name="_ftnref1"><span class="MsoFootnoteReference"><!-- [if !supportFootnotes]--><span class="MsoFootnoteReference">[1]</span><!--[endif]--></span></a>. Pourquoi ? Si cet homme se différencie des choses, et qu’ainsi, je l’en différencie, c’est parce qu’il peut, comme moi, distinguer cette pelouse, ces chaises. Il peut les <em>percevoir</em> comme je peux les percevoir. Je réalise alors que, ce que je tenais pour <em>mon</em> monde, m’est soudain « volé » par autrui. Ce monde qui était <em>mon</em> monde et dans lequel j’étais au centre, m’apparait soudain, par « l’apparition d’autrui », comme étant <em>aussi</em> le monde d’autrui. Cette <em>décentration</em> de mon monde en un monde pour autrui se fait par-devers « la centralisation que j’opère dans le même temps » (EN, p. 313). Néanmoins, autrui demeure un objet <em>pour moi</em>. On ne peut donc dire que mon monde m’échappe ; en réalité, il s’échappe à travers autrui. Le regard d’autrui est cause d’une désintégration partielle de mon univers, c’est-à-dire dans les limites contenues par cet univers, à la façon d’un trou de vidange ; le regard est cette faille ontologique par laquelle s’écoule perpétuellement mon monde. La lutte des consciences trouve là, dans le regard, une seconde vie. Cette désintégration de l’univers qu’autrui représente doit être comprise sur le mode symbolique. C’est-à-dire qu’autrui continue tranquillement de <em>faire</em> sa vie. Je suis là, au café Flore, en train d’écrire cet article. Autrui peut jeter un œil sur moi, mais en réalité, il ne voit rien, ni n’entend rien. Peut-être même me tourne-t-il le dos, tout entier absorbé à sa propre activité, lire <em>Le Monde</em>, prendre un café, bavarder avec un ami. Et pourtant, si je regarde cet homme, par exemple déplier et lire le journal du soir, je remarque que la rencontre avec autrui est dans le regard. « Au milieu du monde, je peux dire « homme-lisant » comme je dirais « pierre froide », « pluie fine » ; je saisis une « <em>Gestalt</em> » close dont la lecture forme la qualité essentielle et qui, pour le reste, aveugle et sourde, se laisse connaître et percevoir comme pure et simple chose temporo-spatiale et qui semble avec le reste du monde dans la pure relation d’extériorité. »<a title="" href="file:///C:/Users/Marc/Desktop/articles/Sartre%20et%20le%20regard.doc#_ftn2" name="_ftnref2"><span class="MsoFootnoteReference"><!-- [if !supportFootnotes]--><span class="MsoFootnoteReference">[2]</span><!--[endif]--></span></a> Par le regard, je fige l’autre en objet, en forme ou figure, et réciproquement. C’est dans cette seule mesure qu’autrui n’est pas constitué, mais seulement <em>rencontré</em>. C’est par là que se révèle l’antagonisme. Sartre conférant au conflit des consciences, – qui est le propre de ma relation à autrui –, un statut intégré à l’ontologie à partir du dévoilement de sa nature originelle. Autrui va soudain m’apparaître comme <em>menaçant</em>. Probablement même se révèlera-t-il à moi comme un « scandale » dans la mesure où, autrui n’étant pas seulement cet être qui, me volant mon monde, voit les mêmes choses que je vois, il est surtout celui qui me regarde : « Si autrui-objet se définit en liaison avec le monde comme l’objet qui <em>voit</em> ce que je vois, ma liaison fondamentale avec autrui-sujet doit pouvoir se ramener à ma possibilité permanente d’<em>être vu </em>par autrui. C’est dans et par la révélation de mon être-objet pour autrui que je dois pouvoir saisir la présence de son être-sujet. »<a title="" href="file:///C:/Users/Marc/Desktop/articles/Sartre%20et%20le%20regard.doc#_ftn3" name="_ftnref3"><span class="MsoFootnoteReference"><!-- [if !supportFootnotes]--><span class="MsoFootnoteReference">[3]</span><!--[endif]--></span></a> Probablement est-ce là la véritable <em>rencontre</em> avec autrui. C’est lorsque je m’aperçois que ses yeux ont erré sur la pelouse, ont embrassé le paysage environnant, et très naturellement, parce que je me trouvais à un endroit du paysage, sont venus se poser sur moi. Il est évident que je ne serai pas regardé comme la chaise sur laquelle je suis assis est regardée, ni comme la pelouse, ou ces arbres, etc. Pourquoi ? Parce qu’autrui que j’ai transformé par mon propre regard en objet, ne peux que me transformer à son tour en objet. « […] je ne saurais être un objet pour un objet » (EN, p. 314). Or, jusqu’ici, face à cet arbre qui me protégeait du soleil grâce à son épais feuillage, j’existais, j’étais là, assis, lisant un livre. J’agissais. Je faisais ce que j’avais à faire, sans y réfléchir. J’étais sur le mode irréfléchi. Je n’avais pas besoin de prendre conscience de ce que je faisais, ni même du fait que j’existais. J’étais sujet, et tout ce qui m’entourait ici, y compris autrui, était objet pour mon regard. Mais voilà qu’autrui apparaît et me regarde. Son regard change soudain tout. Ce ne sont pas ses yeux, c’est-à-dire « l’organe sensible de vision », que le regard masque. C’est le regard en lui-même qui me parait brusquement une menace posée sur mon monde, car ce « regard tourné vers moi paraît sur fond de destruction des yeux qui me « regardent » […] » (EN, p. 316). Maintenant que ce regard est posé sur moi, à la fois sans distance et en me tenant en même temps à distance, je prends conscience que je suis à présent <em>regardé</em>. Un rapport essentiellement hostile<a title="" href="file:///C:/Users/Marc/Desktop/articles/Sartre%20et%20le%20regard.doc#_ftn4" name="_ftnref4"><span class="MsoFootnoteReference"><!-- [if !supportFootnotes]--><span class="MsoFootnoteReference">[4]</span><!--[endif]--></span></a> s’engage entre autrui et moi. Je me sens soudain « vulnérable ». Autrui en me regardant me fait prendre conscience que <em>je suis vu</em>. Pris dans son champ de vision, son regard a ce pouvoir de me faire prendre conscience que je suis, et de ce que je suis. Je suis comme <em>percé à jour</em>. Je suis tombé dans le monde. Le regard d’autrui étant essentiellement lié à cette chute. Jusqu’ici, je pouvais bien écouter aux portes, comme je suis à la fois ce que je ne suis pas, et je ne suis pas ce que je suis, échappant à cette définition provisoire de moi-même par toute ma transcendance, je ne pouvais me constituer comme un homme jaloux qui commet là une indiscrétion. Mais voilà que j’entends des pas dans le corridor ; voilà que soudain, je surprends des yeux qui me regardent. Voilà que deux libertés adverses se menacent. Jusqu’ici, la conscience de soi existait sur le plan des « objets du monde ». Ce regard va à présent me figer, me stigmatiser. Je serais désormais <em>celui</em> qui écoute aux portes. La honte qui soudain me parcourt l’échine, puis tout le corps, prend naissance dans ce regard qui me surprend ; elle est « honte de <em>soi</em> ». Il me faut bien reconnaître que je suis comme l’autre me voit. La honte étant « <em>reconnaissance</em> de ce que je <em>suis</em> bien cet objet qu’autrui regarde et juge. Je ne puis avoir honte que de ma liberté en tant qu’elle m’échappe pour devenir objet <em>donné</em>. »<a title="" href="file:///C:/Users/Marc/Desktop/articles/Sartre%20et%20le%20regard.doc#_ftn5" name="_ftnref5"><span class="MsoFootnoteReference"><!-- [if !supportFootnotes]--><span class="MsoFootnoteReference">[5]</span><!--[endif]--></span></a> Cette analyse phénoménologique du regard nous apprend désormais que la présence d’autrui est nécessaire pour que je sois moi-même, c’est-à-dire pour que je sois <em>extirpé</em> du stade de conscience irréfléchie solitaire et que je sois ainsi constitué en conscience réfléchie <em>jugée</em> par autrui. Je ne pourrais désormais plus me réfugier dans la mauvaise foi<a title="" href="file:///C:/Users/Marc/Desktop/articles/Sartre%20et%20le%20regard.doc#_ftn6" name="_ftnref6"><span class="MsoFootnoteReference"><!-- [if !supportFootnotes]--><span class="MsoFootnoteReference">[6]</span><!--[endif]--></span></a>, comme auparavant, cette mauvaise foi se transformant alors en aveu même de ma <em>faute</em>.</span></p><p class="MsoNormal" style="text-align: justify; text-indent: 7.1pt; mso-pagination: none; mso-layout-grid-align: none; text-autospace: none;"> </p><p style="text-align: center;"><img id="media-1071099" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/01/248706856.jpg" alt="sartre,le monde,jean-paul sartre,huis-clos,l'être et le néant,f. jeanson,heidegger" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Huis clos – de Jacqueline Audry – 1954</span></p><p class="MsoNormal" style="text-align: center; text-indent: 7.1pt; mso-pagination: none; mso-layout-grid-align: none; text-autospace: none;" align="center"> </p><p class="MsoNormal" style="text-align: justify; text-indent: 7.1pt; mso-pagination: none; mso-layout-grid-align: none; text-autospace: none;"> </p><p class="MsoNormal" style="text-align: justify; text-indent: 7.1pt; mso-pagination: none; mso-layout-grid-align: none; text-autospace: none;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">Dans cette dialectique sujet-objet, opérée sur le mode du conflit des consciences, deux libertés s’expriment, l’une regardant l’autre et la jugeant, et, en faisant que soudain, cette conscience regardée ne s’échappe plus : « La liberté d’autrui m’est révélée à travers l’inquiétante indétermination de l’être que je suis pour lui »<a title="" href="file:///C:/Users/Marc/Desktop/articles/Sartre%20et%20le%20regard.doc#_ftn7" name="_ftnref7"><span class="MsoFootnoteReference"><!-- [if !supportFootnotes]--><span class="MsoFootnoteReference">[7]</span><!--[endif]--></span></a>. Ma liberté s’arrêtant lorsque le regard d’autrui se pose sur moi. Il y a cette « dimension d’être » qui me sépare de mes possibles par un « néant radical ». À présent regardé, je suis entre les mains de la liberté d’autrui. Il y a comme une <em>liberté fausse</em> chez Sartre. Je suis libre tant que le regard d’autrui ne m’a pas figé dans cette liberté qui se retourne contre moi. A la manière d’un libre-arbitre qui m’aurait été accordé pour pouvoir être jugé et châtié. Donc, autrui me regarde, et voilà que je suis ce que je suis. Je ne suis plus libre, mais un possible pour autrui, une probabilité pour lui<a title="" href="file:///C:/Users/Marc/Desktop/articles/Sartre%20et%20le%20regard.doc#_ftn8" name="_ftnref8"><span class="MsoFootnoteReference"><!-- [if !supportFootnotes]--><span class="MsoFootnoteReference">[8]</span><!--[endif]--></span></a>. Dépossédé, j’affirme cette honte comme mienne, alors qu’en réalité, elle est liberté d’un autre. Ma honte me révèle comme étant ce que l’autre voit de moi, <em>en-soi</em>. Rappelons-nous Garcin dans la cinquième et dernière partie de <em>Huis-clos</em>, pris au piège d’un trio infernal, condamné à vivre ensemble pour le reste de l’éternité, se lamentant : « Le bronze… (<em>Il le caresse.</em>) Eh bien, voici le moment. Le bronze est là, je le contemple et je comprends que je suis en enfer. Je vous dis que tout était prévu. Ils avaient prévu que je me tiendrais devant cette cheminée, pressant ma main sur ce bronze, avec tous ces regards sur moi. Tous ces regards qui me mangent… (<em>Il se retourne brusquement.</em>) Ha ! vous n’êtes que deux ? Je vous croyais beaucoup plus nombreuses. (<em>Il rit.</em>) Alors, c’est ça l’enfer. Je n’aurais jamais cru… Vous vous rappelez : le soufre, le bûcher, le gril… Ah ! quelle plaisanterie. Pas besoin de grill : l’enfer, c’est les Autres. »<a title="" href="file:///C:/Users/Marc/Desktop/articles/Sartre%20et%20le%20regard.doc#_ftn9" name="_ftnref9"><span class="MsoFootnoteReference"><!-- [if !supportFootnotes]--><span class="MsoFootnoteReference">[9]</span><!--[endif]--></span></a> Les Autres ne sont là que le regard d’autrui. Il est porté sur moi ; il me révèle à moi-même ce que je suis objectivement ; ce regard est précisément le <em>grill</em> de l’enfer sartrien.</span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1127381" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/02/3865977174.png" alt="sartre,le monde,jean-paul sartre,huis-clos,l'être et le néant,f. jeanson,heidegger" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Cet article, paru dans la revue <em>Philosophie pratique</em>, n°9, jan-fev. 2012</span></p><p style="text-align: center;"> </p><p class="MsoNormal" style="margin-left: 25.1pt; text-align: justify; text-indent: -18.0pt; mso-pagination: none; mso-list: l0 level1 lfo1; mso-layout-grid-align: none; text-autospace: none;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><!-- [if !supportLists]-->2.<span style="font-stretch: normal;"> </span><!--[endif]--><strong>Le regard d’Autrui comme miroir déformant</strong></span></p><p class="MsoNormal" style="margin-left: 7.1pt; text-align: justify; mso-pagination: none; mso-layout-grid-align: none; text-autospace: none;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong> </strong></span></p><p class="MsoNormal" style="text-align: justify; text-indent: 7.1pt; mso-pagination: none; page-break-after: avoid; text-autospace: ideograph-numeric;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;">La pièce de Sartre <em>Huis-clos</em>, mettant en scène deux femmes et un homme enfermés dans une pièce censée <em>représenter</em> l’enfer, nous présente ce trio parfaitement <em>diabolique</em> qui est le propre même de la dramaturgie sartrienne. Nous l’avons bien compris, si l’homme vivait seul sur terre, c’est-à-dire à peine entouré d’objets (un arbre, une chaise, un animal, etc.) qui ne pensent pas le monde extérieur, il n’aurait pas à s’intéresser à sa liberté ; il serait entièrement libre. Il penserait le monde à sa façon, sans limite, puisque ce monde n’existerait en réalité que pour lui. Entouré d’autrui en revanche, l’homme doit tenir compte des autres ; notre pensée ne saurait se suffire à elle-même. Je l’ai démontré : le regard que je jette sur le monde, est en permanence contredit par le regard d’autrui. Entre ma liberté et la sienne, s’engage alors un conflit des consciences dont on ne peut réchapper. Ce conflit portant à la fois sur ma vision du monde qu’il me faut défendre contre la vision des autres qui viennent la heurter, mais également ma liberté. La liberté d’autrui ayant la <em>fâcheuse</em> propension à venir l’annexer, voire la supprimer, en détournant les choses des significations que je leur donnais jusqu’ici, pour leur en conférer de nouvelles. « Ce n’est pas, à proprement parler, que je me sente perdre ma liberté pour devenir une <em>chose</em>, mais elle est là-bas, hors de ma liberté vécue, comme un attribut donné de cet être que je suis pour l’autre. Je saisis le regard de l’autre au sein de mon <em>acte</em>, comme solidification et aliénation de mes possibilités. »<a title="" href="file:///C:/Users/Marc/Desktop/articles/Sartre%20et%20le%20regard.doc#_ftn10" name="_ftnref10"><span class="MsoFootnoteReference"><!-- [if !supportFootnotes]--><span class="MsoFootnoteReference">[10]</span><!--[endif]--></span></a> Je ne suis pas extrait du monde lorsque l’autre me voit, mais saisi dans la situation même où j’ai été surpris. Pris au piège du regard d’autrui, je suis soudain transformé en un quelqu’un au milieu du monde, par exemple cet homme qui est assis sur cette chaise, qu’il ne voit pourtant point. De fait, il y a quelque chose qui m’échappe, et qui est utilisée par l’autre en tant que ses propres possibilités. L’utilisation d’une cachette par exemple, que l’autre pourrait découvrir. Dans ce conflit basé sur le regard, chacune des consciences devient désormais le bourreau de l’autre, à l’image des personnages de Garcin, Estelle et Inès dans la pièce <em>Huis clos</em>, où chacun des deux autres, à tour de rôle, persécute le troisième, faisant de la présence du tiers un v
Olivier Beaunay
http://oliverbe.blogspirit.com/about.html
Dix raisons de lire (1) Au bonheur des signes (tout compte fait)
tag:oliverbe.blogspirit.com,2010-12-01:2034372
2010-12-01T01:23:00+01:00
2010-12-01T01:23:00+01:00
Pourquoi lire ? s'interroge Dantzig avec un certain succès ces temps-ci (1)....
<p>Pourquoi lire ? s'interroge Dantzig avec un certain succès ces temps-ci (1). Il y avait eu l'acte gratuit de Gide au début du XXème siècle, nous voilà maintenant avec un éloge de l'acte inutile sur les bras. Je comprends le ressort de l'entreprise. Mais je préfère lui opposer une première série de dix livres en tâchant de les identifier chacun à une raison propre de lire, à un éloge en somme non de l'inutile mais de l'apprentissage, et de l'inspiration contre la rhétorique.</p><p>Pas d'ordre précis dans cette évocation, sinon celui d'un ordonnancement spontané de la mémoire. Une approche qui serait toute d'évocation - autour d'un moment, d'une trace ou d'une idée qui en cristalliserait la beauté, le sens ou la portée -, sur laquelle autrement dit l'idée serait moins de <em>s'étendre</em> que de <em>s'entendre</em>.</p><p><em>Les mots</em>, Jean-Paul Sartre. C'est un livre que j'ai lu en khâgne et sur lequel j'ai travaillé à l'université dans un séminaire sur l'autobiographie (on ne parlait pas encore d'auto-fiction), qui lui associait Gide (<em>Si le grain ne meurt</em>) et Leiris (<em>L'âge d'homme</em>). Une combinaison inégalée de construction intellectuelle sous-jacente - un pied-de-nez, si l'on veut - et de manipulation des émotions. Epoustouflant, et d'une densité rare. Quant à la fac, ce ne fut qu'un bref passage en attendant une inscription en hypokhâgne, mais qui me parut long et passablement poussiéreux entre un proustien poussif et un dix-septiémiste poseur, et auquel je finis par préférer la construction d'une culture plus personnelle.</p><p><em>Le rivage des Syrtes</em>, Julien Gracq. J'ai lu le <em>Rivage</em> assez tardivement, au retour de la coopération dans le Pacifique si je me souviens bien, entre Saint-Germain et Saint-Denis. Qu'en dire ? Une poésie tout en retenue, donc brûlante, qui se lit comme un évangile. Comme la révélation de ce qu'écrire, au sens de la création d'un univers propre, veut dire. Cette période de transition ne fut pas pour rien dans l'impression forte que me fit le livre je présume, car il me semble que les transitions sont des périodes privilégiées de <em>captation</em>. Cela vaut aussi pour la suite : passé les années de jeunesse, où prendre le temps, sinon dans les ruptures ou les interstices de la vie ?</p><p><em>Cent ans de solitude</em>, Gabriel Garcia Marquez. J'ai une connaissance de la littérature sud-américaine plus que lacunaire, mais qui repose heureusement sur quelques solides ancrages (dont les livres de Borges). Ce fut une lecture d'adolescence, peut-être aux alentours de quinze ans. C'est une saga gourmande et drôle. Une fable latine que l'on retrouve d'ailleurs dans un registre à mon sens moins puissant mais tout aussi savoureux dans <em>L'amour au temps du choléra</em>. De <em>Cent ans de solitude</em> lu à quinze ans, que conserve-t-on ? Un sens de l'épopée. Quelque chose comme l'idée qu'il nous faudrait tâcher d'être généreusement créateur de notre existence. Et puis aussi l'humour comme un espace possible de la littérature au rebours d'un art européen, dans l'ensemble, plutôt sombre (2).</p><p><em>Les particules élémentaires</em>, Michel Houellebecq. C'est une lecture plus tardive, au milieu des années 2000, lorsque je suis revenu à Paris. J'ai une fascination pour Houellebecq qui tient à deux choses : 1°) il est pour moi le Céline de la fin du siècle, dans une configuration similaire au <em>Voyage</em> (une autre étude de khâgne) : une <em>ambiance</em> de catastrophe générale, avec quelques lueurs improbables ; 2°) si j'avais écrit, c'est une part de ce que j'aurais aimé écrire. Il y eut aussi la puissance de <em>Extension du domaine de la lutte</em>, mais elle fut plus fulgurante (et libératrice par ailleurs pour ce que j'avais à solder). Là-dessus, je suis à peu près seul. Il y a une incommunicabilité de la passion pour Houellebecq, qui laisse les hommes raides et les femmes amères. Un problème néo-romantique assez banal, sur lequel j'ai fini par me décider à embarquer le livre de Bellanger à la Belle Hortense (c'est qu'au fond, je n'aime pas qu'on m'apprenne des choses sur ce que j'aime ou sur ce que je pourrais écrire).</p><p><em>Mythologies</em>, Roland Barthes. Barthes, c'est comme Marx et Freud, mais en plus jouissif. Avec lui, il y a un bonheur singulier du décryptage (il y a une intelligence sans doute similaire chez Deleuze sur Proust ou chez Starobinski sur Rousseau, mais elle y est plus triste). Barthes, c'est une ressource précieuse et une inspiration créatrice. S'il fallait en retenir un, ce serait peut-être celui-là parce qu'il communique à la fois la liberté de penser, le plaisir du texte et l'intelligence des signes. C'est beaucoup, tout compte fait. L'enseigne-t-on encore ? J'ai un doute. Comme avec Borges, il ne faut pas exclure un risque de <em>ringardisation</em>. De ce point de vue, si Sartre s'en tire à mon sens, c'est que la <em>passion</em> chez lui (bien plus que l'engagement) l'emporte sur l'intelligence.</p><p>Il me semble que par les temps d'abondance littéraire que nous vivons, il serait sans doute salutaire que chacun y allât ici de ses coups de coeur sur ses livres fondateurs.</p><p>Avis aux amateurs...</p><p>_____</p><p>(1) On avait trouvé intéressant, il y a quatre ou cinq ans, son <em>Dictionnaire égoïste de la littérature française </em>(qui fut, boulevard de Port Royal, un livre de toilettes aurait dit Barthes). Je ne fais ici que reprendre le titre de son dernier ouvrage sans l'avoir lu.</p><p>(2) Un peu avant dans un registre proche, en classe de troisième, il y eut aussi la découverte joyeuse des <em>Exercices de style </em>de Queneau. Heureuse rencontre scolaire ! C'est suffisamment rare pour être mentionné. Il reste pour moi que la tension entre gravité et fantaisie constitue l'une des principales difficultés de la littérature comme invention.</p><p> </p>
Pierre Vallet
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Tournez dans un film !
tag:lavoixdu14e.blogspirit.com,2010-05-21:1935441
2010-05-21T06:00:00+02:00
2010-05-21T06:00:00+02:00
Vous vivez dans le 14ème, vous aimez la littérature : Tournez dans un...
<p style="text-align: justify;"><b>Vous vivez dans le 14ème, vous aimez la littérature : Tournez dans un film !</b></p> <p style="text-align: justify;">Vous rêvez de tourner dans un film ? L'heure est venue de sauter le pas !</p> <p style="text-align: justify;"><b>Susana Lastreto et la compagnie de théâtre GRR, recherchent des habitants du 14e pour lire de courts textes littéraires et être filmés.</b></p> <p style="text-align: justify;">L'idée est de réaliser un portrait du 14e arrondissement à travers la rencontre entre les gens qui y vivent aujourd'hui d'une part, et, d'autre part, les écrivains ou artistes illustres qui y ont résidé et ont contribué à son rayonnement artistique (Chateaubriand, Cocteau, Breton, Beauvoir, Sartre, Malet, Baker, Brassens, Beckett, Gainsbourg, Brassens, Le Corbusier, Braque, Picasso, Hemingway, Neruda, Senghor...).</p> <p style="text-align: justify;">L'ensemble de lectures sera monté pour produire un documentaire-fiction de 50 minutes. Le film sera présenté en première partie des spectacles programmés pendant le festival <b>« En Compagnie(s) d'été»</b>, qui se déroulera en juillet et en août au Théâtre 14.</p> <p style="text-align: justify;">Le temps de tournage est d'environ deux heures par habitant.</p> <p style="text-align: justify;">Contact : Mail : <a href="mailto:grrrcie@gmail.com">grrrcie@gmail.com</a> -Téléphone : 06 75 08 93 89</p>
Olivier Beaunay
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Survivre aux crises ? (1) L'exploration de soi
tag:oliverbe.blogspirit.com,2010-04-07:1917644
2010-04-07T22:23:47+02:00
2010-04-07T22:23:47+02:00
Voilà une idée ancienne que la précarité du monde aura pu, un temps,...
<p>Voilà une idée ancienne que la précarité du monde aura pu, un temps, paraître disqualifier quand elle la rend, au contraire, plus nécessaire. Nous gagnerions sans doute, entre l'adolescence et le premier état adulte, quelque part entre vingt et trente ans, dans cette première confrontation entre la formation et le réel que représente le premier "cycle septennaire" de la vie (*), à formuler quelques uns des principes et des règles de conduite qui nous semblent essentiels à une existence honorable.</p> <p>C'est à un semblable exercice que se livre Jacques Attali, au milieu de la tempête, dans "Survivre aux crises" autour de sept principes de survie. Ces principes, quels sont-ils ? 1) Etre soi-même ; 2) avoir un projet à long terme ; 3) être capable de résister à des attaques ; 4) transformer une attaque en moyen de résistance ; 5) comprendre les autres ; 6) changer radicalement d'activité ; et enfin, 7) bouger à très grande vitesse, y compris si cela doit conduire à ne pas respecter les codes.</p> <p>Voilà une proposition qui mérite commentaire.</p> <p>Sur l'identité d'abord. Le second principe vient là-dessus heureusement mettre en perspective le premier. Avant de se respecter, il faut se connaître un peu, faute de quoi il s'agit moins de se respecter que de se préserver : c'est le défi terrible des adolescences. Cela prend un peu de temps (il faudrait faire l'éloge de ce point de vue des psychanalyses de la quarantaine, même lorsqu'on ne les a pas faites, par principe en somme), mais passe surtout par le mouvement davantage que par l'introspection.</p> <p>Il reste qu'une fois cette connaissance acquise ou du moins un peu mieux cernée, être soi-même d'une façon qui serait, au long des années, moins "politique" et plus spirituelle, plus concentrée, <i>plus humaine</i> si l'on veut, ne va pas sans capacité de remise en cause ni sans courage. Ceux qui changent de bord politique ou religieux, les homosexuels qui font leur <i>coming out</i>, ou ceux qui remettent en cause leur carrière en savent quelque chose. Un mix en somme de Sartre et de Leiris remis au goût du jour, où le courage de devenir soi se conjuguerait au risque du dévoilement.</p> <p>C'est le syndrôme du traître, du pédé ou du raté, et il faut manifestement un peu d'estomac pour se coltiner alors l'empathie chaleureuse de la fraternité ordinaire. C'est sans doute là un propos un peu court, et d'une portée plus intimiste que ne le suggérait l'auteur : l'avantage avec les problèmes de survie, c'est qu'ils ne laissent guère le loisir de s'étendre trop longuement.</p> <p>_____</p> <p>(*) J'emprunte cette notion de cycle à Bernard Werber, auteur à mon avis injustement considéré, dans son "Encyclopédie du savoir relatif et absolu" (Albin Michel, 2000).</p> <p> </p>
hommelibre
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Le hêtre et le néon
tag:leshommeslibres.blogspirit.com,2010-02-18:3296942
2010-02-18T10:57:00+01:00
2010-02-18T10:57:00+01:00
Si vous passez un jour par la ville de Moulins dans le centre de la...
<p style="text-align: justify;"><a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/01/02/3942300093.jpg" target="_blank"><img src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/01/00/2138387399.jpg" id="media-49407" alt="moulins1.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" name="media-49407" /></a>Si vous passez un jour par la ville de Moulins dans le centre de la France, vous y rencontrerez des habitants très fiers et possessifs. Il arrive que, familièrement, ils parlent de leur ville en disant «mon Moulins». On dit bien habiter «en Arles» et non «à Arles», pourquoi pas «mon Moulins»? Mais j’en viens au sujet.<br /> <br /> Le hêtre est très joli arbre qui peuple nos bois. Ne dit-on pas «Le peuple de l’hêtre»? D’ailleurs, son côté peuple le fait parfois se prendre pour un humain. On dit alors l’hêtrumain.<br /> <br /> Il a donné un verbe, le verbe hêtre, que l’on peut facilement décliner à l’indicatif présent: je suître, tu hêtres, il hêtre.<br /> <br /> C’est un arbre toujours très propre sur lui: on voit souvent ensemble, à l’aube naissante, dans les villages de nos campagnes, l’hêtre et lavoir.<br /> <br /> Parfois il pousse entre des épicéas ou des chênes, qui prennent beaucoup de place. Obligé de se faire tout petit, il a alors donné naissance à une sous-espèce: l’hêtriqué.<br /> <br /> L’hêtre ne parle pas, mais il en est un, unique, qui écrit. Il écrit des lettres. On le trouve dans le centre de la France, près de cette ville où les habitants sont fiers et possessifs. Comment s’appelle-t-il déjà? Ah oui: l’hêtre de mon Moulins.<br /> <a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/01/02/4015354984.jpg" target="_blank"><img src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/00/01/2409415185.jpg" id="media-49408" alt="hêtre1.jpg" style="border-width: 0; float: right; margin: 0.2em 0 1.4em 0.7em;" name="media-49408" /></a><br /> On l’appelle aussi «faayard», nom dont l’étymologie signifie «fou». Allez savoir pourquoi. Fayan fut aussi utilisé. Mais bon, introduisez le mot «fayan» dans une conversation ordinaire et plus personne ne vous comprendra. Témoin cette citation de Palissy:<br /> <br /> <i>«Plusieurs verriers de ceux qui font les verres de vitres se servent de la cendre de bois de fayan en lieu de salicor».</i><br /> <br /> L’hêtre de mon Moulins, à force d’écrire, à donné son nom de fayard à une maison d’édition française connue.<br /> <br /> Et puisqu’on parle de littérature, je livre ici un scoop. Jean-Paul Sartre, un soir, assis à une terrasse éclairée de rouge et bleu clignotant, vit un hêtre en face de lui. C’est là qu’il écrivit «L’hêtre et le néon».<br /> <br /> On a aussi trouvé une autre sous-espèce d’hêtre, l’hêtrusque. Mais on n’a pas encore pu établir de lien avec l’ancienne civilisation du centre de l’Italie.<br /> <br /> Parmi les autres sous-espèces, citons sans trop insister l’hêtron à l’odeur nauséabonde, l’hêtrave dont les racines en forme de proue de navire ont un goût sucré, l’hêtranglé qui vient de Grande-Bretagne, et l’hêtrenne, originaire du grand nord, que l’on offre en cadeau à la nouvelle année.<br /> <br /> Bref, et j’en terminerai ici, le hêtre forme une grande famille qui vit dans l’harmonie. D’ailleurs vous n’en verrez jamais s’hêtriper.</p> <p style="text-align: justify;"> </p> <p style="text-align: justify;"> </p> <p style="text-align: justify;">PS: Le gouvernement espagnol va-t-il permettre d’accélérer la libération des otages suisses en Libye? Parce qu’il ne faut pas compter sur Kouchner. 580 jours de rétention.</p><p>Bon bon, un ch’tit délire today. Une histoire d’hêtre.</p>
hommelibre
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L’indispensable révolte
tag:leshommeslibres.blogspirit.com,2010-02-15:3296937
2010-02-15T09:21:51+01:00
2010-02-15T09:21:51+01:00
Parmi les intellectuels français du 20e siècle, il s’opposait à la...
<p style="text-align: justify;"><a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/00/02/1526643933.gif" target="_blank"><img src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/02/02/4005572717.gif" id="media-49169" alt="camus2.gif" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" name="media-49169" /></a>Parmi les intellectuels français du 20e siècle, il s’opposait à la dictature de l’URSS et dénonçait déjà toutes les tyrannies quelles que soit leur couleur, à une époque où Sartre le bourgeois déroulait le tapis rouge à l’idéologie du Kremlin. Il portait profondément en lui cette exigence de liberté et de vérité.<br /> <br /> «Le Monde» consacre un hors-série à Albert Camus, grande figure du siècle dernier, hors-série que je recommande à la lecture pour ses éclairages utiles et dont j’extrais quelques citations entre guillements.<br /> <br /> <i>«A cette époque - on était en pleine guerre froide - il en fallait du courage, lorsqu’on se réclamait de la gauche, pour aller contre l’idée d’un absolutisme politique et idéologique, pour dénoncer toutes les formes d’inquisition et toutes les barbaries, d’où qu’elles viennent».</i><br /> <a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/00/01/2453585893.JPG" target="_blank"><img src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/00/00/689390357.JPG" id="media-49170" alt="Camus4-L-etranger.JPG" style="border-width: 0; float: right; margin: 0.2em 0 1.4em 0.7em;" name="media-49170" /></a><br /> La barbarie n’a pas de couleur. C’est le pouvoir en lui-même qui est de nature à corrompre l’humain quand il est exercé par une personnalité aux limites éclatées, le pouvoir et la propension de ceux qui l’ont à en faire un usage excessif. Le pouvoir tend à se renforcer, en ce sens il est naturellement dangereux. Ainsi dans l’expression «dictature du prolétariat», nous ne devons jamais oublier qu’il y a en premier le mot dictature. Et nous ne devons jamais justifier intellectuellement la dictature. Laissons-là pour ce qu’elle est: une bête mangeuse d’hommes. Ne lui offrons aucun alibi. Pensons à sa pièce Caligula, où s’exprime la logique du tyran que plus rien d’autre que lui-même, dans cette sorte de folie, ne légitime.<br /> <br /> Plus encore, ne lui laissons pas occuper les autoroutes de l’Histoire. Camus ne voulait pas subir l’Histoire et <i>«la servir les yeux fermés».</i> Il place l’Homme devant ses propres choix et responsabilités. Et devant l’indispensable révolte contre l’injustice de l’Histoire.<br /> <br /> <a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/01/01/1895099831.gif" target="_blank"><img src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/02/02/3705040750.gif" id="media-49171" alt="Camus6.gif" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" name="media-49171" /></a>Sa pensée n’est pas restée enfermée dans des livres savants et hermétiques. Il l’a mise en romans et en théâtre, comme pour signifier que la plus haute philosophie ne vaut que par ce qu’elle apporte concrètement dans l’art de vivre le monde et sa propre existence. Un gramme d’incarnation personnelle vaut des tonnes de théorie.<br /> <br /> Certains ont voulu minimiser l’importance d’Albert Camus comme philosophe. Or un philosophe <i>«c’est quelqu’un qui fabrique, usine, agence des concepts. On ne peut pas refuser ce soucis à Camus.»</i><br /> <a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/01/01/743653818.jpg" target="_blank"><img src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/00/01/4056665185.jpg" id="media-49172" alt="camus7.jpg" style="border-width: 0; float: right; margin: 0.2em 0 1.4em 0.7em;" name="media-49172" /></a><br /> Pour Camus, le chemin vers la liberté - pas la liberté de consommer plus, celle d’être, de se penser, d’être autonomes à l’égard des puissances intellectuelles ou matérielles - ce chemin passe par la révolte contre l’oppression. Et si elle ne suffit pas à aboutir à un monde libre par sa seule force, elle est le moteur d’une pensée qui s’émancipe, par laquelle nous devenons sujets et non objets.<br /> <br /> Relisons Camus: une cure de jouvence intellectuelle bienvenue.<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> PS: Pas d’autre nouvelle des otages suisses en Libye aujourd’hui. 19 mois de rétention contre leur gré.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/00/02/1237092709.jpg" target="_blank"><img src="http://leshommeslibres.blogspirit.com/media/02/01/1160380442.jpg" id="media-49173" alt="désert-neige1.jpg" style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" name="media-49173" /></a></p><p style="text-align: justify;">Cet homme n’a pas fait de compromis avec la liberté et la vérité. Ce qui l’a classé à part dans la pensée contemporaine. Sa liberté de style a aussi contribué à lui donner une place très personnelle.</p>
Olivier Beaunay
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Un orage à New York (1) Fondements naturels de la crise
tag:oliverbe.blogspirit.com,2009-08-20:1810459
2009-08-20T04:03:00+02:00
2009-08-20T04:03:00+02:00
Cela commence par des températures qui, un, deux, trois jours durant, une...
<p>Cela commence par des températures qui, un, deux, trois jours durant, une semaine parfois, n'en finissent pas de grimper. Au début, un peu d'air parvient malgré tout à s'engouffrer dans la ville, soit à l'ouest par le couloir de l'Hudson, soit au sud par la baie de Manhattan, largement ouverte sur l'Atlantique au-delà des avant-postes de Governor et Staten Islands, et du pont de Verrazano qui en ferme l'accès.</p> <p>Progressivement, le thermomètre passe les trente degrés. C'est alors une chaleur moite, collante, qui s'abat sur la ville puis finit par s'y installer comme, un peu plus au nord, sur les côtes de la Nouvelle-Angleterre, lorsque l'été prend possession des terres qui s'étendent du New Hampshire au Connecticut.</p> <p>Les mouvements se limitent à l'essentiel et, dans les appartements, les véhicules, les boutiques, les climatiseurs se mettent à rugir, plus ou moins, selon leur état de vétusté. </p> <p>Le jour, un monde hors-sol s'affaire à l'abri de la canicule ; il n'en est guère saisi que le temps d'un court trajet d'un bureau à une station de métro. Le soir, du Bronx à Brooklyn, à Manhattan surtout du fait des multiples caisses de résonnance que font les cirques que forment les blocs de buildings, le vrombissement polyphonique des climatiseurs s'empare des cours intérieures. Il marque, bien plus sûrement que les murs, la frontière entre une nature hostile et un habitat protégé.</p> <p>A l'évidence, cela ne peut durer.</p> <p>En exacerbant ses limites, le système commence à créer les conditions d'un nouvel équilibre, plus soutenable - mais c'est au prix d'un ébranlement qui - dix, quinze, vingt minutes durant -, va bientôt faire vaciller la ville. </p> <p>La température oscille alors entre trente et trente cinq degrés. Dehors, les humains sur les avenues écrasées de soleil sont des cafards aux abois qui fuient littéralement la lumière. Les trajets ne suivent plus l'ordonnancement géométrique des rues : ils luttent bestialement pour l'ombre disponible.</p> <p>Par endroits, une odeur pestilentielle s'empare des rues - une odeur aigre d'urine séchée, de bière tiède et de déchets pourrissants. Des profondeurs, par les caves, les tuyaux, les entrepôts désaffectés, les anfractuosités des vieux murs - par tous les pores de la ville, les bestioles remontent.</p> <p>Le moindre souffle déserte la ville. Les grands arbres sur les hauteurs de Central Park, qui parviennent d'ordinaire à capter, au plus fort de l'été, un peu de la bise du grand large, se figent. L'ombre elle-même, dans ce grill géant, finit par ne plus être d'aucun secours.</p> <p>Dans un texte des <em>Situations III</em> ("New York, ville coloniale"), Sartre avait vu juste. Au-delà de l'imagerie de la plus éblouissante des villes lumière qu'elle fut en effet au début du siècle dernier, New York incarne moins le triomphe de l'urbanisme moderne qu'un terrain d'affrontement constant entre la nature et la civilisation.</p> <p>Ici, l'orage, sous la forme du déluge n'est pas qu'un rappel biblique ; il ne se résume pas non plus à un fait météorologique pur. Concentré de catastrophe, il figure l'image et comme la première réalité de la crise.</p>
Tania
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Dits et non-dits
tag:textespretextes.blogspirit.com,2008-04-28:3109325
2008-04-28T08:00:54+02:00
2008-04-28T08:00:54+02:00
Des courtisans de Molière aux personnages d’Alice Ferney dans son roman...
<span xml:lang="FR-BE" lang="FR-BE"><font size="3"><font face="Times New Roman">Des courtisans de Molière aux personnages d’Alice Ferney dans son roman <i>Les autres</i> (2006), tout change et pourtant je suis tentée de les rapprocher. La conversation en occupe le cœur, et la deuxième partie intitulée <i>« Choses dites »,</i> entre <i>« Choses pensées »</i> et <i>« Choses rapportées »</i>, prend la forme de dialogues que j’imaginerais bien sur une scène.</font></font></span> <p><span xml:lang="FR-BE" lang="FR-BE"><font size="3"><font face="Times New Roman">Pour fêter les vingt ans de Théo, fiancée et amis se retrouvent dans la maison de famille et bon gré mal gré, se lancent dans un jeu, le cadeau de Niels, le frère aîné, à son cadet qui n’aime pourtant pas les jeux. Mais il accepte la proposition, curieux de découvrir ce que l’autre a en tête. Avec un plaisir visible, Niels réussit à les entraîner dans une espèce de jeu de la vérité, <i>Caractère</i>, qui propose toutes sortes de questions personnelles, voire intimes, à poser à ses partenaires. A jouer entre gens qui se connaissent, susceptibles s’abstenir.</font></font></span></p> <div style="text-align: center"><span xml:lang="FR-BE" lang="FR-BE"><a target="_blank" href="http://textespretextes.blogspirit.com/media/00/00/2110096444.jpg"><img name="media-30603" src="http://textespretextes.blogspirit.com/media/00/00/2110096444.jpg" alt="74c56bf9e46d65fae17860332722efd3.jpg" style="margin: 0.7em 0px; border-width: 0px" title="Curiosité de chaton" id="media-30603" /></a></span></div> <p><span xml:lang="FR-BE" lang="FR-BE"><font size="3"><font face="Times New Roman">La première partie présente les dix protagonistes tour à tour, dans de courts monologues où ils réagissent intérieurement à ce qui se passe ce soir-là, pendant la partie. Moussia, la mère, est la moins disposée à s’y prêter. Sa propre mère, Nina, passe sa dernière nuit dans leur maison avant d’entrer dans un service de soins palliatifs, et de plus, Moussia connaît ses fils, redoute leurs chamailleries<i>. « Je n’aime pas être au milieu des autres quand je souffre. Etre au milieu des autres, quelle illusion. On n’imagine jamais assez loin à quel point on est seul à vivre sa vie. »</i></font></font></span></p> <p><span xml:lang="FR-BE" lang="FR-BE"><font size="3"><font face="Times New Roman">C’est Théo, en se plaignant de la tyrannie des regards sur soi - <i>« Les autres, ils prétendraient pour peu nous dire qui nous sommes… »</i>, - qui fait clairement le lien avec <i>Huis clos</i>. Alice Ferney a choisi pour son roman le titre initial prévu par Sartre pour sa fameuse pièce <i>(« L’enfer, c’est les autres »)</i>. Ella a aussi donné à la fiancée du jeune homme le prénom d’Estelle, une Estelle à l'opposé de celle de Sartre et dont le prénom renvoie à une question de circonstance : « est-elle ? »</font></font></span></p> <p><span xml:lang="FR-BE" lang="FR-BE"><font size="3"><font face="Times New Roman">Le lecteur entre donc dans le jeu, bien forcé, lui aussi. Il y a des embarras, des pudeurs, des rosseries et des vexations, inévitablement. <i>« Est-ce la gêne d’être ce qu’ils sont qui mène les hommes au magasin des masques ? »</i> s’interroge Fleur. <i>« L’identité est changeante, soumise aux situations et aux protagonistes. »</i> se dit Estelle. Quant à Niels, le maître du jeu, convaincu d’être intouchable, il ne manquera pas non plus de tester sa vulnérabilité.</font></font></span></p> <p><span xml:lang="FR-BE" lang="FR-BE"><font size="3"><font face="Times New Roman">Derrière tout ce qui est dit, autour de la table de jeu, les non-dits provoquent des tensions. Entre les deux frères, un vieux contentieux. Entre Fleur et son fiancé, des malentendus. Quant à Marina, la jeune mère célibataire, elle pousse Niels dans ses retranchements, affronte carrément son égocentrisme. Les secrets bien gardés jusque-là affleurent, avec leur cortège de souffrances. Plusieurs se décident à les livrer, pas tous.</font></font></span></p> <p><span xml:lang="FR-BE" lang="FR-BE"><font size="3"><font face="Times New Roman">Comme le dit Nina à sa fille, <i>« Nous sommes dans le désert de la méconnaissance […] et c’est pure folie d’attendre des autres qu’ils nous comprennent ou, pire encore, qu’ils nous connaissent. »</i></font></font></span> <span xml:lang="FR-BE" lang="FR-BE"><font size="3"><font face="Times New Roman">Dans une construction romanesque très originale, dont on pourrait croire un moment qu’elle mène à la répétition – trois versions d’une soirée, trois genres textuels -, Alice Ferney donne la parole à des personnages attachants, varie les points de vue, et nous propose une réflexion plus profonde qu’il n’y paraît sur les rapports humains, dans le croisement des voix.</font></font></span></p>
Marc Alpozzo
http://marcalpozzo.blogspirit.com/about.html
Le fardeau de la liberté, note sur Sartre
tag:marcalpozzo.blogspirit.com,2008-03-12:1505907
2008-03-12T15:45:00+01:00
2008-03-12T15:45:00+01:00
Cet article a été écrit pour le numéro 2, des Carnets de la philosophie...
<p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 12pt;"><strong>Cet article a été écrit pour le numéro 2, des <span style="color: #800000;"><em>Carnets de la philosophie</em></span>. Le voici désormais en accès libre de l'<span style="color: #800000;"><em>Ouvroir</em></span>.</strong></span></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/00/2003234178.2.jpg" id="media-872289" alt="" /></p><blockquote><div style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: medium;"><strong>« L’existentialisme athée, que je représente, est plus cohérent. Il déclare que si Dieu n’existe pas, il y a au moins un être chez qui l’existence précède l’essence, un être qui existe avant de pouvoir être défini par aucun concept et que cet être c’est l’homme ou, comme dit Heidegger, la réalité humaine. Qu’est-ce que signifie ici que l’existence précède l’essence ? Cela signifie que l’homme existe d’abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu’il se définit après. L’homme, tel que le conçoit l’existentialisme, s’il n’est pas définissable, c’est qu’il n’est d’abord rien. Il ne sera qu’ensuite, et il sera tel qu’il sera fait. Ainsi, il n’y a pas de nature humaine, puisqu’il n’y a pas de Dieu pour le concevoir. L’homme est non seulement tel qu’il se conçoit, mais tel qu’il se veut, et comme il se conçoit après l’existence, comme il se veut après cet élan vers l’existence, l’homme n’est rien d’autre que ce qu’il fait. […] Quand nous disons que l’homme se choisit, nous entendons que chacun d’entre nous se choisit, mais par là nous voulons dire aussi qu’en se choisissant il choisit tous les hommes. »<a style="font-family: Garamond; font-size: 14.6666669845581px;" href="#_ftn1" name="_ftnref1">[1]</a></strong></span></div></blockquote><p align="justify"><span style="font-size: 12pt; font-family: Garamond;"><br /><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: medium;">Dans ce passage, <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/sartre" target="_blank" rel="noopener">Sartre</a></span> tire les deux conséquences essentielles du postulat principal de l’existentialisme, celui qui veut que chez l’homme « l’existence précède l’essence »<a title="_ftnref2" href="#_ftn2" name="_ftnref2"><span class="MsoFootnoteReference">[2]</span></a>, ce qui implique tout d’abord que l’homme doit être pleinement responsable de ce qu’il fait ; mais, chose plus étonnante, l’homme est également responsable de l’humanité.</span><br /><br /></span><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: medium;">L’existence n’est, dit Sartre, jamais déduite d’une essence quelconque et l’homme « n’est rien d’autre que ce qu’il fait »<a title="_ftnref3" href="#_ftn3" name="_ftnref3"><span class="MsoFootnoteReference">[3]</span></a>. Alors nul ne peut invoquer la moindre nature humaine pour se décharger de la responsabilité de ses actes : car l’homme se définit seulement après ce qu’il fait (et non jamais avant !) et recourir au déterminisme, psychologique ou autre, pour donner des raisons de son action, ce serait par conséquent sombrer dans ce que Sartre appelle la « mauvaise foi » : c’est-à-dire, le moyen par lequel l’homme cherche à éviter l’angoisse en se masquant sa liberté : c’est donc une forme de mensonge, mais qui a la particularité d’être <em>mensonge à soi</em>. Par la mauvaise foi, je me donne comme existant sur le mode de l’en-soi, comme les lâches qui se cachent « par l’esprit de sérieux ou par des excuses déterministes leur liberté totale »<a title="_ftnref4" href="#_ftn4" name="_ftnref4"><span class="MsoFootnoteReference">[4]</span></a>. C’est donc fuir ses responsabilités pour attribuer à une force inhumaine ce qui est proprement humain. C’est ce que permet de comprendre l’explication du terme « subjectivisme » qui apparaît chez les adversaires de Sartre comme un reproche. C’est, dit Sartre, qu’ils n’ont pas compris ce que veut dire le subjectivisme existentialiste : il signifie « impossible pour l’homme de dépasser la subjectivité humaine »<a title="_ftnref5" href="#_ftn5" name="_ftnref5"><span class="MsoFootnoteReference">[5]</span></a> . Autrement dit, l’homme ne peut jamais sortir de sa condition, que ce soit pour s’élever au-dessus d’elle (dans par exemple la surhumanité décrite par Nietzsche) ou pour retomber dans l’infra-humain, l’animalité ou l’en-soi de la chose inerte : l’homme n’est jamais déterminé que par lui-même à agir, et jamais par quelque chose d’inhumain. Seul et sans excuses,<a title="_ftnref6" href="#_ftn6" name="_ftnref6"><span class="MsoFootnoteReference">[6]</span></a> l’homme est responsable de soi.<br /><br />À l’inverse de ce qu’affirment les marxistes, ce subjectivisme n’entraîne pas un individualisme : car l’individu, en se choisissant, ne fait jamais un choix pour lui seul, mais fait un choix qui, pour lui, a une valeur : <em>le choix du bien</em>. Tout acte dépasse donc son origine strictement individuelle, car ce qui a une valeur ne l’a <em>pas seulement pour moi,</em> mais pour tous les hommes. En choisissant ce que nous voulons être, nous choisissons l’homme « tel que nous estimons qu’il doit être. »<a title="_ftnref7" href="#_ftn7" name="_ftnref7"><span class="MsoFootnoteReference">[7]</span></a> L’existentialisme n’est donc pas seulement une anthropologie, c’est-à-dire une théorie de l’homme, mais il est aussi une morale : il passe de la description de l’homme tel qu’il est ou plutôt tel qu’il existe à ce qu’il doit être, bref à une dimension normative. Car l’homme tel qu’il est ne peut pas ne pas choisir l’humanité qu’il souhaite : il est par conséquent, également responsable devant tous de l’humanité qu’il a choisie. Responsabilité de l’homme absolument totale.<br /><br />Avant tout penseur athée, Sartre voit le fâcheux destin de l’homme qu’un des frères Karamazov évoque chez Dostoïevski, réfléchissant à l’existence de Dieu : « Si Dieu n’existait pas, tout serait permis. »<a title="_ftnref8" href="#_ftn8" name="_ftnref8"><span class="MsoFootnoteReference">[8]</span></a> C’est ainsi le point de départ de l’existentialisme. « L’homme est libre, l’homme est liberté. »<a title="_ftnref9" href="#_ftn9" name="_ftnref9"><span class="MsoFootnoteReference">[9]</span></a> Projet et choix, il va désormais habiter le monde comme une conscience qui se <em>réinstalle</em> dans le monde sans être une chose parmi les choses ; refus d’un certain réalisme qui empêche la conscience, absorbant l’objet, de se dépasser de ce monde, de s’arracher de l’objet étant toujours de ce monde. Fidèle à l’idée d’intentionnalité de la conscience husserlienne, Sartre pose la conscience comme n’ayant point de dedans, comme n’étant rien en dehors d’elle-même. Considérant qu’une connaissance objective est possible, la conscience se distingue désormais des autres <em>étants</em>, n’étant plus close sur soi, n’ayant besoin que de soi pour exister. Elle est donc <em>liberté</em>. Ne s’engluant plus dans le monde, elle est cette conscience qui peut le nier ou le viser comme n’étant pas là, l’imaginer, ou le <em>néantiser</em> selon la formule de Sartre, et par là, elle renvoie nécessairement à la liberté. Ni abstraite ou indépendante du monde dans lequel elle s’incarne, elle est concrète et individuelle. Entre être et néant, puisque l’un ne saurait exister sans l’autre, le néant ne peut venir à l’être que par la liberté, seul l’homme peut introduire du non-être au sein de l’être. D’où l’idée sartrienne que « la liberté précède l’essence de l’homme et la rend possible »<a title="_ftnref10" href="#_ftn10" name="_ftnref10"><span class="MsoFootnoteReference">[10]</span></a>. Être même de l’homme, la liberté est ce à quoi l’homme ne saurait échapper, n’ayant pas d’essence, « il n’y a pas de différence entre l’être de l’homme et son être-libre »<a title="_ftnref11" href="#_ftn11" name="_ftnref11"><span class="MsoFootnoteReference">[11]</span></a>, d’où la formule paradoxale : « l’homme est condamné à être libre. »<a title="_ftnref12" href="#_ftn12" name="_ftnref12"><span class="MsoFootnoteReference">[12]</span></a> Déterminé à être libre, cette liberté se présente à lui comme étant totale, sans limite, et sans condition. Notre liberté nous rappelle aussitôt à nos responsabilités absolues et entières. Car pour l’homme, la responsabilité est totale. Il n’y réchappe en aucune façon<a title="_ftnref13" href="#_ftn13" name="_ftnref13"><span class="MsoFootnoteReference">[13]</span></a>. Ne pouvant invoquer la moindre nature humaine pour excuser ses actes, le fardeau de la liberté est soudain à sa propre charge. Par chacune de mes attitudes, je vais exprimer cette pleine liberté. Triste, passionné, engagé, je manifeste cette liberté, essentielle contingence sans laquelle je ne serais pas. Que mes gestes ou mes sentiments me dépassent par la suite, cela n’empêche pas qu’ils expriment ma liberté. La conscience n’est jamais inerte. Elle est acte. Projet. C’est ce qu’on peut appeler une liberté en situation : être condamné à la liberté sans rémission, et donc forcé de choisir. Car ne pas choisir, étant encore, le choix fait de ne pas choisir. Impossible désormais de nier cette liberté. Notre seul refuge serait la « mauvaise foi ». Mensonge à soi-même et dérobade, l’homme aura beau prétendre que le destin peut être bien fâcheux, le contexte spatio-temporel ne constitue en aucune manière le moindre obstacle à sa liberté, mais bien « le coefficient d’adversité à travers les techniques librement inventées, librement acquises. »<a title="_ftnref14" href="#_ftn14" name="_ftnref14"><span class="MsoFootnoteReference">[14]</span></a> L’homme sera devant l’incommensurable choix : endosser l’habit d’un personnage parmi une multitude : bourreau, médecin, écrivain, avocat, etc., mais aussi obligation de choisir de vivre à la façon de tel ou tel personnage, le choix de librement fixer des limites à son désir.<br /><br />Pour l’existentialisme sartrien, l’homme se choisit et décide de sa vie, même lorsqu’il n’a pas conscience de choisir. Inversion de la conception classique : « l’existence précède l’essence. »<a title="_ftnref15" href="#_ftn15" name="_ftnref15"><span class="MsoFootnoteReference">[15]</span></a> C’est cette « réalité humaine » dont parle Sartre pour définir le <em>Dasein</em> de Heidegger, qui est « cet être pour lequel il est dans son être question de l’être. »<a title="_ftnref16" href="#_ftn16" name="_ftnref16"><span class="MsoFootnoteReference">[16]</span></a> L’homme n’a pas d’essence puisque, jeté au monde, il sera d’abord amené à exister en tant qu’existant, c’est-à-dire qu’il sera amené à <em>ex</em>-ister : être hors du néant. Donc, amené à se tenir en dehors de soi-même, être condamné à ne pas coïncider avec son être, à la manière de la chose.<br /><br />L’homme peut accepter d’avoir un rapport authentique à soi, ou se refermer dans l’inauthenticité en se posant comme une chose dans le monde, acceptant par ce choix l’anonymat du « on », et l’inauthenticité des relations quotidiennes. L’homme demeure entièrement ce qu’il fait. Sa liberté absolue l’oblige à endosser la pleine responsabilité de ses actes. Et il ne tient jamais qu’à lui de se tenir résolu et de rouvrir la question de l’être, à travers une interrogation sur sa propre existence. Le prompt refus d’accepter un tel état de fait peut facilement s’expliquer par ce que Sartre nomme l’angoisse<a title="_ftnref17" href="#_ftn17" name="_ftnref17"><span class="MsoFootnoteReference">[17]</span></a>. Cette angoisse est liée à notre total engagement, au poids écrasant de cet engagement qui est au fondement de nos actes. Lorsque j’agis, je n’agis jamais pour moi seul. Et même si je tâche de m’abriter derrière le voile de la mauvaise foi, prétendant que mon acte ne vaut que pour moi-même, au moment où je me choisis par l’acte que j’accomplis, je choisis et engage par là l’humanité entière. Subjectif au départ, l’acte engage l’homme en général, c’est-à-dire que lorsque je me choisis un personnage, je choisis par là-même un rôle pour l’humanité. Je suis ce que je pense que l’homme en général devrait être. On peut alors mieux comprendre le rôle de l’angoisse. Inévitable pour celui qui voudrait se cacher sa responsabilité ; liée à la multitude des possibles et au fait que parmi tous, je ne puisse en choisir qu’un seul et doive, après coup, en assumer la responsabilité. L’angoisse se trouve être la révélation de mon attitude totalement contingente. L’angoisse est cette terrible lumière jetée sur ma facticité et l’infinité de ma liberté. On se trouve alors au centre de cette grande question kantienne : que dois-je faire ? Et rien d’extérieur à nous ne peut décider à notre place. Ni la Raison de la morale kantienne, car elle conduit à des dilemmes, donc est incapable de choisir. Ni les sentiments, car c’est moi qui accepte de les ressentir et non d’y résister. Ni les conseils des personnes de confiance, car je choisis les personnes dont j’estimerai les conseils ; ce ne sont donc pas eux, mais moi en définitive qui décide. Pas plus les signes extérieurs (vocation, destin…) car ils n’existent que par mon interprétation, et n’ont de valeur que si je leur en donne. Je peux alors choisir de me suicider rien ne m’oblige à sauver ma vie. Pas plus la prudence que tout autre motif raisonnable.<br /><br />L’existentialisme n’est pourtant pas l’apologie de l’acte gratuit. Il n’y pas de nature humaine (universelle) mais une condition humaine (universelle). Pas de valeurs morales transcendantes à la subjectivité, mais une morale de l’engagement.<br /><br />L’homme est entièrement libre. Aussi, il ne peut nier que la découverte soudaine de cette liberté s’accompagne d’une morale du fait même qu’il se trouve soudain lié et solidaire à tout ce qui se passe dans le monde. D’abord, avant même d’agir, il doit tenir compte de choisir une morale en fonction de trois critères :</span><br /><span style="font-size: medium; font-family: georgia, palatino;"> a) la situation qui s’impose à tout homme</span><br /><span style="font-size: medium; font-family: georgia, palatino;"> b) l’universalité du projet, c’est-à-dire que tout homme devrait pouvoir faire la même chose que lui</span><br /><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: medium;"> c) l’authenticité de ses pensées, c’est-à-dire refuser la mauvaise foi et tendre vers l'authenticité.<br /><br />Ainsi, Sartre accorde à l’homme, le rôle de législateur de lui-même, car selon Sartre, la « vraie » liberté se gagne en conformité à des règles. Il n’y a aucune aliénation de sa liberté. Certes, il sera soumis à la pression des circonstances, mais en tout état de cause, quoi qu’il choisisse, on ne pourra jamais accuser son acte de la moindre gratuité. <br /><br />Sartre a probablement modifié le concept d’existence ; certes, il s’est raccroché à l’école de l’humanisme – ce qui a ressemblé pour beaucoup à de l’opportunisme – cela l’a ainsi contraint à apporter de nombreuses précisions à propos de l’homme, ce qu’il a pu ensuite organiser en doctrine. L’existentialisme se concilie désormais avec humanisme en ce sens que la liberté jamais altérée par le déterminisme est, en fait, éclairée <em>par</em> ce dernier<a title="_ftnref18" href="#_ftn18" name="_ftnref18"><span class="MsoFootnoteReference">[18]</span></a>. Pour Sartre, l’homme est au centre de sa vie et de ses choix qu’il prend de son plein gré ; libre ou esclave, il est toujours libre et tout entier. Il n’est plus définissable par ce qu’il est, mais par ce qu’il peut être. Jamais fermé sur soi, il peut se dépasser « hors de soi », vers des possibles qui ne dépendent que de lui. En acceptant cet argument philosophique, on pourrait enfin mettre à mal cette terrible tendance contemporaine à se trouver systématiquement des excuses, et que Pascal Bruckner avait très justement nommé en parlant de « tentation de l’innocence »<a title="_ftnref19" href="#_ftn19" name="_ftnref19"><span class="MsoFootnoteReference">[19]</span></a>.<br /><br />Bien sûr, Sartre ne nie pas la détermination de notre condition physique et sociale. Mais notre liberté n’est pas limitée par celle-ci. Il réfute que nous ne sommes pas libres, ni d’échapper au sort de notre classe sociale, ni aux maladies ou à nos passions – l’argument devenu un grand classique pour nier la liberté humaine.<br /><br />En fait, Sartre répond à l’argument du déterminisme, par l’argument même. Loin de m’affaiblir, le déterminisme propulse ma liberté au premier plan, m’oblige à choisir. Durant l’occupation, l’homme était systématiquement confronté au choix : collaborer ou résister ; ce choix révélait sa nature d’homme libre. Et face au choix, il demeurait encore libre de ne pas choisir : <em>c’était un choix !</em></span></p><p align="justify"> </p><p style="text-align: right;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: medium;"><img id="media-1135519" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/00/3005719380.jpeg" alt="l'existentialisme est un humanisme,existentialisme,jean-paul sartre,sartre" />(Paru dans les <span style="color: #800000;"><em>Carnets de la philosophie</em></span>, n°2.)</span></strong></p><p align="justify"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: medium;"> </span></p><div align="justify"> </div><div align="justify"> </div><div align="justify"> </div><div align="justify"> </div><div align="justify"> </div><div align="justify"> </div><div align="justify"> </div><div align="justify"> </div><div align="justify"> </div><div align="justify"> </div><div align="justify"> </div><div align="justify"> </div><div align="justify"><hr align="left" size="1" width="33%" /></div><p class="MsoFootnoteText" style="margin: 0cm 0cm 0pt;" align="justify"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: medium;"><a title="_ftn1" href="#_ftnref1" name="_ftn1"><span class="MsoFootnoteReference">[1]</span></a> Jean-Paul Sartre, L’existentialisme est un humanisme, Folio-essai, pp. 29-30.</span></p><div align="justify"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: medium;"><a title="_ftn2" href="#_ftnref2" name="_ftn2"><span class="MsoFootnoteReference">[2]</span></a> <span lang="NL" xml:lang="NL">Op. Cit., p. 39.<br /></span><a title="_ftn3" href="#_ftnref3" name="_ftn3"><span class="MsoFootnoteReference">[3]</span></a> <span lang="NL" xml:lang="NL">Op. cit., p. 30.<br /></span><a title="_ftn4" href="#_ftnref4" name="_ftn4"><span class="MsoFootnoteReference">[4]</span></a> <span lang="NL" xml:lang="NL">Op. cit., p.70.<br /></span><a title="_ftn5" href="#_ftnref5" name="_ftn5"><span class="MsoFootnoteReference">[5]</span></a> « Il y a deux sens au mot subjectivisme, et nos adversaires jouent sur ces deux sens. Subjectivisme veut dire d’une part choix du sujet individuel par lui-même, et, d’autre part, impossibilité pour l’homme de dépasser la subjectivité humaine. C’est le second sens qui est le sens profond de l’existentialisme », op. c
ZenAttitude
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Huis Clos (Jean-Paul Sartre) par Michel Raskine
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2007-10-12T20:00:00+02:00
2007-10-12T20:00:00+02:00
L’Enfer dans le Regard des Autres. " Huis Clos " est sans doute la...
<p><img style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="Huis Clos aux Abbesses" src="http://surl-octuplesentier.blogspirit.com/images/HuisClos2007.jpg" alt="Huis Clos aux Abbesses" /><span style="text-decoration: underline;"><strong><em>L’Enfer dans le Regard des Autres.</em></strong></span><br /><br />"<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Huis_clos" target="_blank">Huis Clos</a>" est sans doute la pièce la plus célèbre de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Paul_Sartre" target="_blank">Sartre</a>, que beaucoup de personnes pensent connaître sans jamais l’avoir vue ("<em>L'Enfer, c'est les Autres</em>"). Bonne idée donc pour le <a href="http://surl-octuplesentier.blogspirit.com/archive/2007/06/19/théatre-de-la-ville-2007-paris.html" target="_blank">Théâtre de la Ville</a> de demander à <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Michel_Raskine" target="_blank">Michel Raskine</a> de re-créer son adaptation de 1991 (Théâtre de la Salamandre de Lille).<br />Seize ans après, le monde a changé, ses acteurs ont vieilli, l’aspect vaudeville métaphysique est-il encore d’actualité à l’heure de la télé-réalité et de ses émissions lofteuses ?<br /><br />Pas de surprise, les bons textes vieillissent bien, et le postulat de base est toujours aussi efficace. Trois personnes qui ne se connaissent pas sont condamnées à vivre ensemble pour l’Eternité, dans un espace sans ouvertures qui tient à la fois de la prison et de l’hôtel bourgeois décadent. L’aspect Loft décrépi, au personnel limité, correspond bien à notre monde moderne, gagné par l’obsession du low-cost et de la rentabilité maximale.<br />Tous 3 sont à la fois différents, mais complémentaires.<br />. Joseph Garcin est un homme lâche, âgé, fusillé depuis 1 mois, habillé dans des tons verts très classiques. Homme à femmes et journaliste, il aime parler, diriger, mais à du mal à s’imposer. Il finit par récupérer le canapé contemporain vert.<br />. Inès Serrano est une employée des Postes âgée et lesbienne, dominatrice et sadique, empoisonnée au gaz depuis 1 semaine, habillée en cuir rouge et noir. Ses poumons sont ravagés par le tabac, et elle est maigre comme une <a href="http://surl-octuplesentier.blogspirit.com/archive/2007/09/30/anorexie-isabelle-caro-pour-no-l-ita.html" target="_blank">anorexique</a> croyant à la beauté de la minceur extrême. Elle obtient un canapé moderne rouge.<br />. Estelle Rigault est une jeune femme infantile et narcissique, emportée depuis 1 jour par une pneumonie, qui joue à la femme du monde blonde et raffinée sans en avoir le pedigree. Elle exige le canapé classique bleu, plus accordé avec son style et sa tenue.<br /><br /><a href="http://www.angelfire.com/electronic/bodhidharma/three_poisons.html"><img style="border-width: 0; float: right; margin: 0.7em 0 1.4em 0.7em;" title="Les 3 Poisons de la Roue de la Vie" src="http://surl-octuplesentier.blogspirit.com/images/3poisons.gif" alt="3 Poisons" /></a>Un tel triangle est obligatoirement instable, chaque mouvement d’attraction ou de répulsion entraînant nécessairement des alliances temporaires, des jalousies, des déchirements, des intérêts divergents. Ce qui est intéressant à remarquer, c’est que ce trio correspond bien aux 3 Poisons de la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Bouddhisme" target="_blank">tradition bouddhiste</a> : Joseph est le Serpent (arrogance-aversion), Inès est le Coq (désir-attachement), Estelle est le Cochon (ignorance-indifférence). Ces 3 poisons de l’esprit sont symboliquement représentés au centre de la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/La_roue_de_l%27existence_karmique" target="_blank">Roue de la Vie</a>, et sont la cause de la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Du%E1%B8%A5kha" target="_blank">Souffrance</a> humaine.<br />Avoir l’Eternité devant soi enlève le sentiment d’urgence qui pousserait à vouloir régler aujourd’hui le problème qu’on ne pourra pas corriger demain. Conséquence, le temps passe vite, et si les contraintes du corps (dormir, manger, boire, se laver, …) n’existent plus, les désirs/addictions sont toujours là (alcool, tabac, maquillage, sexe, besoin d’être aimé, …). Chacun d’eux est prisonnier de ses désirs, de ses passions, de son attachement à la vie, à la peur de perdre ses repères, de l’idée qu’il se fait de lui-même.<br /><br /><img style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="Vaudeville existentiel" src="http://surl-octuplesentier.blogspirit.com/images/HuisClosRaskine.jpg" alt="Huis Clos" />Pourtant, la prison n’est que virtuelle, car la porte de la cage est ouverte. Chacun d’eux pourrait sortir, s’il l’osait. Encore faut-il être capable de voir en soi-même, plutôt que d’essayer de se définir par rapport aux autres. L’absence de miroirs [1] entraîne à vouloir se voir dans le regard des autres.<br />En ne prenant pas conscience de l’illusion dans laquelle ils sont, ils perpétuent donc le cycle sans fin de leur enchaînement.<br />C’est peut-être ce que signifie le Christ menotté, affalé sur un quatrième canapé et dont personne ne se soucie. Si Lui n’a pas été capable de s’en sortir au bout de 2000 ans, l’Enfer des Passions a devant lui un avenir radieux.<br /><br />[1] Dans le <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Zen" target="_blank">Zen</a>, le miroir est le symbole de l’esprit à polir et nettoyer.<br /><br />Note: 9/10<br /><br /><span style="text-decoration: underline;"><strong>Compléments :</strong></span> <br />> Le spectacle sur le site du <a href="http://www.theatredelaville-paris.com/theatre/huis-clos.html" target="_blank">Théatre de la Ville</a>.<br />> Les analyses et critiques de <a href="http://www.theatrotheque.com/article974.html" target="_blank">LaThéâtrothèque</a>, <a href="http://www.atpaix.com/spectacle.php?numSpectacle=61&PHPSESSID=ee920c36633b93ad745ccade5fe617e8" target="_blank">ATP-Aix</a>, <a href="http://www.lesculturelles.net/theatre.md/245_huis-clos" target="_blank">LesCulturelles</a>, <a href="http://www.humanite.fr/1991-04-02_Articles_-LES-SEQUESTRES-DE-l-AMOUR" target="_blank">L'Humanité</a>.<br />> Sur les blogs: <a href="http://bladsurb.blogspot.com/2007/10/jean-paul-sartre-huis-clos-thtre-des.html" target="_blank">BienCulturel</a>, <a href="http://julie-luvuentendu.blogspot.com/2007/10/huis-clos-sartre.html" target="_blank">LuVuEntendu</a>, <a href="http://www.france-blog.info/?p=617" target="_blank">FranceBlog</a>.</p>
Marc Alpozzo
http://marcalpozzo.blogspirit.com/about.html
L’humanisme de Sartre
tag:marcalpozzo.blogspirit.com,2005-11-01:2978158
2005-11-01T11:05:00+01:00
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À la sortie de la Seconde Guerre mondiale, l’humanisme classique est...
<p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino; line-height: 19.228px; text-align: justify;">À la sortie de la Seconde Guerre mondiale, l’humanisme classique est décrédibilisé. Le nazisme, les camps de la mort ou encore Hiroshima tendent à éteindre les lumières de l’humanisme… Car on constate avec une grande tristesse, que ni la Raison ni la culture n’ont permis d’éviter Auschwitz. Cette faillite des valeurs de l’humanisme, cette déroute des idéaux des Lumières et de l’optimisme scientiste du XIXème devient alors un écueil majeur pour l’humanisme classique. La rationalité des Lumières n’a pas eu raison de la barbarie nazie, pis, la rationalité fut instrumentalisée par l’idéologie nazie, qui mit au point les camps de la mort selon une organisation minutieuse et scientifique. Cet article est paru dans le numéro 14, du<span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;"><span style="color: #800000;"><em> Journal de la cultur</em><em>e</em></span>, de juillet 2005. Le voici désormais en accès libre dans l'<span style="color: #800000;"><em>Ouvroir</em></span>.</span></span></strong></span></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/02/1241957426.jpg" id="media-872230" alt="" /></p><div class="texte" style="font-size: 0.92em; line-height: 1.9em; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; letter-spacing: normal;"><p style="text-align: justify;"> </p><p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 0.92em; line-height: 1.9em;"><img id="media-1068205" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/01/2196130626.jpg" alt="sartre" /> <br /></span><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Aussi, à la sortie de la Seconde Guerre mondiale, <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/martin-heidegger/" target="_blank" rel="noopener">Heidegger</a></span> qui avait à justifier son adhésion au nazisme, écrit-il dans une lettre célèbre adressée à Jean Beaufret que face à l’effondrement des humanismes classiques, il s’agit de renoncer à l’idée de l’homme comme sujet pour faire du Dasein le « berger de l’Être » [<a id="nh1" class="spip_note" style="text-decoration: none; color: #333333;" title="Martin Heidegger, Lettre sur l’humanisme, Gallimard, tel." href="http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/l-humanisme-de-sartre.html#nb1" rel="footnote">1</a>].<br /><br /></span></p><p style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 0.92em; text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">De l’autre côté, pour les marxistes et les existentialistes chrétiens, l’humanisme classique a oublié « l’homme concret » qui se définit à travers une praxis historique pour les premiers, à travers la transcendance, seul rapport possible à laquelle l’existence de cette créature finie qu’est l’homme peut prendre un sens, pour les seconds.<br /><br /></span></p><p style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 0.92em; text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Dans cette « querelle » [<a id="nh2" class="spip_note" style="text-decoration: none; color: #333333;" title="Alain Renaut, Sartre, le dernier des philosophes, Grasset." href="http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/l-humanisme-de-sartre.html#nb2" rel="footnote">2</a>] , <span style="color: #800000;"><a style="color: #800000;" href="http://marcalpozzo.blogspirit.com/tag/sartre" target="_blank" rel="noopener">Sartre</a></span> prend position, contre toute attente, et va se définir une stratégie.<br /><br /></span></p><p style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 0.92em; text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">C’est en 1945 qu’il se dit explicitement « humaniste » [<a id="nh3" class="spip_note" style="text-decoration: none; color: #333333;" title="Le 29 octobre 1945, il prononce une conférence à la demande du club (...)" href="http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/l-humanisme-de-sartre.html#nb3" rel="footnote">3</a>]. Ceux qui avaient lu <em>La nausée</em>, ne pouvaient que s’interroger sur ce curieux revirement. N’est-ce pas Sartre qui écrit à l’époque de La nausée que l’existence humaine est manque, vide « trou dans l’être » ? Cette drôle de conversion à l’humanisme sera alors d’emblée suspecte, ou pour d’autres n’en sera pas une [<a id="nh4" class="spip_note" style="text-decoration: none; color: #333333;" title="Jean Kanapa, L’existentialisme n’est pas un humanisme, éditions (...)" href="http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/l-humanisme-de-sartre.html#nb4" rel="footnote">4</a>].<br /><br /></span></p><p style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 0.92em; text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Une mécompréhension très compréhensible si l’on ne saisit pas l’origine même de ce revirement qui trouve sa source dans l’expérience de la « drôle de guerre », le stalag, et que Sartre rapporte à partir d’une conception de la communauté humaine à laquelle il se rattache et, dans laquelle, il se situe comme un individu <em>comme</em> les autres [<a id="nh5" class="spip_note" style="text-decoration: none; color: #333333;" title="Il se confiera à Simone de Beauvoir en ces termes : « Dans les camps de (...)" href="http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/l-humanisme-de-sartre.html#nb5" rel="footnote">5</a>].<br /><br /></span></p><p style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 0.92em; text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">L’expérience de la Seconde Guerre mondiale fut, en effet, assez cruciale pour venir modifier en profondeur le regard de Sartre sur autrui. Pour ce « deuxième » Sartre, l’individu n’est plus posé contre la communauté, tel qu’il le décrivait dans La Nausée, mais est agrégé, qu’il le souhaite ou non, à la communauté entière. Certes, Sartre penseur athée, considère qu’il n’existe aucune nature humaine, aucune espèce humaine, ou d’Homme en général. L’expérience de la communauté humaine demeure une expérience prégnante, elle suppose surtout que je reconnaisse une identité à travers la multiplicité des individus. Sans que cela n'ait le moindre rapport avec l’essence de l’homme, que Sartre ne reconnaît pas, j’ai mon « être-homme » en commun avec autrui.<br /><br /></span></p><p style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 0.92em; text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Cela explique probablement la deuxième raison pour laquelle Sartre se ralliera à l’humanisme. D’abord, il explique que l’on peut désormais dégager deux sens de l’humanisme : la première est l’humanisme classique, qu’il dénonce à la fin de L<em>’existentialisme est un humanisme</em>, puisque cet humanisme-là « prend l’homme comme fin et comme valeur supérieure » [<a id="nh6" class="spip_note" style="text-decoration: none; color: #333333;" title="Jean-Paul Sartre, L’existentialisme est un humanisme, Gallimard, Folio, (...)" href="http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/l-humanisme-de-sartre.html#nb6" rel="footnote">6</a>], et parce qu’il prend sa source dans une nature humaine, ce qui ne pourrait correspondre avec l’existentialisme qui pose comme principe que l’existence précède l’essence, et pense cette possibilité « absurde » [<a id="nh7" class="spip_note" style="text-decoration: none; color: #333333;" title="Ibid., p.75." href="http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/l-humanisme-de-sartre.html#nb7" rel="footnote">7</a>] car elle supposerait qu’on puisse cesser d’être soi-même un homme pour pouvoir comparer la valeur de l’homme et les autres valeurs.</span></p><p style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 0.92em; text-align: justify;"> </p><p><span style="font-size: 12pt;"><img id="media-1068209" style="margin: 0.7em auto; display: block;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/01/3593333562.jpg" alt="sartre" /></span></p><p style="text-align: center;"><span style="font-size: 10pt;">Jean-Paul Sartre</span></p><p style="text-align: center;"> </p><p style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 0.92em; text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Mais cela veut surtout dire que Sartre met au point un humanisme qui lui est propre. Un humanisme qui ne saurait être prononcé sans le concept d’existentialisme. Celui de l’homme « condamné à être libre ». Celui de l’homme qui se choisit, et décide de sa vie même lorsqu’il n’a pas conscience de choisir. C’est l’exemple du bourreau qui choisit d’être bourreau, ou de l’avocat qui choisit d’être avocat. Et cela correspond au sens de sa célèbre formule venant inverser la conception classique : « l’existence précède l’essence. » Pour Sartre, l’homme n’a pas d’essence. L’homme jeté au monde, va d’abord exister en tant qu’existant, puis se définir ensuite.<br /><br /></span></p><p style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 0.92em; text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Une liberté absolue qui ne va pas sans une grande contrainte, naturellement : celle d’endosser la pleine responsabilité de ses actes. Car « liberté » signifie nécessairement « responsabilité ». Subjectif au départ, l’acte engage l’homme en général, c’est-à-dire que lorsque je me choisis un personnage, je choisis par là même un rôle pour l’humanité. Je suis ce que je pense que l’homme en général devrait être.<br /><br /></span></p><p style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 0.92em; text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">La pensée de Sartre se trouve alors au centre de cette grande question kantienne : <em>« que dois-je faire ? »</em> Il nous montre que rien d’extérieur à nous ne peut décider à notre place. Ni la Raison de la morale kantienne, car elle conduit à des dilemmes, donc est incapable de choisir. Ni les sentiments, car c’est moi qui accepte de les ressentir et non d’y résister. Ni les conseils des personnes de confiance, car je choisis les personnes dont j’estimerai les conseils ; ce ne sont donc pas eux, mais moi en définitive qui décide. Ni des signes extérieurs (vocation, destin…) car ils n’existent que par mon interprétation, et n’ont de valeur que si je leur en donne.</span></p><p style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 0.92em; text-align: justify;"> </p><p style="text-align: center;"><span style="font-size: 12pt;"><img id="media-1068208" style="margin: 0.7em auto; display: block;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/02/2335846709.jpg" alt="sartre" /></span></p><p style="text-align: center;"><span style="font-size: 10pt;">Jean-Paul Sartre (1905-1980)</span></p><p style="text-align: center;"> </p><p style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 0.92em; text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Ce qui veut dire que l’existentialisme, sans être une apologie de l’acte gratuit, accorde à l’homme, ce rôle fondamental de législateur de lui-même. Ce qui tend nécessairement vers une morale ; l’homme ne pouvant faire autrement que se fonder sa propre morale, puisque la « vraie » liberté ne saurait se gagner qu’en conformité à des règles.<br /><br /></span></p><p style="font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; font-size: 0.92em; text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">Voilà pourquoi il ne s’agit pas de penser le ralliement de Sartre à l’humanisme comme un projet opportuniste afin de s’imposer sur la scène philosophique, mais de le penser comme un vrai engagement en tant qu’il défend une doctrine de l’« action », fondant sa morale de l’engagement qui est au centre même de sa pensée. Ça n’est donc rien de moins qu’une conception novatrice de l’humanisme qui tend à convaincre que l’existentialisme est un « optimisme », une « doctrine d’action » qui pense l’Homme et l’existence de façon radicalement neuve.<br /><br /></span></p><p style="text-align: left;"><strong><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;"><img id="media-1127026" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/01/2532850373.jpeg" alt="jean-paul sartre,simone de beauvoir,heidegger,alain renaut,jean beaufret,sartre" />Paru dans le<span style="color: #800000;"><em> Journal de la cultur</em></span>e, n°14 Juil-Août 2005.</span></strong></p><p style="text-align: left;"> </p><p style="text-align: left;"> </p><p style="text-align: left;"> </p><p style="text-align: left;"> </p><p style="text-align: left;"> </p><p style="text-align: left;"> </p><p style="text-align: left;"> </p></div><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">___________________________________________</span></p><div class="notes" style="margin-top: 1.4em; padding-top: 2px; clear: both; font-size: 0.77em; color: #333333; font-family: Georgia, 'Times New Roman', serif; letter-spacing: normal;"><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">[<a id="nb1" class="spip_note" style="text-decoration: none; color: #333333;" title="Notes 1" href="http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/l-humanisme-de-sartre.html#nh1" rev="footnote">1</a>] Martin Heidegger, <em>Lettre sur l’humanisme</em>, Gallimard, tel.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">[<a id="nb2" class="spip_note" style="text-decoration: none; color: #333333;" title="Notes 2" href="http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/l-humanisme-de-sartre.html#nh2" rev="footnote">2</a>] Alain Renaut, <em>Sartre, le dernier des philosophes</em>, Grasset.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">[<a id="nb3" class="spip_note" style="text-decoration: none; color: #333333;" title="Notes 3" href="http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/l-humanisme-de-sartre.html#nh3" rev="footnote">3</a>] Le 29 octobre 1945, il prononce une conférence à la demande du club Maintenant, dont le texte sténographié et à peine retouché par Sartre sera intitulé <em>L’existentialisme est un humanisme</em>.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">[<a id="nb4" class="spip_note" style="text-decoration: none; color: #333333;" title="Notes 4" href="http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/l-humanisme-de-sartre.html#nh4" rev="footnote">4</a>] Jean Kanapa, <em>L’existentialisme n’est pas un humanisme</em>, éditions sociales.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">[<a id="nb5" class="spip_note" style="text-decoration: none; color: #333333;" title="Notes 5" href="http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/l-humanisme-de-sartre.html#nh5" rev="footnote">5</a>] Il se confiera à Simone de Beauvoir en ces termes : « Dans les camps de prisonniers, il y avait une seule manière d’être avec les autres, on se confiait les uns avec les autres, on se demandait des conseils, etc. » in Simone de Beauvoir, <em>La cérémonie des adieux</em>, Gallimard, p. 338.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">[<a id="nb6" class="spip_note" style="text-decoration: none; color: #333333;" title="Notes 6" href="http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/l-humanisme-de-sartre.html#nh6" rev="footnote">6</a>] Jean-Paul Sartre, <em>L’existentialisme est un humanisme</em>, Gallimard, Folio, p.74.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="font-family: georgia, palatino; font-size: 12pt;">[<a id="nb7" class="spip_note" style="text-decoration: none; color: #333333;" title="Notes 7" href="http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/l-humanisme-de-sartre.html#nh7" rev="footnote">7</a>] Ibid., p.75.</span></p></div>