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Marc Alpozzo
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David Cronenberg ou la violence et son châtiment
tag:marcalpozzo.blogspirit.com,2010-01-25:1881575
2010-01-25T06:28:00+01:00
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Comment se fabrique-t-on une histoire ? Quel est donc le vrai visage de...
<p style="text-align: justify;"><span style="font-size: 12pt;"><strong><span style="font-family: Georgia, serif; text-align: justify;">Comment se fabrique-t-on une histoire ? Quel est donc le vrai visage de l’homme ? L’autre visage : celui de l’agressivité, de la violence, de la force, et même de la tyrannie peut-être. Oui ! C’est de ce visage-là que je voudrais vous parler à présent. Cette recension est p<span style="font-family: georgia, palatino, serif;">arue dans la<em> </em><span style="color: #800000;"><em>Revue du Cinéma</em></span>, numéro 2, de juin 2006. Revue et augmentée en décembre 2009, pour mon essai <em>La Part de l'ombre</em> (2010), la voici désormais en accès libre dans l'<span style="color: #800000;"><em>Ouvroir</em></span>.</span></span></strong></span></p><p><img src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/00/3795333354.jpg" id="media-872244" alt="" /></p><div style="text-align: center;"><span style="text-align: justify;"> </span></div><div style="text-align: justify;"><p lang="en-US" style="text-align: right; padding-left: 30px; margin-bottom: 0cm;" xml:lang="en-US"> </p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;"><img id="media-1071633" style="float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/02/3563302802.jpg" alt="kant,hegel,homo sapiens,david cronenberg,adn,medhi belhaj kacem,existenz,spider,m. night shyamalan,the village" />Câest de cette quête de sens en recherche de lâidentité même que se fonde le sujet du film de David Cronenberg,</span> <span style="font-family: Georgia, serif;"><em>A history of violence[1]</em></span><span style="font-family: Georgia, serif;">. Au-delà dâune technique complètement maîtrisée, et dâun film psychologique pénétrant, câest toute une série de questions qui sont posées en filigrane, et que nous pourrions découvrir ici ensemble -peut-être en nous sondant chacun de nous : qui se cache derrière les masques ? Où se terre la violence ? D'où vient exactement la menace ?</span></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"> </span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;">Déjà </span> <span style="font-family: Georgia, serif;"><em>The village</em></span> <span style="font-family: Georgia, serif;">de M. Night Shyamalan[2]</span> <span style="font-family: Georgia, serif;">posait les mêmes questions, faisant monter là la peur, lâangoisse chez son spectateur pour dresser un parallèle avec la pression que les autorités américaines exercent sur leurs concitoyens pour garder une Amérique aux abois, hier encore derrière son gouvernement aux desseins guerriers. Il est évident que les résonances du 09/11 et de la suite des évènements sur le théâtre des opérations qui ont révélé au monde entier la figure diabolique d'une Amérique déliquescente qui se prétend puritaine, non-agressive, et morale, mais qui cacherait en définitive un sombre visage, trouve dans le film de Cronenberg un écho particulier. Sauf quâici, la violence est toute intime.</span></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"> </span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;"><strong>I. Soi-même comme un autre ?<br /></strong>On connaît lâunivers très récent de David Cronenberg basé sur ce qui ressemble à de la névrose et de la schizophrénie alors que câen est déjà plus, pour reprendre lâinterprétation faite par</span> <span style="font-family: Georgia, serif;">Mehdi Belhaj Kacem</span> <span style="font-family: Georgia, serif;">à propos des cultissimes </span><span style="font-family: Georgia, serif;"><em>eXistenZ</em></span> <span style="font-family: Georgia, serif;">et S</span><span style="font-family: Georgia, serif;"><em>pider.</em></span></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"> </span></p><p style="text-align: center; margin-bottom: 0cm;"><span style="font-family: Georgia, serif; font-size: 12pt;">*</span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"> </span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;">Ici</span><span style="font-family: Georgia, serif;">, la schizophrénie est au centre de lâÅuvre. David Cronenberg conte lâhistoire dâun homme. Celle de Tom Stall, bon père de famille vivant paisiblement dans une bourgade tranquille, un lieu caractéristique de lâAmérique profonde. Un jour, pourtant, le bon père de famille abat dans un réflexe de légitime défense ses agresseurs, venus organiser un carnage dans son propre restaurant.</span></span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1071634" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/01/1627648649.jpg" alt="kant,hegel,homo sapiens,david cronenberg,adn,medhi belhaj kacem,existenz,spider,m. night shyamalan,the village" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">Extrait de la bande dessinée A History of Violence - 2005<br /><br /></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;">L'événement est le point de rupture. Jusque-là , ces gens, biens sous tous rapports, à l'évidence, le reflet typique du modèle de la famille moyenne américaine, vivaient comme tout un chacun : travaillaient dur et s'aimaient encore ; ils pouvaient aller jusquâà improviser des petits jeux coquins, jouant les post-ados pour combattre le redoutable sommeil de leur libido. Quant à leurs deux enfants, très beaux, le grand garçon, un fort en thème, faisaient du sport et mangeaient des céréales au petit-déjeuner. Et pourtant ! Quelque chose dans la mécanique tout à coup va cesser de fonctionner. A la fois pour le spectateur, attentiste, assistant hébété à une scène hyper violente, et la famille qui, au lendemain du drame, à peine fier de leur « héros », se retrouve soudain traquée par des gens patibulaires qui appellent le chef de la maison dâun autre nom que le sien.<br /><br /><br /></span></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;">Mais le spectateur, plus avertit que la famille dans un premier temps, a déjà compris que quelque chose ne tournait plus rond, parce qu'il y avait un secret bien gardé. Comment un homme ordinaire, malgré la peur, et les pulsions de vie, peut-il, comme cela, à l'instar d'une crise de colère qui rendrait son auteur aveugle mais efficace, se servir avec autant de dextérité dâune arme à feu, être si maître de lui-même, et supporter la douleur dâun couteau dans le pied, sans faiblir à un seul moment ? Toute notre interrogation de spectateur est dâailleurs résumée dans cette formule prononcée à lâattention de la femme de Tom, par cet homme inquiétant, à moitié défiguré, et plutôt déterminé : « I want you to ask Tom, how come heâs so good⦠at killing people ! »<br /><br /></span></span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1071638" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/00/02/2148200635.jpg" alt="kant,hegel,homo sapiens,david cronenberg,adn,medhi belhaj kacem,existenz,spider,m. night shyamalan,the village" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">A History of Violence (2005)<br /><br /><br /></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;"><strong>II. Tom et Joe</strong><br />Pour le spectateur, donc, comme pour la femme de Tom d'ailleurs, commence les premiers doutes, les premières questions. Certes, il lui faudra attendre la seconde apparition de ce mystérieux personnage, dans sa propre propriété, et surtout la production de violence de son Tom de mari, pour connaître la faille ultime. Qui est Tom ? Tom ou Joe ? Et si Tom était Tom ET Joe ? Une face douce, celle de la morale, de la vie tranquille, châtrée par le long cortège de la « moraline » américaine, lâautre, plus inquiétante : celle des bas instincts, de la cruauté naturelle, de la violence spontanée et originaire.<br /><br /></span></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;">Serait-ce la réponse à la terrible énigme que nous nous posons soudain, à savoir, comment Tom, si pacifique, peut-il, en un clin dâÅil, opter pour un tel débordement de violence ? On peut même se prêter à la comparaison avec le fils de Tom qui, jusquâici, subissait les moqueries de deux de ses camarades, optant tout à coup, lui aussi, pour l'agressivité. Car avant cela, Tom, pensant avoir tué Joe, inhibait cet instinct de violence en son fils, au risque de lâempêcher dâêtre un homme.</span></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"> </span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;">Dans le titre le jeu de mots marche fort. Câest une histoire au sens de « story » conte, et lâhistoire au sens dâ « history ». La violence qui nous est ici contée est celle des civilisations, des hommes et chacun d'entre nous : l'ennemi intime. Il y a celle de ces deux malfrats qui ouvrent le film, sans foi ni loi, abattant hommes, femmes, enfants, sans aucune compassion, aucune empathie pour le genre humain. Il y a cette violence dâun homme aux abois, qui a découvert la socialisation par le travail et la famille. Mais il y a surtout cette idée inquiétante que la violence serait vraiment partout. Produite par la nature même de l'homme, programmé pour l'agressivité envers ses congénères. Certes, la violence est au centre de notre histoire humaine. Hegel et Marx le théorisèrent : la violence est accoucheuse du progrès sur le théâtre de lâhistoire. Et lâAmérique nâest pas en reste en ce qui concerne la violence. De par son passé : génocide indien, traite des Noirs, etc. De par son présent : « </span><span style="font-family: Georgia, serif;">Le film parle de la forme de violence que l'on trouve aux Etats-Unis par le simple fait que l'on peut s'acheter librement une arme. En même temps, il ne faut pas oublier que tout pays a été fondé dans la violence, voyez la France avec la Révolution... Souvent, les gens perçoivent la violence comme un virus, une contamination. Malheureusement, ce n'est pas le cas. La violence n'est pas une maladie, elle est une des composantes même de la santé[3]</span><span style="font-family: Georgia, serif;">. » Comment devons-nous interpréter ses quelques mots ? Y a-t-il seulement dans le cinéma de Cronenberg le moindre espoir de s'affranchir de toute pulsion de mort ? Comme si le père de <em>Scanners</em> se présentait en déculpabilisateur...<br /><br /></span></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"> </span></p><div style="text-align: center;"><span style="font-size: 12pt;"><img style="border-width: 0; margin: 0.7em 0;" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/02/503447138.jpg" alt="a-history-of-violence-2005-tou-04-g.jpg" /></span></div><div style="text-align: center;"><span style="font-size: 10pt; font-family: georgia, palatino, serif;">David Cronenberg sur le tournage du film<br /><br /></span></div><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;">Câest donc un questionnement sur la violence au centre de la société américaine, mais pas quâelle. Très vite, selon les mots même de David Cronenberg, cela interroge la violence du monde entier. Serait-ce une fatalité, car inscrite dans nos gènes ? Serait-ce social ? Pour Cronenberg, la réponse est apportée par la science elle-même : « </span><span style="font-family: Georgia, serif;">Oui, elle est inscrite dans notre ADN. Il y a une partie primitive, animale, reptilienne de notre cerveau qui est reliée à nos émotions, à notre sexualité, à notre aptitude à la violence. Des généticiens ont d'ailleurs étudié s'il existait un gène particulier pour les comportements extrêmement violents. Mais, dans le monde d'aujourd'hui, il y a des gens normaux qui commettent des actes violents car ils sont confrontés au chaos, à la guerre. Ce ne sont pas des psychopathes mais des personnes ordinaires plongées dans des situations extraordinaires[4]</span><span style="font-family: Georgia, serif;">. »</span></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"> </span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-family: Georgia, serif; font-size: 12pt;"><strong>III. La peur de soi</strong><br />Alors devrions-nous avoir définitivement peur de cette disposition à la lutte sélective ? Certes, l'agressivité se retrouve en toute espèce vivante et, pour des philosophes comme Kant ou Hegel, la violence, en tant que moteur de l'histoire, est en tout homme pour assurer son progrès, mais peut être également domptée, régulée, par la sociabilité naturelle de lâêtre humain. C'est l'objectif des civilisations et de la culture. Faire apparaître l'humain en lâhomme. <em>Homo sapiens sapiens</em> toujours asservi à ses instincts archaïques, mais qui doit également prendre en compte son prochain. Belle schizophrénie ! Dans cette relation de respect de la vie dâautrui, lâhomme sâaffranchit de son être pour la vie ; il se détache de son être biologique et ainsi sâaffirme en tant quâêtre humain, - mais sans complètement nier son instinct d'agressivité, car il ne le peut pas.<br /><br /></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"> </span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-family: Georgia, serif; font-size: 12pt;"><img style="border-width: 0; float: left; margin: 0.2em 1.4em 0.7em 0;" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/01/00/182273282.jpg" alt="18829657_jpg-r_760_x-f_jpg-q_x-20070907_043551.jpg" />Tom a pourtant cru en finir avec ce programme génétique (qu'il partage d'ailleurs avec son frère, voir pour cela la dernière moitié du film) en se socialisant, choisissant pour ce faire, une autre vie, une autre personnalité sociale. Il a mis trois longues années pour tuer Joe, menant depuis une vie tranquille au sein dâune famille aimante, et dâune petite ville où il est très apprécié de ses concitoyens et de ses employés, quâil traite dans la dignité et le respect. La faille, la mise en question de cette certitude apparaît le soir du « hold-up » manqué. Tragique soirée qui, comme un boomerang, vient rappeler Joe à lâordre. Sâen suit la dérive, les remises en question, le drame familial, qui sont observés par lâÅil de David Cronenberg, en maître <em>ès</em> technique, sachant saisir les regards, les gestuels, les silences, les moments indicibles où le désarroi, lâincompréhension, lâangoisse, lâinterrogation font leur nid. La femme de Tom se sent trahie, bafouée dans sa dignité. Tom pensait avoir tué Joe. Il ne comprend pas comment ce dernier a su aussi vite réapparaître dans des moments particuliers dâextrême tension. Sa femme devient de plus en plus inquiète : qui est son mari ? Tom ou Joe ? Nâest-ce pas Joe déguisé en Tom, ou Tom pris subitement de réminiscences dâune vie enterrée : celle de Joe ?</span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"> </span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;"><strong>IV Une allégorie morbide</strong></span></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;">C'est donc une allégorie en forme de questionnement de notre nature humaine. Elle pose des problèmes dâordre métaphysique, et principalement celui-ci : quâest-ce que lâidentité ? Voilà bien la grande question qui nous tenaille tous derrière Tom/Joe</span> <span style="font-family: Georgia, serif;">qui, à partir de cet évènement dramatique, nâaura de cesse, dans des silences bruyants, de se poser cette douloureuse interrogation : qu'est-ce qui fonde notre identité ? Sommes-nous la somme de nos actions passées ? Pouvons-nous échapper à cette agressivité naturelle en nous qui détermine nos actions au-delà de toute notion du bien, de l'amour d'autrui, des valeurs d'humanité ? L'identité de l'homme ne montre-t-elle pas au final que la portée de la morale finit par faire taire cet instinct de violence ?</span></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"> </span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;">Faudrait-il alors revenir à un sartrisme bien primaire ? Lâexistence précède lâessence : nous sommes ce que nous avons fait de nous-même à partir de ce que l'on a fait de nous. Cela nous permettrait tout du moins de croire en la capacité incroyable que lâhomme aurait pour se changer, se réinventer, loin de tout déterminisme biologique et inné.</span></span></p><p style="text-align: center;"><img id="media-1071636" style="margin: 0.7em 0;" title="" src="http://marcalpozzo.blogspirit.com/media/02/00/335935558.jpg" alt="kant,hegel,homo sapiens,david cronenberg,adn,medhi belhaj kacem,existenz,spider,m. night shyamalan,the village" /></p><p style="text-align: center;"><span style="font-family: georgia, palatino, serif; font-size: 10pt;">A History of Violence (2005)<br /><br /></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;">Ce serait comme si, voulant lutter contre son agressivité naturelle, il y aurait soudain une scission au sein du même homme. Deux faux-frères : l'un représentant le Bien, l'autre le Mal. Il y a à mon sens quelque chose de profondément pathétique dans ce mauvais duo : d'abord, la fausse tranquillité heureuse et bienveillante de Tom. La férocité naturelle de Joe. Je ne parlerai pas plus de dédoublement schizophrénique, tant l'un semble si bien contrôler l'autre, et presque s'en féliciter. Mais c'est le destin de toute l'histoire de l'humanité : se placer entre deux forces. L'une représentant le mal, la force obscure, l'expiation, la mort : Thanatos. L'autre s'abreuvant de source de vie, d'amour et de joie : Eros. Mais Tom, faute, car il fuit son ennemi intime, cet ennemi intérieur qu'il néglige d'aimer afin de définitivement s'en débarrasser. </span></span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"> </span></p><p style="margin-bottom: 0cm;" align="justify"><span style="font-size: 12pt;"><span style="font-family: Georgia, serif;"><strong>V. La question de l'identité<br /></strong></span><span style="font-family: Georgia, serif;">Au centre de lâÅuvre de Cronenberg, c'est donc la question complexe de lâidentité. Avons-nous seulement un "moi profond" comme le prétendait Henri Bergson ? Dans ce film, Cronenberg nous parle de cette terrible utopie de la « nouvelle » identité, ou plutôt, l'idée de l'identité qui fait corps. Ce que je veux dire, c'est qu'au-delà d'un programme génétique fondé sur le mode de l'agressivité innée, Cronenberg nous dit que toute identité est artificielle, sociale, et que cette dernière cherche à se substituer à l'identité génétique. Mais elle ne se crée pas de toute pièce. Elle est le produit de cette multitude. Ce qui revient à interroger toute la problématique de la volonté humaine, ou si vous voulez, à se demander si l'on peut se vouloir hors de son programme génétique. Lâhomme peut-il TOUT contrôler en commençant par son identitÃ